Distanciation, emplois du temps décalés, nettoyage des salles, masques obligatoires à partir du collège...Le Conseil scientifique a rendu un avis qui devrait servir de référence pour le déconfinement dans les écoles. Les parents d'élèves de la FCPE et les enseignants du Snes/FSU sont sceptiques.
Ce sera le document de référence. La note du Conseil Scientifique servira de base pour élaborer le protocole sanitaire du déconfinement dans les écoles et établissements scolaires. C'est ce qu'indiquait sur les réseaux sociaux Jean-Michel Blanquer, le ministre de l'Éducation Nationale samedi.
La note publiée par le Conseil scientifique détaille les conditions d'une reprise des cours. Le groupe d'experts qui auraient préféré attendre la rentrée de septembre préconise toutes une série de mesures, dont la mise en place pourrait être compliquée voire impossible dans certains cas.Avec cette note du Conseil scientifique, nous avons la base pour l’élaboration du protocole sanitaire annoncé pour donner un cadre sûr au déconfinement scolaire.
— Jean-Michel Blanquer (@jmblanquer) April 25, 2020
Ce protocole national sera la référence de tous les acteurs pour la préparation de rentrée: https://t.co/dC4hPgwOHC
Le respect de la distanciation, (un mètre entre les tables mais aussi dans les couloirs et escaliers) est un "casse tête chinois" pour Stéphanie Anfray, la présidente de la FCPE, fédération des parents d'élèves, en Gironde.
De son, côté, le syndicat d'enseignants SNES/FSU a fait des projections en fonction de la taille des établissements, de la taille de leurs bâtiments. Selon Jean-Pascal Méral, son secrétaire académique, les professeurs du secondaire ne pourront accueillir qu'un tiers de l'effectif.
La FCPE, elle aussi, s'interroge sur la pertinence de cette reprise au 11 mai.Avec des élèves assis à un mètre de distance, on arrive à 12 élèves par classe... Si l'on part du principe qu'il restera 6 semaines de cours, cela fait deux semaines de cours en présentiel. Il faudra que nos autorités aient un discours de vérité.
Des parents qui pourront choisir de ne pas envoyer leurs enfants à l'école préconise le Conseil scientifique. Mais cette recommandation ajoute une couche de complexité. D'autant que les établissements devront imaginer des emplois du temps décalés pour éviter que les élèves de classes ou de niveaux différents ne se croisent. Jean-Pascal Meral est dubitatif :Les risques valent-ils le coup pour moins de deux mois? Est ce qu'il ne faut pas plutôt préparer la rentrée de septembre ? Il y a une incohérence entre un gouvernement qui veut une reprise le 11 mai et un Conseil scientifique qui recommande une rentrée en septembre. Cette cacophonie scientifique et politique et les nombreuses inconnues qui demeurent autour du COVID 19 ne contribuent pas à une reprise dans la sérénité pour les parents.
On peut comprendre les parents qui hésitent. Mais l’école est obligatoire. Les enseignants devront savoir combien d'élèves voudront venir, combien seront en capacité de le faire. Il faut aussi régler la question des transports scolaires. Mais nous, enseignants, nous ne pourrons prendre en charge que les élèves en présentiel. Comment assurer aussi l'enseignement à distance pour ceux qui resteront à la maison ?
Quant au nettoyage des locaux (salles de classe, poignées de porte interrupteurs, parties communes deux fois par jour) tel que préconisé par les experts, il risque de se heurter au principe de réalité. Dans son communiqué du 21 avril, la FCPE citait les chiffres de l'observatoire national de la sécurité et de l'accessibilité des établissements d'enseignement : 25% des écoles et 22% des établissements du second degré n'ont pas suffisamment de points d'eau pour permettre le lavage régulier des mains. 1 école/7 et 1 établissement/10 n'a pas assez de savon.
Communiqué de presse suite aux annonces de dates de reprise @s_anfray @EmilieMarches @tv7bordeaux @SO_Bordeaux @Bleu_Gironde @F3Aquitaine @witfm pic.twitter.com/Mw14mQRun2
— FCPE 33 (@fcpe_33) April 21, 2020
Il faudra plus de personnels pour le nettoyage alors que les collectivités territoriales auront moins de salariés eux-aussi impactés par le coronavirus. Quand on connaît la réalité des règles d'hygiène dans les établissements, on se dit que ce n'est pas gagné. Il y a un gouffre entre ce qu'il existe et ce qui est demandé. Il faudrait oui mais il aurait fallu les mettre en place avant regrette Stéphanie Anfray.
Le Conseil Scientifique estime également que les adultes et les élèves à partir du collège devront porter un masque. Pour les élèves de maternelle, le port du masque est impossible, estime le Conseil Scientifique. En élémentaire, il faudra apprécier selon l'âge de l'enfant.
Là encore cette recommandation pose question. Et notamment celle du stock qui sera disponible le 11 mai.
Est ce qu'on en aura suffisamment? Il y aura sûrement des inégalités d'une académie à une autre s'inquiète la présidente de la FCPE Gironde
Pour le secrétaire académique Snes/FSU, Jean-Pascal Meral, l'Etat devra les fournir pour les élèves et le personnel :
On ne peut pas demander ni aux collègues ni aux élèves de venir avec un masque alors qu'on n'arrive pas en trouver. Quant aux masques maison, on ne peut pas être certain de leur efficacité. C’est pour le porter pendant plusieurs heures dans la journée. Ce n'est pas la même chose qu'une heure ou deux quand on va faire ses courses.
L'un comme l'autre attendent de l'Etat qu'il pose un cadre mardi. Soit 6 jours ouvrables avant la reprise du 11 mai.
Une précipitation que regrette Stéphanie Anfray. Mais elle espère, comme le préconise le Conseil Scientifique, que l'ensemble des partenaires sera associé à sa mise en oeuvre, collectivités territoriales et fédérations des parents. Elle met en garde :
Le confinement a mis en exergue les inégalités. Attention à ce que le déconfinement n'en produise pas d'autres.
Elle appelle à réfléchir aux solutions pour aider les élèves qui doivent renouer avec le système éducatif. "Pas seulement les "décrocheurs" mais aussi les adolescents qui sont aujourd'hui en souffrance, qui ont besoin de sortir de leurs 4 murs familiaux, ceux qui perdent la motivation". "Il faut aussi un temps où les élèves se resocialisent, où ils verbalisent le confinement anxiogène" ajoute-elle.
Le Snes/FSU demande que la semaine du 11 mai soit banalisée pour laisser le temps aux établissements de se préparer :
Il faudra faire le point sur les moyens à disposition, organiser les locaux, voir comment, matériellement, les personnels des Collectivités territoriales peuvent assurer le nettoyage des locaux...
Le Premier Ministre, Edouard Philippe, présentera le plan de déconfinement aux parlementaires mardi.