C'est un nouvel épisode dans la lutte qui oppose les irrigants aux militants anti-bassines. Le rapporteur public de la Cour administrative d'appel de Bordeaux, qui devait se prononcer ce 3 décembre sur la légalité de 16 sites, a suggéré la suspension de quatre retenues d'eau dont celle de Sainte-Soline, dans les Deux-Sèvres.
Dans le dossier des méga bassines en Poitou Charentes, le rapporteur public de la Cour administrative d’appel de Bordeaux a délivré ce 3 décembre ses recommandations. Il valide le volume de stockage d’eau souhaité par les irrigants, plus de 6 millions de mètres cubes, estimant que cela ne porte pas atteinte à la gestion et la préservation de la ressource.
Ça déclenche non pas seulement la suspension des quatre bassines mais potentiellement la suspension de l’ensemble du dossier.
Julien Le GuetPorte-parole du collectif "Bassines Non Merci"
En revanche, le rapporteur public recommande l’annulation de quatre retenues d’irrigation dans les Deux-Sèvres : celles de Messé, Mougon, Saint-Sauvant et Sainte-Soline pour des questions d’atteinte aux espèces protégées, en particulier l’outarde canepetière. Julien Le Guet est le porte-parole du collectif « Bassines Non Merci ! » et il assistait à cette audience : « Le tribunal administratif donne un sursis, permet aux porteurs de projet de rectifier la copie. Et en fait, c’est la troisième fois qu’il va falloir rectifier la copie si le rapporteur public est suivi. Ça signifie bien que pour quatre bassines, l’enjeu de l’outarde n’a pas été pris en compte. Et derrière, ça déclenche non pas seulement la suspension de quatre bassines mais potentiellement la suspension de l’ensemble du dossier. »
C’est elle qui est au cœur de cette décision : l’outarde canepetière. Le rapporteur public demande aux irrigants de se mettre en conformité avec les règles de protection de cet oiseau migrateur menacé d’extinction. Les effectifs de cette espèce ont diminué de 96% en 20 ans.
Pour la Ligue de Protection des Oiseaux, requérante dans l’affaire, il faudrait étendre les annulations. Régis Ouvrard est membre de la Ligue de Protection des Oiseaux en Poitou-Charentes : « 13 de ces 16 réserves sont sur des territoires où les agriculteurs bénéficient d’aides pour préserver l’outarde canepetière par des mesures agro-environnementales et nous considérons que c’est une perte d’habitat pour cette espèce en danger d’extinction. »
Reportage de Morgane Jacob, Elise Galand et Sylvie Tuscq-Mounet :
Parmi les quatre réserves remises en cause, celle de Sainte Soline où de violents affrontements ont eu lieu ces dernières années. Cette méga bassine est désormais presque remplie.
Nous, on met en garde sur la suspension de la retenue de Sainte-Soline.
Thierry BoudaudAgriculteur – Président de la Coop de l’eau 79
Les irrigants qui doivent en bénéficier alertent sur les conséquences de son interdiction, comme le précise Thierry Boudaud, agriculteur et président de la Coop de l’eau 79 : « De notre côté, nous mettons en garde sur la suspension de l’utilisation de la retenue de Sainte-Soline qui est construite et derrière laquelle, il y a des agriculteurs et des familles qui sont complètement dépendants de l’eau qui est dans cette retenue aujourd’hui. »
Après la présentation de cet avis du rapporteur public, la justice devrait rendre sa décision le 18 décembre prochain.