Le collectif Bassines Non Merci ! a dévoilé une partie de son programme concernant la mobilisation internationale "Stop méga-bassines" qui aura lieu du 16 au 21 juillet 2024. Malgré les violences de la mobilisation à Sainte-Soline en mars 2023, les militants continuent de défendre leurs valeurs, et appellent à la convergence internationale.
Le collectif a choisi le mois de juillet, à une semaine des Jeux Olympiques de Paris, pour faire un appel international à converger dans le Poitou cet été. Un village de l’eau s’installera du 16 au 21 juillet à la ferme de la Gennellerie dans la commune de Melle dans les Deux-Sèvres. « On est en train de construire un évènement qui va regrouper une dizaine de milliers de personnes. Tous les camarades, dans le monde et en Europe, sont invités à nous rejoindre pour être des nôtres », indique Julien Le Guet, porte-parole du collectif. Au programme, des manifestations, des débats, des formations, des balades, concerts ou encore des chantiers collectifs.
A Poitiers, il n'y a plus d'eau potable, on a des problèmes de qualité et de quantité d'eau. On a un besoin vital de défendre cette ressource commune. C'est pas les grenades qui vont nous arrêter"
Anne-Morwenn Pastiermilitante anti-bassines
Des manifestations réprimées l'an passé à Sainte-Soline
Les 24 et 26 mars 2023, une manifestation contre la mise en place de la méga-bassine de Sainte-Soline dans les Deux-Sèvres avait réuni 30 000 personnes selon les organisateurs, et 6 000 à 8 000 selon les autorités. En moins de deux heures, plus de 5 000 grenades ont été tirées. D'après Les Soulèvements de la Terre, il y aurait eu au moins 200 blessés parmi les manifestants.
Quatre enquêtes sont à ce jour toujours en cours, visant des « violences par personnes dépositaire de l’autorité publique », ayant entraîné une interruption totale de travail (ITT) supérieure à huit jours, ainsi que des faits de « non-assistance à personne en danger ».
Ces enquêtes concernent quatre des blessés les plus graves. Un manifestant, prénommé Serge, 33 ans, touché à la tête pas une grenade, a passé plusieurs semaines dans le coma, avec son pronostic vital engagé. « Peut-être que Serge n’aurait plus été de ce monde s’il n’avait pas été pris en charge urgemment par les manifestants eux-mêmes », soupire Julien Le Guet.
« Ce sont des menaces très impressionnantes, très fortes, mais par rapport à la crise environnementale, ça ne fait pas le poids en face », assure Anne-Morwenn Pastier, militante anti-bassines. « On préfèrerait que les préfets, au lieu d'envoyer des milliers de gendarmes, prennent leurs dispositions pour aider les agriculteurs à changer de modèle agricole ».
Le collectif a d’ailleurs porté plainte contre Gérald Darmanin le vendredi 31 mai 2024.
D’après le collectif, les trois dernières années de mobilisation ont permis quelques victoires : quatre bassines déjà remplies ont été jugées illégales, 15 projets ont été annulés par le tribunal après avoir été jugés inadaptés au changement climatique, 14 autres bassines se sont vues mises hors d’état de fonctionner et des grilles de chantier continuent de tomber.
Pourtant, le ministre de l’Agriculture a annoncé vouloir construire 100 nouvelles bassines d'ici à la fin de l’année. « Aux abords du Marais Poitevin, malgré les recours juridiques toujours en cours contre les 16 méga-bassines, les chantiers continuent péniblement », indique le collectif.
Défendre un accès à l’eau et une agriculture raisonnée
Face aux pénuries d’eau en été, le collectif Bassines Non Merci ! s’insurge contre les bassines, des ouvrages de stock d’eau alimentées par les nappes phréatiques remplies en hiver. Les militants dénoncent le fait que seule une minorité d’exploitations peut bénéficier de cette eau, alors que le reste du territoire doit s’adapter aux restrictions préfectorales. « Ils ont beau mettre en avant quelques petits éleveurs et maraîchers, c'est principalement pour une approche commerciale de l'agriculture plutôt que pour soutenir qui serve à la population locale », observe Anne-Morwenn Pastier.
Pour le collectif anti-bassines, ces réserves servent essentiellement à irriguer des céréales principalement utilisées pour nourrir des animaux d’élevage industriel, plutôt qu’à la consommation directe de fruits et légumes. Enfin, le collectif dénonce le subventionnement à plus de 70 % de ces ouvrages par l’argent public.
Cet accaparement de l'eau nous inquiète. Beaucoup d'agriculteurs vont partir à la retraite. On a une augmentation de la taille des exploitations, mais de moins en moins de fermes, ce qui alimente la difficulté des jeunes agriculteurs à s'installer.
Anne-Morwenn Pastiermilitante anti-bassines
Une mobilisation à une semaine des JO
« Aujourd’hui, on est capable de mettre beaucoup d’argent pour une opération commerciale comme les JO, pour que la rivière soit baignable. Mais on n’est pas capables de mettre ces moyens pour que des citoyens puissent bénéficier de rivières près de chez eux », dénonce Julien Le Guet, le porte-parole du collectif, outré par les aménagements dédiés à la mise en place des Jeux cet été. « Quand il y a une volonté politique, on est capables. Mais on n’a jamais gain de cause quand il s’agit de biodiversité ou de droits humains », martèle le militant écologiste anti-bassines.
Il y a bien un lien très concret, entre la mobilisation anti-bassines et les Jeux Olympiques. Le collectif alerte sur les aménagements prévus pour les JO d’hiver 2030, pour lesquels la France a déposé sa candidature : « Il y aura la mise en place de neiges artificielles avec des bassines des neiges comme à La Clusaz. Pour les JO 2026 en Italie, il y aura encore de la bassine pour du ski, ce qu’on appelle les sports d’hier », informe Julien Le Guet.
À La Clusaz, en 2022, plusieurs collectifs, dont Extinction Rebellion Annecy, avaient appelé à manifester contre la création d’un bassin artificiel géant, destiné à alimenter les canons à neige des stations.