Le secteur des assurances est confronté à un "manque flagrant de talent". Le sujet ne serait pas de les faire venir en province, mais de disposer d'un bassin d'emplois suffisant pour les couples.
Le monde de l'assurance, confronté comme d'autres à des difficultés de recrutement, essaye de moderniser son image, lâche du lest sur les conditions de travail et mise sur l'alternance pour continuer à recruter environ 17.000 personnes par an.
Le secteur fait face à un "manque flagrant de talents", explique Hasna Fafi, directrice de la communication de l'École supérieure d'assurances (ESA).
Sur 100 employés au sein des compagnies d'assurance au 1er janvier, 11 ne sont plus là au 31 décembre, notamment du fait des départs en retraite, d'où un énorme besoin de remplacements.
À la barre d'une "institution un peu vieillissante", les assureurs "essayent vraiment de donner un coup de jeune" lorsqu'ils communiquent avec leur casquette d'employeur, constate Hélène Frasca, du cabinet Walters People.
"On essaye de décoincer ce modèle" dans un univers "pas forcément sexy", complète Mme Fafi.
La fédération professionnelle France Assureurs a par exemple mis en place le site Internet "j'assure mon futur", nourri de témoignages comme celui d'Elena, jeune apprentie appelée à décrire son quotidien à travers quatre emojis.
Axa a investi le métavers, un réseau d'espaces virtuels interconnectés accessibles grâce à des lunettes de réalité augmentée ou virtuelle, afin de cultiver une image "tech" auprès des informaticiens qu'elle espère embaucher.
À front renversé
Les assureurs (Axa, Allianz...), les mutualistes (Macif, Covéa...) et les bancassureurs (filiales d'assurance des grands groupes bancaires) employaient en France environ 143 000 personnes en 2021, un contingent en hausse régulière, selon les derniers chiffres mis à disposition par la fédération.
Le marché de l'emploi dans le secteur est "sous tension", avec "plus d'offres que de demandes", constate Mme Fafi, une bonne nouvelle pour ses étudiants, une moins bonne pour leurs futurs employeurs.
Avec le "plein emploi" dans ce secteur, "nos étudiants sont forcément en position de force vis-à-vis des entreprises", relève-t-elle.
Un sentiment vérifié par une étude publiée lundi par le cabinet de recrutement Hays, qui explique que "les opportunités sont nombreuses et les choix sont multiples" pour les futurs employés.
"La concurrence est donc rude entre ceux qui recrutent et il faut faire preuve de réactivité pour capter les candidats. Il est également nécessaire de proposer une offre complète : horaires variables, possibilités d'évolution, salaire attractif, etc.", continuent les analystes de Hays.
C'est désormais au recruteur de convaincre le candidat de rejoindre son entreprise, en mettant en avant ses valeurs - surtout quand il est mutualiste -, une organisation plus flexible, sa politique en matière de télétravail...
Alexandre Richard, étudiant en alternance au siège d'Axa, voit surtout "un secteur qui marche énormément". Plus prosaïque, il met en avant la sécurité de l'emploi et les conditions financières, fixes et variables.
Loin de Paris
L'alternance est d'ailleurs une des voies royales pour entrer dans l'assurance.
"Plus de la moitié des embauches se font directement en CDI, dont un bon quart via des contrats d'alternance", souligne le directeur social et diversité de France Assureurs.
La fédération professionnelle n'hésite pas à dépêcher un porte-parole dans les lycées, via l'opérateur de compétences (Opco) Atlas, pour promouvoir ce type de formation.
Autre spécificité, tous les acteurs ne sont pas basés en région parisienne. Les mutuelles Macif et Maif ont par exemple leur siège à Niort, dans les Deux-sèvres, quand Matmut a le sien à Rouen, en Seine-maritime.
Elles misent sur un regain d'intérêt pour des vies plus loin des grandes métropoles après les périodes de confinement imposées par la pandémie de Covid-19, et mettent en avant la qualité de vie et le pouvoir d'achat (immobilier entre autres) offert par leurs régions.
"Le sujet n'est pas de faire venir les gens à Niort", affirme la directrice des ressources humaines de la Maif, Evelyne Llauro-Barrès, "le frein va davantage être le poste de la personne avec qui ils vivent", le bassin d'emploi restant limité.
(AFP)