Portrait : Sébastien Joffre, chasseur de dolmens

Il y a quatre ans, un menhir s'est dressé sur la route de ce Deux-Sévrien. Depuis, il sillonne nos campagnes à la recherche de ces mégalithes méconnus du grand public.

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"Si on ne sait pas qu’ils existent, on passe complètement à côté".  Et dire que c'est par hasard, dans une supérette de La Crèche, que le jeune Niortais est tombé amoureux de ces vieilles pierres. Sur un rayon du magasin l'attendait un livre, "Les Deux-Sèvres préhistoriques". Improbable rencontre entre un éducateur spécialisé dans l'aide sociale à l'enfance et le monde mystérieux du néolithique. La chasse pouvait commencer.

Le voilà donc parti à la recherche du dolmen des Sept-Chemins à Bougon, entre La Mothe-Saint-Héray et Pamproux, au fin fond de la campagne deux-sévrienne. ici, on l'appelle aussi le dolmen de la pierre levée et sa construction daterait de la fin de la première moitié du quatrième millénaire avant Jésus Christ. Une longévité qui impressionne l'apprenti archéologue.

"Il y a de tout dans les gens qui s'y intéressent"

"J’ai commencé par faire des photos avec mon téléphone", se souvient Sébastien, "après, j’ai investi dans un appareil pour faire des clichés de meilleure qualité et, ensuite, j’ai acheté un drone. La vidéo, c’est le format qui me plaît le plus".  En août 2019, il décide donc de partager sa passion avec le plus grand nombre et crée une page Facebook et une chaîne Youtube. Il découvre alors qu'il n'est pas le seul être fasciné par ces monuments d'un autre âge.

"Pour les archéologues, il s’agit avant tout de sites funéraires", explique celui qui se garde bien de toute prétention scientifique, "mais il y a de tout dans les gens qui s’y intéressent. Ceux qui pensent que c’était des lieux de culte, certains pensent que les mégalithes étaient des points d’énergies telluriques avec des vertus médicinales, d’autres que ça remonterait bien avant le néolithique, sans parler de ceux qui invoquent les extra-terrestres… C’est un vrai terrain de conflit !"

"Ar men", la pierre, "hir", longue et "taol", la table ; si l'étymologie des menhirs et des dolmens nous ramène forcément vers la Bretagne, terre de légendes, des mégalithes, on en trouve partout sur la planète. Pas besoin pour autant de partir à la chasse loin de chez vous. 

A dix ans, Jean-Sébastien Pourtaud, lui, avait fait sa première chasse dans la forêt de Saint-Palais, près de La Palmyre où il réside. Une passion qui a emmené ce Charentais Maritime jusqu'à l'île de Pâques. Il est aussi l'auteur de deux inventaires exhaustifs des mégalithes connus dans les deux Charentes. Il en a recensé près de 400 même si seule une centaine d'entre eux reste visible.

"Le but, c'était d'en mettre plein la vue"

"Chez nous, on a la particularité d’avoir deux types de monuments exceptionnels", explique le préhistorien amateur, "d'abord de longs tumulus, ce qui recouvre généralement les dolmens, qui peuvent mesurer jusqu’à 140 mètres de long et 10 mètres de haut comme à Tusson en Charente. Et on a aussi les pierres closes comme à Saint-Laurent de la Prée près de Rochefort. Il s’agit de deux grosses pierres, une creusée en auge recouverte par une deuxième qui sert de couvercle. On en trouve que le long de la vallée de la Boutonne et de la Charente, et pas ailleurs. On n’a pas de témoignages archéologiques mais on a pu prouver qu’ils avaient été taillés avec des outils non métalliques". 

Aujourd'hui encore, Jean-Sébastien Pourtaud continue de chasser, lui aussi, les dolmens et autres vestiges du néolithique, notamment aux côtés du spécialiste Ludovic Soler, archéologue auprès du Conseil départemental de Charente-Maritime. Des fouilles sont ainsi régulièrement programmées sur l'île d'Oléron par exemple.

"Il faut comprendre que le but de ces monuments mégalithiques était d’en mettre la plein la vue, d’impressionner les alentours et de montrer que l’on était les plus forts", poursuit le Royannais qui, lui, ne croit pas aux extra-terrestres, "il fallait donc rassembler beaucoup de bras pour une grande fête et avec des leviers et des rouleaux, ils arrivaient à déplacer des blocs de plusieurs tonnes". 

Malgré tout, ces pierres ancestrales gardent tout leur mystère et c'est sûrement ça qui passionne des Jean-Sébastien Pourtaud et des Sébastien Joffre. "C’était des monuments dans nos sociétés rurales d’il y a cent ans qui étaient connus des populations locales et il y avait autour toujours des légendes ou des malédictions", conclut notre chasseur deux-sévrien. "A Limalonges par exemple, l’histoire dit que des villageois auraient voulu déplacer des pierres du dolmen et que leurs chevaux seraient morts sur place. Ça fait partie du folklore. Finalement, peut-être que beaucoup de ces monuments ont été protégés par ces légendes à travers les âges". La chasse est loin d'être finie.

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