Remettre l'arbre à sa place dans les exploitations agricoles, c'est l'enjeu de l'agroforesterie. Un concept plein de sens, aussi vieux que l'agriculture elle-même, et qui revient enfin à la mode

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C'est la fin d'un long malentendu qui avait chassé les arbres et les haies des exploitations agricoles. Le modèle agro-industriel des années 70 vacillant permet enfin à l'arbre de retrouver une place qu'il n'aurait jamais dû quitter.

Comme un arbre dans les champs

L’ agroforesterie consiste à exploiter des terres agricoles en associant arbres et cultures ou élevages afin d'obtenir de meilleurs résultats. Pas question ici d'activité forestière ou d'arboriculture pure qui relèvent d'autres filières, mais bien de "complanter" des arbres, de l'ordre de 20 à 30 % sur des terres purement agricoles afin de bénéficier de l'association de l'arbre et de l'activité de base.

Culture culturelle

Cette pratique est aussi vieille que l'agriculture. De tout temps on a fait grimper les vignes dans les arbres, planté des légumineuses entre les rangées de fruitiers, ou mené les cochons manger en forêt.

Massacre à la tronçonneuse

Mais le modèle agro-industriel tonitruant et mécanisé des années 70 a fait table rase des arbres, à grand renfort de tracteurs surpuissants. La haie et l'arbre étaient devenu les obstacles à éliminer pour labourer toujours plus efficacement des parcelles remembrées à perte de vue. Dans les années 50, 600 millions d'arbres trônaient sur les terres agricoles françaises. 50 ans plus tard, il n'en restait plus que 200.

Les ravages de la PAC

Pire, le phénomène a été aggravé par la Politique Agricole Commune. Pour éviter le cumul des subventions, il était impossible d'effectuer deux productions différentes sur la même parcelle. Des fruitiers parmi les légumes, c'était une subvention en moins. Les arrachages ont été massifs. Une loi inepte heureusement rectifiée en 2006. Depuis, on tolère la présence de 50 arbres par hectare.

À Bourdeilles, on plante à tout-va

En Dordogne, Paula et Armand, un couple de maraîcher passé au bio en 2010 est en train de réaliser le plus gros chantier d'agroforesterie du département sur son exploitation de Bourdeilles, au Nord-Ouest de la Dordogne. Une opération soutenue par le plan France Relance et la Chambre d'Agriculture du département. Cormiers, tilleuls, chênes, mûrier, 450 arbres sont en cours de repiquage sur la parcelle d'où sortent déjà les premiers plants d'orge, de blé et de maïs. Loin de se concurrencer, les plantations vont se compléter. Dans une dizaine d'années, bien sûr. L'agroforesterie ne porte pas ses fruits immédiatement, mais ils sont durables.

Tout bénef' !

L'arbre va créer un micro-climat, générer de l'ombre pendant l'été où les fortes chaleurs sont de plus en plus fréquentes. Un arbre ou une haie, ce sont aussi des habitats pour les oiseaux au milieu des champs, donc la présence de prédateurs naturels d'insectes ravageurs. Ce sont des feuilles mortes à l'automne, donc de l'humus. C'est un drain naturel qui évite le lessivage et l'érosion des sols. C'est enfin toute une biodiversité retrouvée dans des parcelles qui étaient devenues au fil des ans des supports aseptisés où déverser de l'engrais chimique sur des semences modifiées était devenu incontournable.

On se dit que si on est nombreux à faire ça, on va changer ce qui est en train de se passer. On est tout petits, nous, mais si on est plusieurs milliers, plusieurs millions de petits, et bien ça fera changer les choses !

Paula, agricultrice bio

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