Grenouilles de Grignols : sept ans de polémique pour reboucher une mare

La justice oblige des propriétaires à reboucher leur mare aux grenouilles. Trop bruyantes pour les voisins. Sauf que parmi les batraciens vivent des espèces menacées, protégées par la loi. Mardi 5 novembre, la cour d'appel de Bordeaux s'est penchée sur le dossier qui a déjà fait le tour du monde

Avec Kermit, ce sont peut-être les batraciens les plus célèbres du monde. En tout cas, on a parlé d'elles dans tous les médias nationaux et pas mal d'internationaux. Symboles innocents de l'intolérance urbaine aux bruits ruraux, elles font partie de la cohorte animalière aux côtés du désormais célèbre coq Maurice, ou des cigales du Beausset (83), tous partageant le banc des accusés...

Mais les grenouilles de Grignols font partie des précurseurs. Car la polémique enfle depuis sept ans. Sept ans d'enfer pour Annie et Michel Pécheras, propriétaires de la mare en question. Une jolie mare de 300 mmais trop proche (une dizaine de mètres) du voisinage. 

Troublantes grenouilles


Le voisin, Monsieur Malfione, porte plainte, et perd son premier procès en 2014 devant le tribunal de Périgueux. Puis le gagne en appel deux ans plus tard, le 2 juin 2016. Le jugement sera validé un an plus tard par la Cour de Cassation. Les époux Pécheras sont définitivement condamnés pour "trouble anormal de voisinage" : ils doivent reboucher leur mare. Peine assortie d'une astreinte financière en cas de non-réalisation. 

Y'a de la grenouille, mais pas que...


Tout pourrait s'arrêter là ( et ce serait déjà beaucoup), sauf que... La mare en question a été naturellement peuplée peu à peu par la faune locale. Car c'est bien connu, les grenouilles coassent, et se multiplient. À côté des "banales" grenouilles, elle abrite désormais au moins 4 espèces d’amphibiens protégées par le droit français, voire par une directive européenne : l’alyte accoucheur, le triton palmé, le crapaud commun et la rainette méridionale. Une présence révélée par les spécialistes de l’association girondine Cistude Nature.

Condamnés par la justice à réaliser une opération illégale


Si les époux Pécheras bouchaient la mare, ils seraient en infraction avec le code de l’environnement Natura 2000. Ils encoureraient une lourde amende, et ce d'autant plus qu'ils le feraient en connaissance de cause. Autre solution, déplacer les batraciens. Mais ils sont intouchables, personne n’a le droit de s’accaparer des espèces sauvages qui jouissent de la liberté de se déplacer. Pour les transporter il faudrait une autorisation de déplacement très rarement accordée. 

La SEPANSO à la rescousse

La Sepanso de Dordogne, Fédération des Sociétés pour l'Étude, la Protection et l'Aménagement de la Nature dans le Sud-Ouest s'est saisie du dossier. Elle a fait une "demande par tierce opposition" lui permettant de déplacer les grenouilles. En clair, l'association se pose comme un tiers pouvant apporter une solution en respectant la décision de justice, la condamnation étant désormais définitive. Elle compte pour cela s'appuyer sur l'expertise de l'association Cistude Nature spécialisée dans les zones humides afin de déplacer les espèces menacées plus loin. 

Les Pécheras en ont "mare"...


Pour les époux Pécheras, retraités lassés par tant d'années de polémique et éprouvés financièrement par les frais de justice, il serait temps que cela cesse. C'est peut-être une question de jours, la cour d'Appel de Bordeaux ne devrait pas statuer de suite, mais se donner le temps de la réflexion... 
 
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