Fête des mères : une vieille tradition pas du tout française

Dans la boite mail de France 3 Poitou-Charentes, Chirine, lycéenne de La Rochelle, voulait nous faire partager un poème dédié à sa maman. L'occasion pour nous aussi de célébrer toutes les mères de France et de rappeler les origines de cette journée particulière. 

Elle a dix-sept ans et étudie au lycée Fénelon de La Rochelle. Chirine, visiblement, est très proche de sa mère, infirmière en Ehpad. Cette dernière est peut-être d'ailleurs au travail en ce jour de fête. Alors, dans un élan de générosité, Chirine voulait partager ce poème qu'elle dédie à toutes les mamans qui élèvent seules leurs enfants. Evidemment, nous ne pouvions que nous associer à ce touchant hommage.

"Je te dois la vie

Lorsque je pense à toi je souris

J’aimerai effacer ces mots qui t’ont blessée,

Tu défies les jours passés

Demeurant dans un éternel

Tu es sans doute la plus belle

Tu recherches le bonheur pour tes fleurs

Dans tes bras tu éteins leurs pleurs

Il n’y aura jamais de mot assez grand

Pour te dire je t’aime Maman"

Chirine nous donne aussi l'occasion de nous interroger sur l'origine de cette journée particulière. Pour tous les curieux, on ne peut que vous conseiller de lire un article de la Bibliothèque Nationale de France qui nous dit tout sur cette célébration nationale. Ses nombreux détracteurs dénoncent, non sans raison, une vaste opération consumériste. Il y a aussi ceux qui restent persuadés que c'est la France de Vichy qui aurait instauré ce rendez-vous pour les besoins de sa propagande. Un petit point historique s'impose.

La BNF nous rappelle que, déjà dans l'antiquité, les grecs célèbraient les déesses-mères Gaïa et Rhéa. Plus tard, au XVème siècle, ce sont les chrétiens du Royaume-Uni et d'Irlande qui inventent le "Mothering Sunday" ou dimanche de la maternité. Mais il faudra attendre le 9 mai 1914 pour que le président américain Wilson instaure le "Mother's day", "une fête qui sera l'expression publique de notre amour et de notre respect pour les mères de notre pays". Il s'agit là du résultat du combat personnel d'une certaine Anna Jarvis de Philadelphie, inconsolable suite au décès de sa maman en 1906.

En France, dès 1896, Jacques Bertillon, statisticien et démographe, initie "l’Alliance nationale pour l’accroissement de la population française". Pendant longtemps, face à la baisse de la natalité dans le pays, on tente d'exalter la valeur famille. Il y aura d'abord "la fête des enfants", puis "la journée des mères de familles nombreuses". Mais il faudra attendre, la fin de la première guerre mondiale, pour que le "mother's day", arrivé dans les baluchons des soldats américains, débarque vraiment dans l'Hexagone.

D'abord à Lyon, puis dans d'autres villes du pays, on consacre une journée conçue comme "une halte de paix et d'amour, une manifestation de la pérennité française ( L'Oeuvre, 31 mai 1926). Le 27 mai 1935, dans Le Petit Journal, on apprend que "la fête des mères a été célébrée dans toutes les villes françaises" et qu'à La Rochelle "le maire a remis la médaille d'honneur à huit mères de familles nombreuses". La tradition est désormais ancrée dans le pays.

Alors oui, le maréchal Pétain ne pouvait que récupérer la fête des mères pour son projet familialiste. Oui, après la seconde guerre mondiale, les marchands d'électroménager et les fleuristes ont, eux aussi, profité de l'aubaine pour accroître leur chiffre d'affaire. Mais tant qu'il y aura des Chirine à La Rochelle qui nous demande de publier un poème en hommage à sa maman, nous aussi, aujourd'hui comme demain, nous souhaiterons une bonne fête à toutes les mères.