Le plus grand centre naturiste d’Europe en Gironde a-t-il bénéficié d'exonérations d'impôts à hauteur de 9 millions d’euros de la part de la mairie de la commune médocaine ? C'est ce que pense l'actuelle maire de Grayan après la publication d'un rapport de la Cour des comptes. Elle a décidé de porter plainte, le parquet de Bordeaux a ouvert une enquête.
C'est une commune tranquille entre la forêt et l'océan. Une station balnéaire champêtre entre un bourg, qui s'est vidé de ses commerces, et un centre naturiste qui grossit en population comme en activité, depuis 1975, faisant passer la commune de 1500 à 25 000 habitants en saison.
La commune est aussi connue pour accueillir Euronat, le plus grand centre de vacances naturiste d'Europe, au cœur, aujourd'hui, d'une polémique.
Florence Legrand, la nouvelle maire de la commune élue en 2020, et sa majorité, décident de porter plainte pour "concussion", comme le rapportent nos confrères du Parisien. Une accusation grave puisqu'on parle de malversations dans l'exercice d'une fonction publique (Article 432-10 du Code pénal). En l’occurrence, ici, les précédents élus auraient "outrepassé (leurs) fonctions en accordant indûment une exonération de droits, contributions, impôts ou taxes publics" au fameux centre naturiste.
C'est suite à un rapport de la cour des comptes, en décembre 2022 que l'histoire commence. La chambre régionale pointe "de nombreuses carences dans la gestion financière de la commune, qu’il s’agisse du camping et des gîtes municipaux ou des relations contractuelles avec le grand centre naturiste Euronat", estimant que "la négligence de la commune l’a privée du juste montant de redevance, l’assiette de bungalows et logements de celle-ci ne correspondant manifestement pas à l’existant".
Ces avantages présumés auraient été accordés au centre naturiste par les deux équipes municipales précédentes.
Regardez le reportage de Tristan Vartanian et Vincent Piffeteau.
Ils ont "bradé la richesse de la commune"
Aujourd'hui, la maire se désole de la perte d'activité du centre-bourg déserté par les commerces. Il n'en reste plus que deux, contre sept il y a dix ans. Restaurants, café des sports, quincaillerie, coiffeur ont disparu.
"On est quand même une station balnéaire avec 1500 habitants l'hiver contre 25 000 l'été. On ne comprend pas que ce soit possible qu'une station balnéaire n'ait pas réussi à enrayer le déclin du centre-ville". Alors qu'à Euronat, six kilomètres plus loin, en bord de l'océan, c'est un petit bourg dans le bourg avec 25 commerces. Florence Legrand accuse l'ancienne municipalité "d'avoir bradé richesse de la commune, au bénéfice d'une société privée".
De leur côté, l'ancien maire et la société Euronat contestent ces accusations comme ces chiffres et portent plainte, à leur tour, pour diffamation. "Le rapport de la Cour régionale des comptes évoque un différentiel de 45 000 euros par an, avance Jean-Michel Lorefice, le directeur d'Euronat. On est donc loin des 900 000 euros dénoncés par la maire de Grayan". L'ancien maire de la commune n'a pas donné suite aux demandes d'interview de France 3 Aquitaine.
Le parquet de Bordeaux a ouvert une enquête préliminaire. Si le délit est avéré, la peine encourue est de cinq ans de prison et 500 000 euros d’amende.