"Quelqu'un se fait passer pour moi dans le monde du rugby". L'incroyable histoire d'un joueur d'Arcachon

Depuis près d'un an, Lilian Belio, arrière au RC Bassin d'Arcachon, est victime d'une usurpation d'identité. Une personne se faisant passer pour lui tente de se faire recruter par des clubs de rugby de toute la France. La tromperie pénalise à la fois le joueur girondin et les clubs dupés.

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Au début, il pensait à une mauvaise blague. Depuis, Lilian Belio, étudiant en école d'ingénieur de 22 ans et licencié au Rugby club Bassin d'Arcachon depuis trois ans, où il évolue au poste d'arrière, est passé par tous les stades. Incompréhension, peur, agacement, lassitude et franche colère.
Le 26 octobre 2022, le jeune homme, originaire du Béarn, est alerté que quelqu'un se fait passer pour lui, et cherche à se faire recruter auprès d'un club de rugby, à Marseille. "Il leur a dit être en alternance chez Pernod Ricard et a demandé au club une liste des appartements disponibles à la location", explique Lilian. Prévenu, l'étudiant contacte le club marseillais, leur signifie qu'il n'a jamais songé à quitter le Bassin et pense en avoir terminé avec ce qu'il considère encore comme une mauvaise plaisanterie. 
Mais, au fil des mois, la mésaventure se renouvelle, avec un autre club des Bouches-du-Rhône, puis à l'US Tours, dans les Landes, notamment auprès de l'US Tyrosse, ou encore dans le Finistère. À chaque fois, le même scénario : "il entre en contact avec le club, s'entretient avec eux par téléphone pendant parfois 20 minutes, en se faisant passer pour moi". 

Il se montre assez précis sur des éléments particuliers : là d'où je viens, les clubs dans lesquels j'ai évolué. Il utilise tous ces éléments pour appuyer son discours.

Lilian Belio, arrière au RC Bassin d'Arcachon

à la rédaction web de France 3 Aquitaine

"À aucun moment je n'ai senti l'entourloupe"

Les demandes n'aboutissent jamais, l'usurpateur n'étant jamais en mesure de fournir les papiers d'identité nécessaires à la finalisation de ses requêtes. Directeur sportif du Plouzané AC Rugby, dans le Finistère, Mickael Chenais confirme avoir été contacté fin avril, par mail, par un jeune homme se présentant comme Lilian Belio. "Il nous a expliqué qu'il venait dans la région pour ses études et qu'il cherchait un club de rugby sur Brest. Il nous a demandé des informations et le contact s'est bien passé. On était heureux d'accueillir un nouveau joueur", témoigne l'entraîneur breton. 

Le vrai Lilian Belio joue en nationale 2, ce qui équivaut à la 4e division. Aujourd'hui, le Plouzané AC évolue en 6e division, donc ça aurait forcément été une vraie plus-value pour le club.

Mickaël Chenais, directeur sportif du Plouzané AC Rugby

à la rédaction web de France 3 Aquitaine

Les échanges se poursuivent par téléphone, pendant deux mois. Mais, lorsqu'un entretien en visioconférence est prévu entre le club et ce qu'il pense être sa future recrue, l'interlocuteur ne se présente pas. Il rappelle ensuite, invente une excuse et poursuit les échanges au téléphone. "Il a tenu un discours cohérent pendant 15-20 minutes, sur l'histoire et le parcours détaillé du vrai Lilian Belio, nous a parlé de Morlaàs et du Béarn, son pays natal, se souvient Mickaël Chenais. À aucun moment, je n'ai senti l'entourloupe".
Début juillet, le club breton cherche à recontacter le jeune homme pour prendre des nouvelles de son installation. Son téléphone étant désactivé, le directeur sportif passe par les réseaux sociaux, et tombe cette fois-ci, sur le vrai Lilian Belio. "Il nous a raconté la supercherie et expliqué qu'on n'était pas les premiers", témoigne Mickaël Chenais qui assure n'avoir jamais entendu parler d'une telle usurpation auparavant dans le monde du rugby.   

Conséquences pour le club

Lassé de se justifier auprès des clubs dupés, mais aussi de son club d'origine, Lilian Belio choisit de riposter. "Quand il a commencé à agir auprès de clubs en Aquitaine, là où j'ai grandi et évolué, je me suis dit qu'il fallait que ça s'arrête, parce que je sais très bien qu'il en faut peu pour salir une réputation", explique le jeune arrière. Il dépose plainte auprès du commissariat d'Arcachon pour usurpation d'identité, alerte le RC Bassin d'Arcachon. "Ça s'est calmé quelque temps, et puis ça a repris". Lilian Belio décide lors de raconter son histoire, sur LinkedIn, tout d'abord, puis auprès de France 3 Aquitaine. 
"Je ne le fais pas que pour moi, je ne suis sans doute pas la seule victime d'usurpation d'identité dans le monde du sport, note le joueur. Certains clubs ne disposent que d'un budget limité, et ils ont autre chose à faire, surtout en période de recrutement, que de s'occuper d'un gars qui se fait passer pour quelqu'un d'autres". Du côté de Plouzané AC, les dégâts ont été contenus. "On a effectivement arrêté certains contacts auprès de joueurs qui évoluaient au même poste que lui. Mais, heureusement, on ne comptait pas sur lui, on n'est pas allé le chercher et on n'a pas investi sur lui", note Mickael Chenais. 

Beaucoup d'hypothèses, aucune piste

Aucun élément ne permet aujourd'hui à Lilian de savoir qui se cache derrière cet usurpateur. Une chose est sûre : il s'agit de quelqu'un qui connaît bien le rugby et a longuement étudié le parcours du joueur d'Arcachon. La personne change régulièrement de numéro de téléphone et est, pour l'instant, difficile à identifier. Lilian Belio ne cache pas son incompréhension :  "Je pense que c'est quelqu'un de complètement tordu. Je suis tellement surpris que quelqu'un s'acharne comme ça depuis un an, s'embête autant à mentir, à monter des scénarios et y consacre tout ce temps." 

Est-ce une personne que j'ai offensée, ou à qui je n'ai pas fait attention et qui décide de se venger ? J'ai plein d'hypothèses.

Lilian Belio, arrière au RC Bassin d'Arcachon

à la rédaction web de France 3 Aquitaine

"Je sais juste que ça peut entacher ma réputation dans la vie personnelle et dans le monde du rugby. Je pense être assez droit dans mes bottes, et si on me fait passer pour un menteur dans mon sport, qui est l'activité qui m'est la plus chère, c'est un énorme problème", regrette-t-il. Pas question pour autant pour cet étudiant de se laisser abattre. En attendant les suites des plaintes déposées, il vient de s'engager pour la prochaine saison en auprès du RC Bassin d'Arcachon, en semi-professionnel.

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