Alors qu'ils devaient être vendus pour de la promotion immobilière, des jardins partagés de Bordeaux vont pouvoir être conservés, grâce à la mairie qui a fait valoir son droit de préemption. Les riverains se réjouissent de ne pas voir apparaître "des parkings, au lieu des arbres et des potagers".
C'est le premier exemple concret d'un nouvel outil mis en place par la ville de Bordeaux. Depuis janvier 2023, la ville a mis en place une "cellule de veille foncière" qui se réunit tous les mois. La mairie a ainsi pu utiliser son droit de préemption sur un terrain situé au 9 rue Faidherbe, proche de la gare Saint-Jean, où se situaient des jardins partagés installés depuis quatorze ans. Un dispositif qui devrait être reconduit également pour créer des logements sociaux, mais aussi des équipements et services pour les habitants.
Un outil pour rendre la ville accessible
Depuis le début de l'année 2023, la mairie se lance dans cette grande veille qui a trois objectifs : construire du logement social, créer des nouveaux équipements pour les habitants et préserver des îlots de nature en ville. "On regarde tous les terrains à vendre, dont la parcelle est supérieure à 500 m². À l'exception du centre historique et des zones économiques, car il y a des caractéristiques particulières", explique Stéphane Pfeiffer, adjoint à l'urbanisme et au logement de la ville de Bordeaux.
Ce terrain cochait plusieurs cases : nous pouvons préserver de la nature en ville. On projette aussi d'y installer un lieu d'accueil de la petite enfance, car le quartier manque d'équipement à ce niveau-là.
Stéphane Pfeiffer, adjoint à l'urbanisme et au logement à la mairie de Bordeauxà rédaction web France 3 Aquitaine
Au 9 rue Faidherbe, l'association Des jardins des voisins entretient un jardin partagé depuis quatorze ans. Problème : avec un changement de propriétaire, la parcelle devait être vendue pour un projet immobilier. Peu sensible à la nature en ville, le propriétaire n'était pas enclin à revendre à certains membres de l'association qui lui avaient fait une proposition, mais plutôt à un promoteur immobilier qui lui "apportait plus de garanties", comme il le précisait auprès de Sud Ouest.
C'est alors que la mairie de Bordeaux est intervenue. "Ce terrain cochait plusieurs cases, souligne Stéphane Pfeiffer. Nous ne pourrons pas y construire de logements sociaux, mais nous pouvons préserver de la nature en ville. On projette aussi d'y installer un lieu d'accueil de la petite enfance, car le quartier manque d'équipement à ce niveau-là." En plus de cela, la mairie réfléchit à en faire un "lieu de quartier", avec des locaux pour des artisans et des acteurs sociaux, tout en gardant les deux locataires qui vivent actuellement au 9 rue Faidherbe.
Des jardins et un lieu d'accueil de petite enfance
"Ce ne sont que des grandes orientations, tempère l'adjoint à l'urbanisme et au logement de la ville de Bordeaux. Nous avons dû monter un projet rapidement pour exercer le droit de préemption. Ensuite, nous aurons une marge de manœuvre, quand nous serons officiellement propriétaires. Nous souhaitons affiner le projet avec les gens du quartier." Car pour le moment, c'est la métropole qui peut vraiment utiliser ce droit et à qui appartient le terrain. La ville compte ensuite le racheter, mais doit avant cela le soumettre au vote du conseil municipal, en juillet prochain.
À l'association, on se réjouit que le projet soit coconstruit avec les habitants. "On est très satisfaits, car l'association et le lieu étaient en danger, réagit Cristina Narciso, membre de l'association Des jardins des voisins. S'il n'y avait pas eu cette préemption, il y aurait eu des parkings au lieu des arbres et des potagers."
L'acquisition de ce terrain coûte 620 000 euros. Si deux parcelles sont à l'étude pour d'autres préemptions dans le quartier de Caudéran, pour y construire du logement social cette fois, Pierre Hurmic, le maire, a prévenu : "On ne pourra pas faire cela tous les jours".
"Mais lorsque c'est vraiment opportun, nous le ferons. Il y a aussi possibilité d'avoir des lieux avec un modèle économique et des acteurs qui paient un loyer", déclare Stéphane Pfeiffer. Tout en précisant que lorsqu'il s'agit de logements sociaux, c'est le bailleur qui rachète à la mairie, donc cela ne coûte pas d'argent.
En attendant d'autres préemptions à Bordeaux et notamment visant une meilleure mixité sociale au sein de la ville, la mairie se félicite du premier succès de son nouvel outil. À présent, le projet du 9 rue Faidherbe, va mettre encore quelques années pour aboutir à sa forme finale. Mais l'essentiel est assuré : la nature en ville est préservée.