A Hossegor, Guillaume Grand prépare la sortie de son 3e album et d'un premier roman

Dix ans après le succès de Toi et Moi, Guillaume Grand sort son troisième album. Voix rocailleuse, guitare accoustique. A 37 ans, l'auteur-compositeur landais, passionné de surf, reste fidèle à son style chanson française-folk. Cet artiste sensible interroge la complexité de l'humain. Rencontre. 

C'est dans les Landes où il vit depuis 17 ans que Guillaume Grand a écrit son troisième album. Après six ans de silence, ses fans ont pu découvrir quelques morceaux sur le net. L'auteur compositeur landais y parle d'amour, des femmes, du suicide bref de l'Humain et de sa complexité. "La politique, la guerre ne m’intéressent pas. Je ne m’embarque pas dans des sujets que je ne maitrise pas" résume-t-il. 

"J’aime trop les gens", le single sorti en mai dernier donne le la de sa relation empathique mais douloureuse à l'Autre.  "Et même si j'ai la haine, j'voudrais vous embrasser, Vous serrer fort, vous faire rêver, Pour tous les autres, qui n'sont pas nés, Nous, on est là, autant s'aimer" chante-t-il. 

"j'aime trop fort les gens" explicite Guillaume Grand. "Je vais donner à tout le monde. Même avec quelqu’un que je connais pas, je suis dans l'empathie. Forcément, tu es toujours déçu". Il porte le poids d'une sensibilité exacerbée et  absorbe les émotions des autres à s'en tordre le ventre . "Je somatise beaucoup,  j’ai du mal à me protéger. Tout m'agresse. Les couples m’agressent, la vue d'un clochard m'agresse, la vie m’agresse. Et plus on vieillit plus, on en prend plein la gueule". 

Pourtant Guillaume Grand rassure.  "Je ne suis pas dépressif.  Je suis lucide sur ce qui me fait du bien ou du mal. Je ne suis ni très heureux ni très très triste. Je suis solide". Il répète détester le mensonge et, plus encore, les gens qui se mentent à eux-mêmes. Il fuit aujourd'hui la foule et a appris à vivre seul. Mais il veut profiter de la vie qui passe trop vite.  "J’ai eu des idées noires mais je veux aller de l’avant"

Et dans son dernier titre, "je veux entendre le vent", il imagine redevenir un enfant, bouillonnant de vie et d'innocence : "Faut qu'on s’aime y'a plus le temps, Bien plus fort bien plus grand, Je veux frémir, A l'envers moi dedans, Je veux des crampes dans le ventre, Je veux rougir" chante-t-il. "Il y a urgence à arrêter de perdre du temps. Oui, la vie est compliquée il faut qu’on s’aime malgré tout. Les gens oublient qu’ils vont crever que ca va vite passer. On ne va pas à l’essentiel." résume-t-il. 

Né à Bergerac, Guillaume Grand a beaucoup voyagé en raison de la profession de son père, banquier. Il déménage aux Antilles à l'adolescence. De ce séjour en Guadeloupe, il ne garde pas d'influence musicale majeure sinon "un rythme chaloupé, sautillant et la bonne humeur qui va avec le soleil". Fâché avec l’école, mais pas avec le sport, il suit un cursus de sports-études foot puis décroche le brevet d'Etat pour enseigner le surf qui pratique depuis toujours. Il trouve un emploi dans les Landes. Après les cours le soir, il se produit en concert : 

C'était des concerts de reprises. Ca marchait bien. Je me suis dire que, comme j’adorais faire ça, pourquoi ne pas essayer d’écrire mes propres chansons. 

Une rencontre avec la musique sur le tard. Guillaume Grand a la vingtaine. Et tout de suite la consécration. En 2010, un titre le propulse sur le devant de la scène française.  “Toi et Moi” totalise plus de 45 millions de vue sur Youtube. 

Son premier album L'amour est laid pose les notes de son style. Des textes sombres et poétiques teintés d'une lueur d'espoir. Guillaume Grand se revendique de Ferré, et de Brel, son maître à penser "pour ses paroles, sa musique, les arrangements de fou pour l'époque, sa façon de voir les choses"..." "Il est assez lucide et triste,  assez proche de la réalité et en même temps capable de trouver le bonheur. Dans le laid, il trouve le beau." 

Du succès de son premier album, il garde un souvenir mitigé : 

Le succès, c’est cool. J'ai pensé, c’est bon j’arrive à vivre de la musique ! C’est devenu mon métier. C'est ce que je voulais. Tu peux te dire, c'est génial, tout le monde m’aime mais le problème, c'est la jalousie, ce que les gens racontent sur ta famille, sur toi. Les gens ne se rendent pas compte de l'impact que peuvent avoir leurs paroles. Tu es perdu. Ce n'est pas un milieu que tu connais...

Après une longue tournée, la pression d'un premier succès, l'écriture du deuxième album est plus compliquée reconnaît-il.  "il paraît"  ne rencontre pas son public et Guillaume Grand se retrouve sans contrat. 

"Tu voudrais que ça dure et puis quatre ans après cette la chute. Tu le vis comme un échec professionnel. Je ne suis pas du genre à avoir le melon. Je savais que ca pouvait arriver. Tu n'es pas seul maître à bord de ton navire" analyse-t-il

Mais il veut garder le cap et s'attelle à son troisième album. Il lui faudra six ans. Lui qui aime les mots qui ne trichent pas, entame l'écriture d'un roman en parallèle. Les éditions Plon, séduites par ses textes, lui en ont fait la proposition. "J’ai cru que c’était une blague. Ca fait longtemps que je veux écrire un livre. J’ai eu de la chance" s'enthousiasme-t-il. 

"Ca parle de la vie. Comme mes chansons. J'imagine que je rencontre la vie, une femme avec laquelle je pars"confie-t-il. Mais l'exercice est nouveau, radicalement diffèrent  et Guillaume Grand avoue avoir beaucoup douté. 

"Dans une chanson, il faut une image, un sentiment en peu de mots. Le roman, c’est l‘inverse. Il faut développer".

Un roman sur le point de sortir même s'il y a encore du travail s'amuse Guillaume Grand. Et quand on demande à celui qui profiter de la vie tant qu'elle est là comment il se voit dans cinq ans, il plaisante : 

"Encore là j’espère. On aura repris les concerts, le troisième album aura marché. Pas au point de devenir riche mais de continuer à chanter" 

Et dans vingt ans ? Nouvel éclat de rire. 

j'aurai 57 ans. J’aurai fini mon cinquième livre. Je serai tranquillou avec mon chien aux Antilles en train de faire des bouquins et faire des tournées en France. 

De quoi pimenter sa vie. Exalté, il confesse s'ennuyer. "J’essaie de combler mon envie. J’ai toujours besoin de quelque chose de fort. Ca peut être démesuré."