Le Poing Levé, une organisation étudiante était convoquée ce mercredi 25 septembre par la direction de l'Université de Bordeaux, pour plusieurs infractions au règlement intérieur. Ses représentants dénoncent une volonté de censure politique, l'université s'en défend.
Ils dénoncent une "grosse censure" de la part de la faculté. Ce mercredi 25 septembre, l'organisation étudiante Le Poing levé, qui se décrit comme un collectif anticapitaliste et révolutionnaire, était convoquée par la direction de l'université de Bordeaux pour plusieurs infractions au règlement intérieur.
En cause notamment, des interventions politiques de l'association qui ne respecteraient pas le règlement, comme des prises de parole en amphithéâtre lors de la semaine de rentrée, ou des tables installées avec des tracts sur le campus.
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"Choix politique"
L'association avait appelé ce mercredi 25 septembre, aux alentours de midi, à un rassemblement, suivi par quelques dizaines de personnes et autres associations étudiantes, comme l'UNEF ou l'Union étudiante. Ces associations faisaient partie des 17 signataires d'un communiqué de presse unitaire, dénonçant "la répression à l'université de Bordeaux".
Cette mobilisation se voulait une réponse à la convocation de l'Université de Bordeaux, qui ne passe pas pour le Poing levé. "On pense que ce n'est pas simplement pour protéger la vie universitaire, mais que c'est un réel choix politique de la part de la direction de réprimer les voix des étudiants, appuie Fekam M'bow, militante et élue au conseil d'administration de la faculté. On trouve ça scandaleux que l'université refuse que les étudiants puissent discuter politique entre eux."
Lors d'une table qu'on a tenue, un responsable de la sécurité est même venu nous menacer de nous dégager physiquement. Ces réactions sont systématiques de la part de la direction, à chaque fois qu'on essaye de parler de politique.
Fekam M'bowMilitante du Poing levé et élue au conseil d'administration de l'université de Bordeaux
Dans les faits, le règlement intérieur de l'université, accessible sur leur site, précise que "les usagers ont le droit d’exprimer leurs convictions religieuses, politiques ou autres au sein de l’université de Bordeaux dans les limites du respect de la neutralité du service public, de son bon fonctionnement et des impératifs d'ordre public". Les étudiants ont donc le droit de parler de politique sur le campus, mais les limites de cette liberté d'expression semblent floues.
Une liberté d'expression limitée ?
"Oui, comme tous les textes de loi qui existent aujourd'hui, y compris la Constitution française, il y a toujours un peu de flou qui nécessite une interprétation, concède Dean Lewis, le président de l'université de Bordeaux. Mais ce règlement est en conformité avec le Code de l'éducation, il y a une liberté d'expression, d'opinion, mais avec des limites."
Pour le président, la convocation du Poing levé - qui relèverait plus d'une "demande de rendez-vous" que d'une vraie convocation - tient au fait que l'association "a des difficultés à s'approprier les éléments du règlement intérieur." "On les reçoit pour leur expliquer les règles exactes, les droits et les obligations en termes de liberté d'expression et de réunion sur les campus", détaille le président.
Pour l'organisation étudiante, cette convocation et ce rappel au règlement intérieur sont d'autant plus injustes que l'université les empêche d'agir dans le cadre prévu à cet effet. "On a fait des demandes à la direction pour investir le village associatif ou pour participer aux interventions en amphithéâtre, on nous les a refusées, dénonce Fekam M'bow. On fait partie des associations élues pendant les élections étudiantes, avec 11 % des voix, mais on n'a pas eu de domiciliation immédiate."
Question de domiciliation
Les associations peuvent en effet demander leur domiciliation au sein de l'université, qui entraîne de fait l'attribution de certaines ressources, notamment l'accès à un local et le droit à réserver des salles pour mener des actions. 150 associations en bénéficient, mais pas le Poing levé, alors qu'il la demande depuis six ans.
Pour justifier son refus, la direction conteste toute "décision politique" et évoque cette année un dossier reçu hors délai. Un retard dû, selon les militants, à des demandes de dernière minute pour des documents que l'administration possédait déjà.
Je pense qu'il y a eu un certain nombre de revendications, de mobilisations qui ont eu lieu par le passé et qui effraient la direction, alors ils essayent de limiter l'organisation des étudiants dans ce sens-là.
Antonin CheronDoctorant, militant au Poing levé
L'UNEF (Union nationale des étudiants de France) est, elle aussi, écartée de cette domiciliation à l'Université de Bordeaux, ce qui les empêche de mener à bien certaines actions. "Quand on avait proposé l'année dernière de tenir notre distribution alimentaire sur le campus Montesquieu, on nous avait dit non, par rapport au règlement. En fait, ils réservent ça aux associations qui sont domiciliées, mais en même temps, ils empêchent la domiciliation pour les syndicats et les organisations politiques", déplore Marion Lafon, présidente de l'UNEF Bordeaux.
Interrogé à ce sujet, le président botte en touche : "Je n'ai pas tous les éléments. La Banque alimentaire est déjà présente sur le campus. Si des associations étudiantes nous aident, on va favoriser ces actions, mais il faut que ça se fasse dans un cadre."
Un cadre perçu comme des "mesures antidémocratiques et autoritaires contre l'ensemble des étudiants et leur liberté d'expression" par le Poing levé, qui continuera de se mobiliser sur le campus de l'université de Bordeaux.