Tous les centres de réadaptation de la région se préparent à recevoir un afflux de patients dans les semaines à venir. Ceux qui auront passé plus de trois semaines en réanimation. Sortis d'affaire d'un côté, ils devront réapprendre à leur corps à fonctionner de façon autonome. Pas une mince affaire.
"Ce sera un travail de longue haleine" prévient Claire Delleci.La chef de service de médecine physique et de réadaptation du CHU de Bordeaux s'attend à recevoir un afflux de patients d'ici trois semaines.
"Après leur sortie de réanimation, la question se posera de les renvoyer chez eux ou non. Pour ceux qui sont restés entre trois et six voire huit semaines sous assistance respiratoire, la rééducation sera nécessaire" affirme t-elle.
C'est un moment très éprouvant comme nous le montre ce reportage réalisé au coeur du service de réanimation de Guéret dans la Creuse.
Réapprendre à son corps à fonctionner de façon autonome
En réanimation, le patient est immobile, ses membres ne sont pas sollicités, il a des tuyaux dans la bouche, dans le nez, il est perfusé...l'ensemble du corps est mis à rude épreuve.
Sans oublier les nombreux médicaments et sédatifs utilisés dont certains peuvent provoquer des effets secondaires.
"Il y a de nombreuses conséquences physiologiques et psychologiques" confirme Claire Delleci, "le relâchement musculaire, les atteintes des nerfs, les effets sur certains organes. Cela peut entraîner des difficultés motrices et des séquelles respiratoires".
Les patients, une fois sortis de réanimation, devront être pris en charge par différents spécialistes : kinésithérapeutes, ergothérapeutes, orthophonistes, neurologues, pneumologues...et même psychologues.
"Il faut réapprendre à à manger, à parler, à respirer, à se déplacer, à porter, à faire des efforts physiques" explique la chef de service. "Cela peut prendre plusieurs mois".
Georges Betti, sorti de réanimation le 31 mars dernier à l'hôpital d'Ajaccio témoigne :
"je pense qu'il me faudra 1 ou 2 mois [pour récupérer]. Il y a trop de trucs à faire dans mon cas. J'étais dans le coma. Je ne sais pas marcher, je ne sais pas tenir l’équilibre, il me faudra encore beaucoup de temps"
"Et puis la réanimation peut être vécue comme un évènement traumatique" ajoute Claire Delleci "certains patients ne se rappellent de rien, d'autres ont eu peur de mourir, un suivi psychologique est nécessaire".
Les services s'organisent
Un protocole de prise en charge des patients post covid-19 est en cours de développement dans les centres de rééducation de la région.
"Nous nous basons sur les retours d'expérience de nos collègues de l'est de la France et de la région parisienne" assure Claire Delleci. "La filière est en train de se structurer, on a la chance ici de n'en être qu'au début".
Ainsi, certaines activités et consultations sont annulées, reportées ou prises en charge en téléconsultation, les séjours non urgents sont déprogrammés et les services sont réaménagés afin de respecter les mesures de protection.
Claire Delleci n'est pas inquète quand à la capacité d'accueil des centres de réadaptation en Nouvelle-Aquitaine, "ils sont très nombreux, nous ne serons pas en carence de lit".