Aux assises de la Gironde, l'incompréhensible infanticide d'une mère fusionnelle

Geste accidentel survenu en "état de folie" ? Ou volonté homicidaire née de la rumination d'abus sexuels passés ? La cour d'assises de la Gironde tente de comprendre cette semaine comment une mère "aimante", "fusionnelle avec sa fille" l'a tuée d'un tir de carabine à bout portant en 2015.

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    L'infanticide avait secoué le petit village de Barsac, en plein vignoble sauternais, un matin de mars 2015. "Hystérique", "incohérente", une femme de 32 ans y était maîtrisée par les gendarmes, courant dans le vignoble après avoir tiré avec une carabine sur un automobiliste, criant "Tout le monde est contre moi !" "Il y a des violeurs partout".

    A côté de sa voiture, arrêtée en panne d'essence sur le bas-côté, gisait sa fille Manon, 9 ans, mortellement atteinte d'un coup à la poitrine, tiré à moins d'un mètre. 
    Aurélie Coulon, incarcérée après avoir fait des séjours --notamment peu après les faits--, en soins psychiatriques, expliquera à l'instruction que la matinée tragique avait été déclenchée par des "traces de sang" découvertes sur la culotte de sa fille, qui passait un week-end sur deux chez son père. Elle se persuada que son enfant avait été abusée.

    La jeune mère, abondante consommatrice de cannabis --dont la veille au soir du drame--, aurait alors été renvoyée à des abus sexuels de sa propre enfance, viol par un cousin à l'adolescence, mais surtout fellations imposées par son père à partir de 7-8 ans. Accusations que le père dément formellement, encore mardi à l'audience.

"Je crois que le témoignage de sa mère est essentiel", explique Maître Béatrice Ceccaldi avocate d'Aurélie Coulon. "On voit à quel point on peut être un parent imparfait ou parfait ou tendant à la perfection. Aurélie n'avait plus de mots, elle regardait sa mère avec une certaine distance et un certain désespoir aussi".


    Cette "réactivation" aurait provoqué chez Aurélie, une "identification à sa fille dans un vécu commun", un "bouleversement émotionnel entraînant un passage à l'acte": "venger sa fille en vengeant la petite fille qu'elle était", en visant "celui qu'elle
considérait comme cause de tous les maux, son père à elle", selon des extraits d'expertises lus en début de procès.

    C'est ainsi qu'armée, et avec son enfant, elle prit la route menant vers chez son père, en banlieue de Bordeaux. Une banale panne d'essence contrariait le plan, la jeune femme sortant alors de sa voiture et tirant afin d'arrêter des automobilistes pour se faire emmener. Puis, selon ses dires, tirant "accidentellement" sur sa fille en se retournant vers elle qui l'appelait. Une version contredite par l'expertise balistique, eu égard à la pression nécessaire sur la gâchette. Aurélie Coulon dira aussi avoir tenté de mettre fin à ses jours.

"Madame Coulon a une forme de mythomanie qui est assez importante pour moi, explique Maître Christian Dubarry, avocat des parties civiles. Depuis ce matin elle a indiqué un certain nombre de choses qui quand elles sont confrontées aux faits (...) se voient démenties. Et je me demande véritablement si on a pas affaire à quelqu'un qui joue un peu avec la Cour et qui essaye un peu de trouver des explications parfois qui ne sont pas à l'aune de la réalité et de ce qui s'est véritablement passé".


    L'audience de mardi consacrée à la personnalité de l'accusée, a offert, à défaut d'éclairage, un bouleversant face à face entre celle-ci et son père, chacun la gorge nouée et des sanglots dans la voix, elle égrainant les abus qui l'ont "détruite".
Lui niant farouchement, et tentant de comprendre, dans une fâcherie, une mauvaise influence extérieure, pourquoi sa fille l'accuserait ainsi.
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