Les circuits courts alimentaires ont permis aux producteurs de surmonter la crise sanitaire et aux consommateurs de bien manger local à bon prix. Mais, avec le retour à la normale et l'inflation, cette filière semble moins faire recette. Etat des lieux dans la métropole bordelaise.
De nombreux consommateurs se sont tournés vers le local avec les crises sanitaires successives.
Vente en direct
L'exploitation de la famille Laville "Le potager en ville", vente de fruits rouges et de légumes de saison, est installée aux portes de Bordeaux, sur la commune de Bruges.
Philippe Lavigne est la cinquième génération de maraîchers. Depuis deux ans, il vend sa production au bord de son terrain.
Je me suis dit qu'il fallait que je change ma façon de vendre mes légumes. Et en avril 2020, en un week-end, on a monté un drive avec ma fille.
Philippe Laville, maraîcher à BrugesFrance 3 Aquitaine
L'initiative a connu un engouement immédiat de la part des consommateurs. "C'est une amie qui m'en a parlé et je trouve les légumes très bons ; ils ne sont pas toujours beaux à voir mais ils ont du goût !" , témoigne une cliente.
"On a découvert cet endroit lors du premier confinement, et il y avait la queue. Les produits sont super frais" selon une autre cliente devenue une fidèle.
Baisse de fréquentation
Le producteur a constaté une baisse de fréquentation ces derniers mois. "Durant le confinement, les gens sont restés chez eux, et ils ont cuisiné et acheté des légumes au plus près de chez eux. Et quand on a dit aux Français qu'ils pouvaient sortir à nouveau, ils ont délaissé les circuits courts", regrette Philippe Laville.
Pendant le confinement, l'exploitation vendait 250 paniers de légumes par jour.
Après le confinement, le nombre a chuté à 80 paniers par jour, puis à 50 ce mois de mai 2022. Et le prix moyen du panier est passé de 45 à 9 euros en deux ans.
Les enseignes militantes en plein essor
Depuis la fin des confinements, les magasins militants s'en sortent bien comme dans cette enseigne bordelaise Supercoop où les consommateurs sont tous coopérateurs. Pour faire ses courses, il faut s'investir.
"Le concept de ce magasin, c'est qu'on est tous propriétaires de lieux, donc chaque personne qui achète sa part dans la coopérative donne trois heures de son temps, et cela nous permet de faire ses courses ici", explique Bérangère Escande, co-gestionnaire Supercoop.
L'enseigne compte 550 coopérateurs actifs, ce qui permet aux producteurs de vendre au juste prix. Chacun s'y retrouve avec un sac de courses 20 % moins cher.
Les produits sont locaux et issus de l'agriculture biologique en majorité, selon Caroline Lafue une coopératrice.
C'est un magasin qui est local, convivial et familiale, témoigne une autre coopératrice.
Alors, quel avenir pour les circuits-courts ?
A Eysines, commune de tradition maraîchère voisine de Bordeaux, les terres cultivables viennent à manquer, trop chères ou inondables. "Les gens n'habitaient pas dans la zone maraîchère, ils habitaient soit dans le centre bourg d'Eysines soit dans le quartier du Vigean. Aujourd'hui, la question se pose avec encore plus de difficultés, selon Christine Bost", maire d'Eysines.
Les producteurs de l'agglomération bordelaise misent sur le soutien des élus et l'adhésion des consommateurs pour maintenir les productions de proximité.
►REPORTAGE > l'avenir des circuits courts alimentaires dans la métropole bordelaise diffusé sur France 3 Aquitaine vendredi 20 mai 20222, reportage Mathilde Rezki et Cristel Arfel :