L'ordre des avocats de Bordeaux et plusieurs associations attaquaient l'Etat pour conditions de détention inhumaines dans une prison vétuste. Ils réclamaient des mesures d'urgence en référé. Le tribunal administratif de Bordeaux a suivi une partie de leurs demandes.
"C'est un premier pas. Même si toutes les mesures que l'on réclamait n'ont pas été actées, nous avons été entendus" se félicite Christine Maze, la bâtonnière du barreau de Bordeaux.
Respecter le droit à la santé
Le juge des référés a en effet suivi certaines demandes des avocats qui s'appuyaient sur le rapport accablant du contrôleur général des lieux de privation de liberté et sur la visite de parlementaires girondins à la prison de Gradignan, dans l'agglomération de Bordeaux.
Leurs observations faisaient état de "conditions de détention contraires à la dignité humaine", d'équipements en état de délabrement avancé, d'une prison surpeuplée ...
En attaquant l'Etat en justice, les avocats réclamaient soixante mesures à mettre en place en urgence.
"Le tribunal s'est déclaré incompétent quand aux mesures structurelles que nous avons demandé mais sur le droit à la santé il se montre ferme. C'est une vraie avancée" souligne Christine Maze.
Il acte ce que nous dénonçons depuis des années : des rendez-vous médicaux non honorés, des prescriptions non mises en oeuvre. C'est un énorme progrès
Christine Maze - batonnière barreau de Bordeauxsource : France 3 Aquitaine
Ainsi l'administration pénitentiaire devra désormais strictement respecter les prescriptions et extractions médicales.
Elle devra également assurer la présence 7 jours sur 7 et 24 heures sur 24 d'une personne capable d'assurer les premiers soins.
Le rapport de Dominique Simonnot, la contrôleuse générale des prisons, faisait état de nombreux rendez-vous médicaux reportés, "dix à quinze par jour".
Quand aux extractions, elle a pu constater que 440 sur les 817 programmées sur les cinq premiers mois de l’année 2022 ont été annulées.
Le rapport évoquait "une forme d’ingérence de l’administration pénitentiaire dans l’élaboration des diagnostics et des protocoles arrêtés par les soignants".
Fenêtres, lits, nourriture...des travaux à réaliser
Outre ces mesures sur la santé, la direction de la prison de Gradignan doit aussi procéder à quelques changements et travaux en urgence. Elle doit selon la décision du tribunal :
- améliorer la luminosité des cellules et procéder à un remplacement systématique des fenêtres des cellules défectueuses ;
- remplacer les lits instables et les sommiers manquants de boulons et veiller à équiper chaque lit superposé d’une échelle
- garantir une répartition équitable de la nourriture entre les détenus ;
- s’assurer que la chaine du froid est strictement respectée et utiliser des véhicules différents pour le linge souillé et les denrées alimentaires fraiches
- distribuer gratuitement au moins une fois par mois des produits essentiels à l’hygiène et à l’entretien de leur cellule ;
- permettre un accès effectif des détenus aux téléphones mis à leur disposition dans les bâtiments et sur les cours promenades ;
- proscrire toute fouille intégrale dans les locaux inappropriés tels que les douches ou le parloir des avocats.
Un recours devant le conseil d'Etat envisagé
Le juge des référés s'est en revanche déclaré incompétent pour ordonner des mesures telles que "la rénovation des cellules et des coursives, la création d’unités de vie familiale, ou le développement d’activités professionnelles, éducatives et culturelles" que réclamaient les plaignants.
"Nous allons veiller à ce que ces mesures soient réellement et rapidement mises en œuvre" prévient Christine Maze qui dit réfléchir avec l'ensemble des plaignants à un éventuel recours en cassation.
Voir le reportage de Denis Salle et Guillaume Decaix :