Un an après l'annonce du premier confinement, rencontre avec Hugo Lederer. Le chef et propriétaire du Café du théâtre à Bordeaux a mis à profit cette période d'inactivité pour se consacrer aux plus démunis. Mais il ne cache pas son amertume de voir son établissement désepérément vide.
Il fait partie des professions les plus touchées par la crise sanitaire. Hugo Lederer est chef depuis vingt-cinq ans, à la tête de son propre restaurant depuis onze ans.
"Ce n'est pas mon métier"
Son établissement, le Café du théâtre, situé au cœur du quartier Sainte-Croix à Bordeaux, est fermé depuis de longs mois. Impossible de déguster sa "cuisine raffinée du marché", le restaurateur ne propose pas de vente à emporter.
"Ce n'est pas mon métier, expose-t-il. Nous ne sommes pas une pizzeria, une sandwicherie, ni des traiteurs. Nous sommes restaurateurs dans l'âme, notre métier, c'est de cuisiner et d'accompagner le client jusqu'à la fin du repas".
Cet amoureux du travail des produits bruts défend la "restauration de qualité" de son établissement, mais aussi la convivialité qui y règne. "C'est un espace où nous allons voir nos clients, on s'informe, on échange… Et on ne parle pas que de cuisine", assure-t-il.
Solidarité
L'établissement n'est pas toujours fermé pour autant. Si deux employés du restaurateur ont préféré se reconvertir au vu de la durée de la crise, les deux autres, au chômage partiel, reviennent ponctuellement tester de nouvelles recettes. Hugo Lederer a mis à profit la fermeture pour effectuer quelques travaux, proposer aux habitués des prestations à domicile, mais aussi se consacrer aux autres.
Dès le premier confinement, il a concocté des plats pour les soignants "oubliés des aides et de la solidarité mise en place", ceux des Ehpad ou des petits hôpitaux de la Gironde.
Une démarche qu'il a voulu poursuivre en l'élargissant aux personnes dans le besoin. " Notre intérêt était de prolonger le soutien du premier confinement par un autre schéma de fonctionnement." Le restaurateur se met alors en relation avec Monblanc traiteur et des responsables associatifs pour fournir des repas aux plus démunis.
Si le restaurateur a choisi de rester actif pour tenir le coup, il ne cache pas son amertume. "Les choses ne vont pas bien. Je suis cuisinier et restaurateur. Mon métier depuis 25 ans, c'est de faire vivre ma maison, mon quartier et mes salariés ", rappelle-t-il.
C'est très compliqué de se dire qu'on ne va plus au travail tous les jours. Il n'y a plus de bruit, plus de discussion entre les clients… Personne n'aurait pu imaginer qu'un jour, on m'obligerait à ne plus avoir d'activité.
Difficultés financières
A titre personnel, les difficultés financières se font également ressentir. "L'entreprise se maintient avec les aides, heureusement qu'elles sont là pour nous supporter dans les charges fixes, reconnaît le restaurateur.
Mais personnellement, on est aussi parents, on a des loyers personnels, des emprunts… On doit faire l'impasse sur tout le salaire qui faisait partie de notre foyer et nous permettait de payer la maison, la voiture ou même l'essence. Si on veut sauvegarder nos entreprises, on doit s'enlever nos avantages".
Quant à la perspective d'une possible réouverture des restaurants au printemps, en renforçant le protocole sanitaire, elle ne suffit pas à rassurer le chef d'entreprise, inquiet sur les règles de distanciation physique.
Nous sommes rentables à partir du moment où on fait un certain nombre de couverts par jour. Soit on nous aide jusqu'au bout, soit on nous oblige à ouvrir sachant qu'on va perdre de l'argent. Moi, je ne rouvrirai pas pour perdre de l'argent.