Esprit Rock a rendez-vous au Void pour une des escales de la tournée du festival «Les Femmes s’en mêlent».
L’affiche est belle : SBRBS, de Rennes et SAINT AGNES de Londres. Avec à la clef une rencontre avec Ophélie Herraire, fondatrice de l’association bordelaise Lagon Noir, organisatrice de la soirée. Deux groupes menés par des femmes.
Les caves présenteront toujours un abord énigmatique et attractif, et celle du Void ne fait pas exception. Le Void a été le 29 mars l’hôte du festival « Les Femmes s’en mêlent » pour son escale bordelaise. Ce festival né le 8 mars 1997 pour la journée internationale des droits des femmes, a pour objectif de mettre sous les feux de la rampe les nombreuses actrices de la scène culturelle internationale. Avec le souci de dénicher les nouveaux talents de demain. Citons pêle-mêle quelques noms : Christine & The Queens, Cat Power, Jeanne Added. Et de provoquer des rencontres inédites et finalement tellement évidentes, avec notamment Kim Gordon et Brigitte Fontaine.
Pour cette 22ème édition, le festival est passé de Bordeaux à Brest en passant par Dunkerque et Charleroi. Ophélie Herraire, de Lagon Noir, « C’est un festival qui existe depuis une vingtaine d’années maintenant, qui souhaite valoriser la scène féminine parce que dans les musiques actuelles, et c’est un constat, il y a une vraie absence de femmes. C’est une antenne parisienne au départ qui a créé ce festival pour mettre en valeur les artistes féminines. Et comme Lagon Noir organise ponctuellement des concerts, ils m’ont proposé d’organiser cette soirée en bénéficiant de leur label.» Ophélie Herraire, une femme visiblement bien décidée, initiatrice de l’aventure Lagon Noir, « J’ai créé Lagon Noir il y a un peu plus d’un an. C’est une association qui fonctionne avec un petit lot de bénévoles. Notre activité principale, c’est le développement d’artistes, des artistes plutôt locaux mais pas que. Plutôt jeunes professionnels en développement de projets, comme I Am Stramgram, Sweat Like An Ape, Blackbird Hill, Persepolis. Je travaille aussi ponctuellement avec Petit Vodo. Et dans le nord de la France, je travaille avec les Swinging Dice».
Les femmes et le rock ? Rien de nouveau sous le soleil évidemment. La chanteuse Kitty Arabella Austen de Saint Agnes aime l’initiative des organisateurs du festival, même si, «l’idée même d’avoir à mettre les femmes en avant me dérange, mais on a besoin de le faire, donc c’est finalement une très bonne idée.""L'activité principale de Lagon Noir , c'est le développement d’artistes, des artistes plutôt locaux mais pas que."
Ophélie Herraire, Lagon Noir
Les femmes et le rock, ça a toujours été difficile, il n’y en a pas beaucoup dans ce milieu. J’adore d’ailleurs faire des concerts en compagnie d’autres groupes dans lesquelles jouent des femmes. J’adore travailler avec des femmes, nous avons d’ailleurs un ingénieur du son qui est une femme, notre agent est une femme, notre éclairagiste est une femme, c’est très important pour moi de travailler avec des femmes dès que c’est possible. C’est triste qu’il faille dédier un festival pour les femmes dans le monde du rock. »
«L’idée même d’avoir à mettre les femmes en avant me dérange, mais on a besoin de le faire."
Kitty Arabella Austen, Saint Agnes
Même moue dubitative lorsqu’on évoque le sujet avec Marie Herbault, la chanteuse de SBRBS,
«Mettre les femmes à l’honneur…. Je suis toujours un peu mitigée. Mais pourquoi pas après tout. Je pense juste qu’il faut laisser les gens s’exprimer comme ils ont envie de le faire, avec leur sexe, sans sexe, sans sein, sans cul. Comme ils veulent en fait. Je trouve ça très bien de mettre les femmes en avant»
Marie Herbault, SBRBS
Et de nous rassurer quant à la survie du rock. Hadrien Benazet, le guitariste de SBRBS, «Le rock existera toujours. Il y en avait avant, il y en aura après. Ça ne mourra jamais.» Même son de cloche avec le batteur Florian Pardigon, « Il y aura toujours du rock même si aujourd’hui ce sont les musiques urbaines, le hip hop et le rap qui marchent. Le rock devient un peu plus underground qu’il ne l’a été par le passé. C’est un peu plus indé de faire du rock maintenant, mais ça continuera toujours.»
Marie, « Notre musique vient un peu d’Angleterre, elle vient un peu de Rennes où on grandit depuis presque 10 ans. De très bonnes influences. On fait aussi de la musique à 3, c’est très particulier, c’est un très bon exercice, il y a beaucoup de contraintes. Vouloir faire de la musique à 3 c’est déjà très intéressant. »
Le rock existera donc toujours, et SBRBS joue avec ses codes. Notamment avec la version de la chanson « Ivy (Conservatory Live Session)», enregistrée dans le jardin d’hiver de la mairie de Saint-Brieuc. Une version qui perd en décibels mais gagne en intensité. Un bel exercice de funambule qui montre que les 3 de SBRBS savent aussi trouver le juste équilibre et ajuster le tempo.
Homme ou femme, qu’importe après tout, il faut être solide pour jouer avec Saint Agnes. Des concerts féroces, des tournées impressionnantes dans toute l’Europe à un rythme effréné. La scène, encore la scène. A la question « Quand vous prenez d’assaut la scène, peut-on appeler ça votre heure du crime ? (référence à leur single « The Witching Hour »), Jon James Tufnell, « Oui, c’est comme si on sortait de la réalité pendant une heure. On créé une nouvelle réalité qui est simplement cette pièce dans laquelle on joue, nous et le public. On essaie de créer un endroit où on peut se sentir agressif. Une agressivité positive. C’est très valorisant.»
Jon James Tufnell, «Dans le groupe, nous sommes tous assez timides et jouer sur scène nous permet de pouvoir nous exprimer pleinement, de surpasser cette timidité. Quand nous sommes sur scène, nous sommes très unis, un vrai gang. C’est assez stimulant de pouvoir exprimer notre côté dynamique, agressif, parce que cet aspect reste très souvent enfermé et nous avons tous besoin, nous en tous cas, de le libérer. Quand nous jouons live, on joue comme un groupe punk… Notre musique n’est pas punk du tout, mais on aime des groupes comme les Stooges. C’est comme ça qu’on aime jouer.» Kitty Arabella Austen, «Jouer sur scène, c’est comme faire une thérapie, c’est une manière pour nous d’exorciser nos démons.» Jon James Tufnell, «Le côté Western de notre musique nous rend plus costaud, et nous rend aussi plus vulnérable, plus émotionnel. Et la partie punk nous permet de nous débarrasser de ce trop plein d’émotions ».
«Sur scène, on créé une nouvelle réalité, c'est nous et le public. C’est très valorisant.»
Jon James Tufnell, Saint Agnes
Kitty Arabella Austen, «On est vraiment accro à la scène, parce qu’il y a une sincère relation avec les gens. Quelque chose qu’on peut partager, c’est tellement rare. C’est pour ça qu’on adore ça. L’énergie que le public nous procure est très particulière, il n’y a que lorsque tu joues sur une scène que tu peux avoir ce genre de connexion avec les gens. C’est très rare. L’esprit du rock’n’roll n’est pas prêt de mourir. »
Les caves présenteront toujours un abord énigmatique et attractif, et ce soir celle du Void nous a montré un des aspects de la palette artistique qu’elle pouvait offrir. Le Void ne sonnait pas le vide. Les femmes se mêlent de tout et elles ont bien raison. Pour le plaisir de tous.
Si vous voulez écouter gratuitement le titre «The Witching Hour» de Saint Agnes, c’est ici :
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Achetez la musique de SBRBS ! Sortie d’un EP « By Lust & Gold » en juin 2019.