La péniche "Le tourmente" fait un voyage test de 110 km entre Damazan, en Lot-et-Garonne, et Bordeaux entre le 3 et 8 mai. Il s'agit de fédérer plusieurs acteurs pour échanger et partager sur le potentiel d'un transport fluvial au service des territoires.
En fret sur la Garonne ? On se souvient des morceaux d'Airbus A380, il n'y a pas si longtemps... Sinon, on parle souvent de cette époque révolue où les gabarres charriaient des barriques, des céréales... où le bois transitait également sur ses eaux.
Alors que les routes aquitaines sont engorgés de camions venus de l'étranger mais aussi souvent des départements alentours, la Garonne reste un axe intéressant, le chemin entre les zones agricoles et les bassins de populations girondins. Revenir à un circuit court fluvial serait une autre alternative à la route, d'autres liens du producteur aux consommateurs.
Une alternative à la route
Aujourd'hui, les points de vue changent, les énergies se fédèrent et se renouvellent permettant de multiplier des initiatives plus vertueuses écologiquement et socialement.
Ce voyage-test porté par le collectif Garonne fertile a pour but d'attirer l'attention sur le champ des possibles que peut offrir cette navigation fluviale "cet événement est créé pour favoriser le partage d’expériences des acteurs mobilisés et d’initiatives inspirantes au public, il a pour but de renforcer les actions et collaborations des acteurs qui s’engagent dans le projet du transport alimentaire sur la Garonne et son canal. Il est nécessaire de coopérer pour accompagner la construction des systèmes alimentaires et de transports Transterritoriaux justes et résilients".
Benjamin Labelle, directeur de la coopérative "Manger Bio Sud-Ouest" fait partie due Garonne fertile. Cette entité s'occupe de distribution de produits bio dont les adhérents sont les entreprises et producteurs. Il explique que "Garonne fertile" est un collectif qui a vu le jour, il y a près de six mois, et rassemble "l'ensemble de la chaîne de production" : producteurs, distributeurs, magasins, restaurateurs... L'idée était de réfléchir sur ce potentiel fluvial. Des acteurs des circuits bio particulièrement sensibilisés à l'empreinte carbone de leurs déplacements notamment.
"On est un trait d'union" entre ces entreprises, "on répond" à des appels d'offre (restaurations, restaurations collectives, épiceries,...). La coopérative gère chaque année près de 4000 livraisons par an. Des déplacements qui se font, pour l'heure, en camions et pour 80 % entre le lieu de production, le Lot-et-Garonne et celui de consommation, essentiellement l'agglomération bordelaise. Et c'est exactement le cours de la Garonne...
Diviser par 3 les émissions de CO²
Selon lui, emprunter la voie fluviale permettrait de réduire par 3 ou 4 la production d'émission de CO², en utilisant un péniche traditionnelle...Quant à la rentabilité ? C'est la question qu'il convient d'évaluer, ensemble :" ça va dépendre des prix pratiqués. Aujourd'hui, on a trop d'acteurs de ce transport pour évaluer précisément où se situe la rentabilité. Mais on estime que autour d'une centaine de palettes par liaison de transport, on pourrait déjà avoir un modèle équivalent en terme de coût au transport routier".
Le projet de Garonne fertile a permis de rassembler tant des associations (Voies navigables de France, Vivre le canal, Agir pour le fluvial), des producteurs, magasins, restaurants (Casa Gaïa, par exemple à Bordeaux) que des collectivités locales (Lot-et-Garonne, la Région Nouvelle-Aquitaine, la ville de Bordeaux et le Bordeaux Grand Port Maritime); mais également des entrepreneurs dans les nouvelles technologies (Hydrogène vallée, par exemple).
Bien-sûr, le contexte des élections régionales participe à cette émulation autour d'une proposition fluviale. Mais Benjamin Labelle le répète " on cherche à fédérer un maximum d'acteurs et d'abord des entrepreneurs qui y pensent dans leur coin.
Un bateau
L’association "Vivre le canal" est née en 2012 autour d'un bateau, la péniche "Le Tourmente" avec cette idée de sensibiliser le public à cette navigation fluvial des personnes, mais également des marchandises sur le Canal-des-deux-mers.
Jean-Marc Samuel, son capitaine, se bat pour rétablir le transport des marchandises sur le canal. Car le fret fluvial a disparu dans les années 1980, avec la liquidation de la coopérative des transports fluviaux du Canal du Midi.
Le voyage dans la "Tourmente"
Ce voyage-test est une opération de communication. Dans le bon sens du terme. Pour attirer l'attention et, comme le dit Benjamin Labelle, " permettre à chacun de s'emparer du sujet". Ce 3 mai et pendant deux jours, la péniche "Tourmente" va parcourir 110 km entre Damazan et Bordeaux, avec à son bord, une trentaine de commandes sur 25 palettes (environ 6 tonnes).
Au cours de sa navigation de 18 heures, elle a prévu de faire escale et de prendre de nouveaux chargements dans plusieurs ports : Meilhan-sur-Garonne, Langon, Castets-en-Dorthe... en utilisant Canal des deux mers (latéral de la Garonne) et une partie de la Garonne.
Arrivée à Bordeaux, la péniche sera amarée aux bassins à flot et son équipage procèdera au déchargement. Le dernier kilomètre entre le fleuve et les clients seront faits grâce à des vélos-cargo auprès des clients.
Pour ce voyage, la péniche "Tourmente" est chargée de fret, de produits alimentaires tels que des légumes, de l'huile, des pruneaux (bien-sûr!) du miel ou du vin. Le voyage du retour, de Bordeaux vers le Lot-et-Garonne pourrait être l'occasion de transporter des déchets à recycler... C'est d'ailleurs l'objet également de réflexion, d'avoir un aller aussi rentable économique et écologiquement parlant... L'heure est aux échanges aux visions nouvelles et innovantes, et il semble y avoir de l'enthousiasme et de l'esprit d'entreprendre. Ça ne peut pas faire de mal.
Les 7 et 8 mai aux bassins à flot :
Le vendredi 7 mai : déchargement au ponton d’honneur à 10 h 30, rencontres en visioconférence sur l’avenir du fret fluvial et tables rondes
Le samedi 8 mai : de 10 à 15 heures, marché des producteurs sur le quai et toute la journée, vente et dégustation des produits des producteurs embarqués par péniche.