Elle était la dernière otage française dans le monde. Après quatre ans de captivité, Sophie Pétronin, originaire de Bordeaux et âgée de 75 ans, est libre. Une partie de sa famille installée sur le bassin d’Arcachon part à Paris pour l’accueillir.
"C' est indescriptible, un moment d’émotion intense, un énorme soulagement !" La joie est immense. Il est un peu plus de sept heures ce vendredi matin 9 octobre. Lionel Granouillac et sa famille ont quitté Andernos où ils résident pour prendre le train, direction Paris. Après quatre longues années d’attente, le neveu de l’humanitaire s’apprête à accueillir celle qu’il appelle " ma petite tatie" à la base aérienne de Villacoublay en région parisienne.Il a encore en tête les images de sa libération, quelques heures plus tôt. "J’ai été heureux de voir qu’elle pouvait tenir debout, qu’elle pouvait marcher ! et entendre mon cousin hurler Maman ! Maman ! C’est la plus belle récompense ».
Sur le tarmac de l'aéroport de Bamako vau Mali, Sophie Pétronin, âgée de 75 ans, a pu retrouver son fils, Sébastien Chadaud.Celle qui a été enlevée à Gao dans le nord du Mali, le 24 décembre 2016, est descendue de l'avion de l'armée malienne en provenance de Tessalit (Nord-Est). Elle était vêtue de blanc, avec un foulard sur la tête. Son fils est allé directement à sa rencontre.
"Si j'avais pu lui donner plus d'informations, plus de messages, mais c'était vraiment très difficile", a réagi Sophie Pétronin face aux journalistes. "Je sais (qu'il a remué ciel et terre pour la retrouver, ndlr)", a-t-elle poursuivi, avant de se dire "fière" de son fils et souhaiter "pour toutes les autres mères qu'elles aient un enfant qui soit capable de se battre de cette manière".
Son fils n'y croyait pas
Sur le tarmac, son fils qui a livré un combat acharné pour la retrouver s’est précipité dans ses bras en larmes. Des retrouvailles émouvantes et poignantes pendant lesquelles, l'ancienne otage d'origine bordelaise a déclaré avoir toujours été certaine qu'elle retrournerait un jour chez elle.Sébastien Chadaud n 'espérait pas retrouver sa mère "aussi forte, aussi grande". Il raconte ce moment d'un "petit garçon qui retrouvait sa maman".Je me suis dit, surtout n’accorde pas d’importance à la mort parce que tu ne sais pas où, quand et comment elle arrivera. Tiens bon, accroche-toi. C’est ce que j’ai fait.
Sophie Pétronin a été libérée en même temps que l'homme politique malien Soumaïla Cissé et deux Italiens. Un convoi a par la suite emmené les ex-otages en direction de Koulouba, où se trouve le siège du palais présidentiel malien.
C’est à ce moment que Lionel Granouillac a pu échanger quelques mots avec elle, jeudi dans la soirée, par téléphone. "Ne t’inquiète pas Lionel, je vais très bien !" lui a t-elle soufflé.
Très vite, Sophie Pétronin a dit " n’éprouver aucune colère". Le temps lui a paru "un peu" long, "mais j'ai transformé la détention, si on peut dire, en retraite spirituelle".
Une force mentale
« J'étais dans l'acceptation de ce qui m'arrivait et je n’ai pas résisté, et puis voilà je m'en suis sortie", a-t-elle dit. Cela "se passait bien, l'air était sain, bon (...) Je me suis accrochée, j'ai tenu, j'ai beaucoup prié parce que j'avais beaucoup de temps, je me suis promenée, j'’ai bien mangé, j'ai bien bu, de l'eau fraîche hein !".Sophie Pétronin a indiqué qu'elle pouvait écouter la radio et que ses gardiens, sur lesquels elle n'a pas fourni de précisions, lui faisaient passer des messages ou des vidéos, comme l'une dans laquelle son fils lui disait: "tiens bon".
Elle lui a rendu hommage: «Mon fils est un battant, mais dans la famille, nous sommes tous des battants".
Elle s'est gardée de parler de ses gardiens comme de "djihadistes". "Appelez-les comme vous voulez, moi je dirais que ce sont des groupes d'opposition armés au régime", a-t-elle dit. Elle a invoqué des accords passés qui n'auraient pas été tenus et qui provoqueraient les hostilités actuelles.
Gouvernement et groupes armés "trouveront le chemin pour la paix, je leur souhaite en tout cas vivement", a-t-elle déclaré. Elle s'est dite en "pleine forme".
Sophie Pétronin dit vouloir "revenir voir ce qui se passe" à Gao
Quelques heures après sa libération, l’humanitaire a dit son intention de retourner à Gao, pour s'assurer que l'organisation d'aide aux enfants qu'elle dirigeait avant d'être enlevée continuait à fonctionner convenablement.
"Je vais aller en France en Suisse et après je vais revenir voir un peu ce qui se passe ici", a-t-elle dit dans une rencontre avec des journalistes à l'ambassade de France à Bamako.
"J'ai pris l'engagement pour les enfants, ça fait presque quatre ans que je n'ai pas vu comment se déroulent les programmes", a-t-elle dit en invoquant les actions de son organisation contre la malnutrition et en faveur des enfants orphelins.
Une intention qui ne fait pas forcément l’unanimité familiale. Son fils Sébastien Chadaud a réfréné son ardeur en disant que cela se ferait "en toute sécurité". "Attends-toi à ce que je cadre certaines choses, tu n'iras pas où tu veux".
Avec sourire, son neveu lui aussi, préfère écarter cette hypothèse. "Je vais vous faire une boutade je vais lui expliquer ce qu’est le télétravail !" confie-t-il.
Emmanuel Macron « Heureux de la savoir libre »
Le président de la République a remercié " tout particulièrement les autorités maliennes pour cette libération". Emmanuel Macron a adressé « un message de sympathie à sa famille, à ses proches ». Il a annoncé sur Twitter que Sophie Pétronin, arriverait ce vendredi en France et qu'il irait l'accueillir à son arrivée.
L'émotion des élus girondins
La nouvelle de la libération de Sophie Pétronin « constitue un soulagement et une joie immenses pour l’ensemble du Conseil régional, pleinement mobilisé pour rappeler le sort de la dernière otage française, enfant de Nouvelle-Aquitaine », a réagi la Région.La libération #SophiePetronin détenue depuis le 24 décembre 2016 au Mali, constitue un soulagement et une joie immense. L'ensemble du Conseil régional @NvelleAquitaine était pleinement mobilisé pour rappeler le sort de la dernière otage française, enfant de Nouvelle-Aquitaine
— Alain Rousset (@al_rousset) October 8, 2020
« Si la Nouvelle-Aquitaine souhaite à l’ensemble de sa famille et de ses proches de trouver la tranquillité et le bonheur auxquels ils aspirent, après quatre années marquées par l’incertitude et la peur, le Conseil régional adresse tout particulièrement à Sophie Pétronin ses vœux les meilleurs pour le futur. »
Une émotion partagée par le maire écologiste de Bordeaux. Sur le réseau social twitter, Pierre Hurmic a rendu hommage à une femme engagée.
Je m’associe au soulagement des proches de Sophie #Pétronin. Bordelaise, engagée auprès d’enfants au @Mali, Sophie est motivée par des valeurs d’humanité et de solidarité que je salue. #liberation #otage https://t.co/1fmBZ1JKWh
— Pierre HURMIC (@PierreHurmic) October 8, 2020