À La Réole, l’eau est montée à 8 mètres 43 ce jeudi matin 13 janvier. C’est moins qu’il y a un an. Les agents municipaux sont désormais prêts pour le grand nettoyage. Il devrait durer une dizaine d’heures.
La nuit a été courte pour le maire de la Réole. Depuis mardi 11 janvier, Bruno Marty suit la montée du fleuve comme le lait sur le feu, avec beaucoup d’attention. Il était ce matin sur le pont à 4 h 30 pour voir la Garonne enfin atteindre son pic : 8 mètres 43.
Les habitants de cette petite commune du sud Gironde, habitués à avoir les pieds dans l’eau de la Garonne, vont pouvoir souffler après trois jours d’inquiétude. Les prévisions laissaient craindre le pire.
8 mètres 43 : c’est moins qu’il y a un an (9 mètres 80) et c’est fort heureusement bien en deçà des estimations de Vigicrues qui, dans un premier temps, prévoyait 10 mètres 60.
On est des grands garçons ! On sait gérer les crues! On a des compétences, même si on n'est pas des hauts fonctionnaires de l'Etat
Bruno Marty, maire de La Réole
Une perspective envisagée qui a provoqué un sentiment de panique dans la population avant que le service de surveillance des cours d'eau ne revoie sa copie après une erreur de calcul.
Une erreur qui ne passe pas chez les élus
Le maire Bruno Marty ne décolère pas et ne mâche pas ses mots allant jusqu’à parler "d’incompétence".
"Je connaissais déjà l’incompétence de Vigicrues, ils se sont trompés lourdement sur les trois dernières crues. Moi ça ne m’a pas surpris, mais ça a créé un vent de panique chez les riverains à qui on a annoncé 80 cm de plus que la dernière crue ! C’était plus que celle de 1981 !"
Le maire reconnaît que "l’erreur est humaine" mais déplore l’absence de communication avec les services de l’Etat.
"Avant de faire de telles annonces, on sait très bien que la Garonne monte petit à petit et qu’on a le temps de se rencontrer, de faire une visioconférence".
Bruno Marty rappelle que les édiles connaissent leur commune. "On aurait pointé du doigt cette erreur !". L’élu demande que les maires soient associés, tenus au courant des prévisions, avant qu'elles ne soient publiées.
" Que Vigicrues nous annonce ces prévisions, qu’on soit les premiers informés de façon à ce que l’on puisse anticiper plutôt que de diffuser directement sur le site. Nous les maires, on est souvent informés après le citoyen !"
Erreur, bug informatique et fatigue
De son côté, le service de surveillance des cours d'eau vigicrues reconnaît une double erreur. D'abord sur l'estimation du pic de crue et la temporalité (mercredi et pas jeudi).
On comprend la colère légitime des élus
Pierre-Paul Gabrielli - DREAL Nouvelle-Aquitaine
Pierre-Paul Gabrielli est le responsable des risques naturels et hydrauliques au sein de la DREAL Nouvelle-Aquitaine, dont dépend le service Vigicrues. Il estime que ses équipes ont joué de "malchance" avec cette mauvaise saisie de données. A cela s'est ajouté un problème informatique.
"Nous avons rectifié nos estimations mais un souci technique est intervenu". Résultat: " l'erreur est restée 6 heures sur le site au lieu de quelques minutes".
Pierre-Paul Gabrielli dit comprendre la colère des élus mais estime que "la fatigue" est à l'origine de ces déconvenues. "Nos agents sont fortement mobilisés depuis la fin de la semaine dernière par beaucoup de crues dans le sud de la région, dans les Landes, les Pyrénées-Atlantiques, les Hautes-Pyrénées, le Gers. On arrivait en fin d'épisode et c'est vraisemblablement un peu de fatigue qui a généré ces erreurs".
Le grand nettoyage
C’est maintenant une autre couse contre la montre qui débute. Le fleuve a commencé à retrouver son lit en amont en Lot-et-Garonne.
L’eau se retire. C’est maintenant aux services techniques d’entrer en scène pour une opération de nettoyage de grande ampleur. Une vingtaine de personnes va travailler toute la journée. Le maire qui a déjà connu quatre crues est la coordination.
"Là, on a de la chance ! Contrairement à il y a un an, nous allons pouvoir le faire en journée. En février 2021, on avait commencé à 17 heures et travaillé de nuit."
Les grandes manœuvres viennent de débuter sur les quais. Il faut racler les dépôts de cailloux, de sable. Cette couche de limon entassée le long des bâtiments.
" Il faut pousser les alluvions le plus possible, à mesure que l’eau se retire. C’est une couche de 2 à 3 cm. Il faut aller vite pour éviter que la boue ne sèche et se transforme en ciment".
L’opération doit durer une dizaine d’heures. La municipalité espère rouvrir les quais ce jeudi soir vers 20 heures.
Demain, vendredi, les habitants retrouveront leur marché. Le calme sera de retour après la tempête. Comme si de rien n’était où presque. Les traces seront effacées. Peut être un peu moins, le traumatisme causé par ce nouvel épisode de crue.
Tous le savent, la Réole n'est jamais à l'abri des assauts de la Garonne.