Par solidarité ou par conviction, ces maires vont fermer leur mairie ce mardi 31 janvier dans le cadre du mouvement de grève qui touche toute la France pour dénoncer la réforme des retraites. Pour quelles raisons ? Et est-ce légal ?
Ce mardi 31 janvier, les portes de la mairie de Saint-Pierre d'Aurillac seront closes. " Par solidarité, pas par idéologie, pas du tout", justifie Stéphane Denoyelle, le maire (PC) de cette commune de 1 300 habitants, située dans le sud Gironde.
Ils sont un certain nombre, aux quatre coins de la France a avoir choisi, à leur manière, de se mobiliser. Des maires contestataires ou solidaires. "C’est pour soutenir les agents de la commune qui sont des agents de première ligne. La moitié des agents de la commune sont des aides à domicile, une autre partie sont des agents de voirie", poursuit le maire girondin.
On ne peut pas imaginer que, passé 60 ans ou 64 ans, ils puissent travailler de la même manière et rendre le même service aux usagers. Ce n'est pas imaginable.
Stéphane Denoyelleà France 3 Aquitaine
"C’est aussi le rôle d’une municipalité de prendre position sur un tel sujet"
Jean-Marc Lespade est, lui aussi, communiste. Il est le maire de la commune de Tarnos au Sud des Landes. Il l'a décidé, sa mairie fermera de 10h à midi, "de manière à ce que les agents puissent aller manifester" contre la réforme des retraites.
"Il s’agit d’une régression sociale inimaginable et je crois que c’est aussi le rôle d’une municipalité de prendre position sur un tel sujet (…)" dit-il. "Une très grande partie des agents de la ville de Tarnos vont effectivement se mettre en grève (…).
La ville de Tarnos souhaitait accompagner ce mouvement en faisant en sorte que les services municipaux soient fermés.
Jean-Marc Lespade, maire PC de Tarnos (40)à France 3 Aquitaine
"On s'adapte"
Un choix plus ou moins bien vécu par les habitants de la commune. " On s’adapte, on n’a pas le choix", explique cette mère de famille qui a posé une journée de congés demain pour pouvoir s'occuper de ses enfants qui n'auront pas école.
Un peu plus loin ,une femme soutient le choix du maire "On vote pour notre maire, dit-elle, donc on sait quel parti il soutient". "Mais c’est important de voir dans les actions aussi comment il se positionne ».
"Une commune ne peut pas fermer"
Ces maires ont-ils le droit de fermer leur mairie, même un court instant ? La jurisprudence a montré que non. Certains édiles ont été condamnés ces dernières années. "Il faut bien comprendre que les maires ont deux casquettes, on l’oublie souvent", rappelle le politologue Jean Peutau.
"La plus connue, c’est qu’ils sont représentants des citoyens à l’échelle de la commune et des intercommunalités. Et l’autre qui est moins connue, c’est qu’ils sont représentants de l’Etat dans deux fonctions : officier de l’état civil et officier de police judiciaire (…).
Par définition l’Etat ne s’arrête pas. Donc par conséquent une commune ne peut pas fermer. Par ailleurs, en droit privé un chef d’entreprise ne peut pas non plus fermer son entreprise et obliger ses salariés à ne pas travailler. Cela s’appelle le "lock-out", c’est illégal. En tant qu’employeur non plus le maire ne peut pas fermer sa mairie, car cela imposerait à ses fonctionnaires territoriaux de ne pas venir travailler", souligne Jean Peteau.
Alors sur laquelle de ces deux notions s'appuie la justice pour condamner un maire ? "Dans la jurisprudence, c’est la notion de représentant de l’Etat qui a été retenue par le tribunal administratif pour expliquer que ces fermetures ne sont pas autorisées par la loi", répond Jean Petaux.
"Cela dit si tous les fonctionnaires territoriaux font grève, ça c’est un droit constitutionnel et bien la mairie d’une certaine façon va avoir ses services fermés au public".
Le maire de Saint-Pierre-d'Aurillac l'affirme. Il gardera son téléphone allumé pour être joignable et répondre aux urgences.
Article rédigé à partir des réactions et images recueillies par Maria Laforcade, Taliane Elobot, Marie Neuville et Jean-Michel Litvine.