"Il ne reste plus un paquet de pâtes, on a besoin de tout" : les Restos du cœur lancent leur grande collecte

La collecte de printemps des Restos du cœur commence ce week-end dans les supermarchés. Les bénévoles espèrent que les dons seront au rendez-vous malgré une inflation galopante.

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C’est la crainte tant redoutée. Que la générosité ne soit pas à la hauteur des attentes alors que le nombre de bénéficiaires a connu une hausse de 22 % sur les trois premiers mois de la campagne d'hiver. Cette année, la collecte des Restos du cœur s’accompagne de nouvelles inquiétudes. La hausse des prix et les coûts de l’énergie pourraient avec des conséquences sur les dons.

Hausse du nombre des bénéficiaires

"Nous sommes, c’est vrai, dans l’incertitude" confie l’un des responsables du centre de Castelnau-de-Médoc. Cet hiver, l’antenne départementale est venue en aide à 145 familles. "On accueille plus de personnes que l’an passé. Presque 10 % en plus ! Alors, c’est vrai que l’on a besoin de dons et il ne faudrait pas que la collecte soit pénalisée à cause de l’inflation. C’est dur pour tout le monde !" . Ici, ceux qui ont poussé la porte de l'association, créée en 1985 par Coluche, ont pour beaucoup perdu leur emploi et ne vivent uniquement qu’avec les allocations, "et c’est loin d’être suffisant" ajoute-t-il.

En Gironde, les bénéficiaires sont plus nombreux : 16 % de plus par rapport à l’an dernier. Et parmi eux, une forte hausse des familles avec de très jeunes enfants et de nombreux étudiants. Ces derniers représentent, par exemple, plus de 50 % des bénéficiaires du centre de Talence qui abrite le campus universitaire.

Conséquences de l'inflation

Corinne est mère célibataire. Elle a deux enfants et touche le Rsa. Elle dit faire encore plus attention qu’avant. "C’est difficile aujourd’hui d’acheter des fruits, des légumes. Tout est trop cher. Je regarde tout quand je vais au supermarché. Sans les Restos, je ne pourrai pas m’en sortir et donner aux filles de quoi manger correctement !"
Pour beaucoup, la viande et le poisson sont devenus des produits de luxe. 
C’est le cas pour Arnaud et Babeth. Le couple vit avec deux petits salaires. Jusque-là, il n'avait jamais imaginé avoir recours aux Restos. L'augmentation des prix l’a fait basculer dans une précarité.

"Avant, il n’y a pas si longtemps, j’achetais des morceaux de poulet par cinq kilos, que je mettais au congélateur. Je payais ça autour de 16 euros. Aujourd’hui, c’est le même prix, mais il y en a beaucoup moins !"

Un sentiment partagé par Laurence, 70 ans. Elle vit seule depuis le décès de son mari. "Je ne mange quasiment plus de viande ni de poisson. Vous avez vu les prix ? Ce n’est pas possible. Trente euros le kilo de cabillaud ! Avant, c’était le poisson du pauvre. Aujourd’hui, les pauvres comme moi ne peuvent plus en acheter. Je ne peux pas me le permettre. Je mange davantage de pâtes, de riz, et encore, pas tous les jours."

Parfois, je saute un repas pour économiser. Ça me permet de tenir la semaine et de pouvoir payer le reste

Laurence, 70 ans, en situation de précarité

Rédaction web France 3 Aquitaine

Difficile de demander de l'aide

L’électricité, le gaz et l’eau pèsent lourd dans le budget des ménages. Pourtant, Laurence ne se résigne pas à demander de l’aide. "Trop difficile" nous dit-elle. "Un jour peut-être !" Une gêne, partagée par beaucoup de personnes en situation de précarité. 

Les personnes en difficulté qui vivent en milieu rural ont vraisemblablement plus de mal à franchir le seuil des associations. À la campagne, tout le monde se connaît. Le rapport à l’anonymat n’est pas le même qu’en ville. "Quand les gens qui habitent à la campagne viennent nous voir, c’est parce qu’ils sont au bout du bout, ils attendent le dernier moment" explique la présidente de l'association en Gironde, Françoise CasadebaigLe sentiment de honte est très présent. 

À la campagne, il y a le regard du voisin.

Françoise Casadebaig, présidente des Restos du cœur en Gironde

à rédaction web France 3 Aquitaine

"Ce sont des populations relativement âgées qui ont toujours travaillé et qui se sont toujours débrouillées, même avec pas grand-chose. Quand ils viennent, c'est qu’ils vont très mal. Ils sont souvent en pleurs, parfois, ils font des malaises, alors on les rassure !".


"Nos rayons sont vides"

Françoise Casadebaig espère que les dons seront aussi importants que ceux de l’année dernière. "Nos rayons sont vides. Je suis bénévole depuis 23 ans et c’est la première fois que je vois ça. À Bruges, au siège des Restos, on n'a plus un paquet de pâtes. On n’avait jamais vu autant de difficultés !". Dans ces conditions, la collecte arrive à point nommé. Et cette fois, les Restos du cœur ont besoin de tout : des pâtes, du riz, des conserves de légumes, des denrées alimentaires non périssables. Les produits d’hygiène, dont les prix ont aussi beaucoup augmenté, sont aussi très attendus. "Les personnes pensent d’abord à se nourrir avant d’acheter ces produits or, ils sont nécessaires. On a aussi besoin de couches pour bébés." L'association propose également des dons dématérialisés, à scanner en caisse des magasins.

L'objectif est de faire aussi bien que l’an dernier. En 2022, elle avait permis de récupérer 330 tonnes de produits dans les 180 magasins de Gironde. La collecte des Restos du cœur a lieu ce vendredi 3, ce samedi 4 et ce dimanche 5 mars.

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