Les maires de Bassens, Lormont, Floirac et Cenon dénoncent un abandon de l'Etat et demandent des renforts de la police nationale pour lutter contre l’insécurité grandissante. Ils regrettent aussi qu’un seul centre de vaccination ait été retenu pour toute la rive droite de Bordeaux.
Ils se sentent lésés, voire oubliés. Les maires de quatre communes de la rive droite de Bordeaux se sont réunis pour lancer un appel à l’Etat. Pour ce faire, ils ont invité la presse amrdi 19 janvier dans les locaux du Grand projet des villes, tout un symbole. Car c’est toute la politique menée localement depuis des décennies qui leur paraît aujourd’hui menacée. Ils alertent donc l’Etat pour que leurs administrés soient logés à la même enseigne que les autres habitants de la Métropole. Certains syndicats de police alertaient déjà sur la situation en juillet dernier, aujourd’hui c’est visiblement au tour des politiques de prendre le relais.
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— aqui.fr (@aqui_fr) January 20, 2021
Une centre de vaccination rive droite, contre sept rive gauche
C’est un élément qui leur paraît révélateur. Les maires de Lormont, Cenon, Floirac et Bassens s’étonnent de voir qu’un seul centre de vaccination a été retenu pour la rive droite au sens large. Trop peu selon eux, et surtout disproportionné lorsqu’on sait qu’il en existe sept pour la rive gauche de Bordeaux. Un déséquilibre à l’échelle de la Métropole qu’ils ne veulent pas laisser passer.
« Avec les autres maires de la rive droite, nous avions proposé que la clinique de Lormont puisse accueillir un deuxième centre de vaccination de manière à étaler au maximum les forces sur le territoire », explique le maire de Bassens. « Ça n’a pas été retenu. On espère pouvoir faire évoluer les choses et mettre à disposition assez rapidement un deuxième centre ».
Rive droite, un seul centre de vaccination a en effet été retenu par les services de l’Etat à la clinique du Tondu à Floirac. Alors qu’il en existe sept sur l’autre rive de la Garonne. A Bordeaux, on en dénombre 4 : à l’hôpital Saint-André, à l’hôpital Pellegrin, au Centre de santé mutualiste Gallieni, et au Centre départemental de vaccination. On en compte un autre à Pessac (Centre de santé mutualiste Gallieni), à Talence (Maison de Santé Bordeaux Bagatelle), et au Bouscat (Hôpital Suburbain du Bouscat).
« Imaginez un senior de la presqu’île, je pense à Saint-Louis-de-Montferrand, à Ambès et Bassens, qui doit se déplacer jusqu’à Floirac », appuie Alexandre Rubio. « Ce n’est pas forcement évident. Les réseaux de transport en commun ne sont pas aussi denses que ce qu’on pourrait trouver notamment rive gauche. Donc, il faut qu’on se serre les coudes là aussi et qu’on essaie de mobiliser l’ensemble des initiatives sur le territoire, et elles sont nombreuses. Là aussi, on se situe aux cotés de l’ARS et on est constructifs de manière à proposer un maximum de centres dans les jours qui viennent ».
« Nos habitants de la rive droite méritent au moins autant de considération »
« Est-ce le signe d’un abandon je ne sais pas », explique Alexandre Rubio le maire de Bassens et président du Grand projet des villes rive droite, « mais d’une présence moins importante ». « Et nos habitants de la rive droite méritent au moins autant de considération que ceux de la rive gauche, c’est une évidence ».
« D’autant que sur nos communes », poursuit l’élu, « on est présent pour accompagner les démarches à la fois de prises de rendez-vous qui ne sont pas toujours aisées pour nos seniors. Quand il s’agit de faire une démarche en ligne, on essaie de se mobiliser à leurs côtés. Il faut que les doses soient là, mais aussi que l’organisation logistique sur le territoire permette à tout un chacun de pouvoir accéder de manière facilitée au vaccin quand ils souhaitent se faire vacciner ».
Hausse de l’insécurité
Aujourd’hui la question des centres de vaccination se pose, mais depuis plusieurs mois, voire plusieurs années, une autre problématique émerge dans ces quartiers de l’agglomération bordelaise. La hausse de l’insécurité préoccupe les élus de la rive droite. Un certain nombre de tirs de mortier ont été recensés ces dernièrs mois à Mérignac, au Grand Parc mais aussi à Floirac récemment. On se souvient aussi qu’en septembre dernier un homme avait été interpellé sur cette commune après des tirs de mortier contre des pompiers et des policiers, dont six avaient été légèrement blessés.
En juillet déjà, des policiers bordelais alertaient sur cette hausse de l’insécurité. Parmi eux Jean-Louis (*), brigadier de police sur la rive droite était inquiet. « Depuis quelques mois, ça se complique de plus en plus », nous confiait-il. "Il y a une multiplication des faits de violence, de rassemblements de bandes rivales qui progressent en toute impunité. Ça devient préoccupant. Avant, quand je voulais contrôler des jeunes, ils partaient en courant", racontait Jean-Louis. "Là ils restent. Ils ont plus de répartie et d’assurance; ils nous tiennent tête. Eux (les délinquants, ndlr) ont pris de l’assurance et pas nous », se désolait-il. A l’époque, certains policiers et syndicats disaient avoir été laissés tomber par le ministère de l’Intérieur.
L’Etat appelé en renfort
Des renforts de la police nationale, une revendication beaucoup entendue ces derniers mois au sujet d’un certain nombre de communes. « Nous avons pu voir un certain nombre de faits se multiplier, je pense à la question du trafic de stupéfiants et également aux tirs de mortier qui se sont multipliés », évoque le maire de Bassens Alexandre Rubio. « L’idée des quatre maires, c’était qu’on puisse lancer cet appel de manière à dire à l’Etat qu’on a besoin de la présence de la police nationale sur nos territoires. On ne pourra pas le faire tout seuls. On a besoin des services de l’Etat".
Vous savez, quand on n’a plus rien, bien souvent c’est le service public qui est là et continue de faire ce lien.
"Et nos habitants ont besoin que, chacun à notre place (à la fois les municipalités et l’Etat), nous continuions à assurer ces liens essentiels qui nous permettent de faire société", poursuit le maire de Bassens. "C’est de ça dont nos habitants ont besoin en tous les cas ».
La nécessité d’une police de proximité
Le maire de Floirac Jean-Jacques Puyobrau, partage le constat d’Alexandre Rubio. Et comme lui, il prône le retour d’une vraie police de proximité. « S’agissant de la sécurité, si nous nous sommes là pour assurer le coté tranquillité, il nous semble qu’il est de la compétence régalienne de l’Etat d’assurer la sécurité », analyse Jean-Jacques Puyobrau. « Quand je dis ça, je ne veux pas rompre le dialogue avec l’Etat. Nous sommes prêts les uns et les autres à travailler et construire avec l’Etat des outils, des constructions susceptibles d’amener plus de tranquillité et de sérénité. Mais cela doit passer par la police de proximité qui effectivement est le parent pauvre de la politique de l’Etat. Cela fait longtemps que l’Etat a souhaité supprimer ces policiers de proximité. Je crois qu’il est temps de les ramener dans ces quartiers, de façon à ce qu’ils ne soient pas vécus comme des ennemis mais comme des moyens de lien social ».
« On conforte chacun dans nos communes le dispositif de vidéo protection », poursuit Alexandre Rubio, « mais on ne pourra pas le faire tout seul. Et on a besoin d’une présence policière sur nos territoires notamment sur le nord de la juridiction de la 4e circonscription où nous avons sur la rive droite (je pense à Lormont et Bassens) un manque cruel de présence sur le terrain".
La police nationale, quand elle vient, bien souvent ne s’arrête pas et on a besoin de ce travail de terrain et de proximité.
"On appelle de nos vœux le retour d’une véritable police de proximité, qui viendrait en complément du travail de terrain que fait notre police municipale. Mais on ne pourra pas se substituer, on ne pourra pas faire à la place de. On peut faire avec (…), mais pas tout seul". Car ce que craignent ces élus, c’est que le travail réalisé ces dernières années soit mis à mal en seulement quelques mois.
Un appel pour que le « travail accompli au cours de ces dernières années ne soit pas réduit à néant »
Ne pas revenir à une image négative de ces quartiers, c’est leur inquiétude. Les quatre maires de la rive droite qui lancent l’alerte ne veulent pas que la tendance s’inverse. « Un travail important a été accompli sur les dernières décennies par les différents maires au travers du déploiement de la politique de la Ville dans nos quartiers qui en avaient besoin pour retourner notamment l’image de la rive droite », analyse Jean-Jacques Puyobrau. « Et ce qui est à craindre aujourd’hui (…), c’est que compte tenu de l’évolution de l’intranquillité voire de l’insécurité, ce travail accompli au cours de ces dernières années ne soit réduit à néant. Cela serait la chose la plus terrible qui pourrait arriver à nos concitoyens ».
Les élus attendent une réponse rapide de l’Etat. « On ne voudrait pas que le travail de nos prédécesseurs et des municipalités précédentes, qui a permis au travers d’opérations de renouvellement urbain de valoriser et de positiver aussi l’image de la rive droite, d’améliorer les conditions de vie de nos habitants, soit mis à mal par quelques mois de grande difficulté et par un constat de retour en arrière de la présence policière sur nos territoires ».
Ne pas avoir à choisir entre prévention et lutte contre l’insécurité
Comment se répartir les tâches ? Qui doit financer la lutte contre l’insécurité ? « La réponse passe probablement par une écoute de l’Etat », avance Jean-Jacques Puyobrau. « L’Etat nous dit vous avez les moyens vous les maires d’assurer la sécurité. Je leur dit okay, nous avons les moyens si nous faisons d’autres choix que celui de la prévention, de l’éducation, de la solidarité etc. On peut effectivement « flécher » des budgets là-dessus mais ce n’est pas la posture politique que nous avons souhaité avoir. Nous pensons en effet au contraire qu’il faut investir d’avantage sur la prévention, sur l’éducation etc ». Les élus se disent prêts à travailler avec les services de l’Etat pour que la situation s’améliore.