"Je suis obsédée par la traque de ces bestioles". Envahie par les cafards, une septuagénaire lance un appel de détresse

Depuis le mois d’août, Marie-France, cohabite avec les cafards qui ont envahi son appartement. En dépit de ses alertes auprès de Domofrance, son bailleur social, la septuagénaire désespère de trouver une solution.

Société
De la vie quotidienne aux grands enjeux, découvrez les sujets qui font la société locale, comme la justice, l’éducation, la santé et la famille.
France Télévisions utilise votre adresse e-mail afin de vous envoyer la newsletter "Société". Vous pouvez vous désinscrire à tout moment via le lien en bas de cette newsletter. Notre politique de confidentialité

À 72 ans, Marie-France est épuisée. Depuis le mois d’août, cette locataire de la résidence Saint Hilaire, située à Lormont, dans la métropole bordelaise, traque les cafards. Dans son appartement pourtant, pas une miette de pain ne traîne. “Ils viennent de chez les voisins”, souffle la septuagénaire.

Pièges de fortune

Sur un petit guéridon, dans l’entrée de cet appartement, une dizaine de sprays anti-cafards sont amassés, aux côtés des pièges de plastique. “J’en ai eu pour plus de soixante euros”, souffle la locataire.

Marie-France vit ici, au troisième étage d’une des tours depuis 43 ans. “J’ai refait les tapisseries, le sol”, se remémore la septuagénaire. Aujourd’hui, la retraitée décore son appartement d’une bien différente manière.

Je prends des bouts de cartons, que j’encolle avec des gazes autocollantes et je les dispose partout dans l’appartement.

Marie-France Boutrais

locataire

Ces pièges de fortunes, Marie-France en a confectionné plus d’une vingtaine. Sur le balcon, dans la cuisine, dans sa salle de bain et même sur les murs, les petits carrés blancs attirent le regard. Et les cafards. “Ce carton est là depuis le mois d’août", lance la septuagénaire en pointant du doigt un calendrier cartonné transformé en piège.

Dessus, des dizaines de carcasses de cafards ont séché. Même constat à l’intérieur. “ Une fois avec mon voisin, j’en ai trouvé dans les serviettes de bain pliées dans mon meuble”, confie Marie-France.

"Je mange dans ma chambre"

Traumatisée, Marie-France vit depuis un calvaire. “Je mange dans ma chambre parce que je sais que si j’allume la lumière de la cuisine, je vais les voir se cacher. Je dors très mal”, explique la Lormontaise. Sous la porte de la cuisine, une serviette est scotchée à la porte “pour éviter qu’ils ne s’immiscent dans tout l’appartement”.

J’aime cet appartement. J’aimais écrire, lire… Aujourd’hui, je suis obsédée par la traque de ces bestioles.

Marie-France Boutrais

locataire

Face aux nuisibles, sa seule solution de repli : se réfugier chez ses voisins, lorsqu’elle craque. “Elle vient souvent en pleurant, on lui propose de manger avec nous. Parfois, elle dort dans la deuxième chambre”, explique Christian Mangon, un voisin. " Une fois, elle a même menacé de sauter du 18e, elle n'en peut plus".

Lors des désinsectisations, la septuagénaire doit partir plusieurs jours, le temps que les produits ne soient plus nocifs à ses poumons, déjà fragilisés par de l’asthme. Dans ses placards, la nourriture ou les produits de beauté sont enfermés dans des boites en plastique, prêts à être de nouveau déménagés.

Pas d'urgence

Malgré la fatigue et les épisodes de dépression, Marie-France se rend régulièrement au siège de Domofrance Gironde, situé à Bordeaux et multiplie les appels aux numéros du bailleur. “La gestionnaire de l’immeuble m’a dit que mon cas n’était pas urgent”, s’étrangle la septuagénaire. Seule action du bailleur social : trois désinsectisations depuis le mois d’août. “Ça ne dure que deux ou trois semaines. S’il y en a ailleurs, ils reviendront”, lui glisse un exterminateur, venu gratuitement nettoyer l’appartement, touché par la situation de la vieille dame. 

 Ils m’ont également proposé de déménager et me proposent un T2, contre un T3 actuellement. Je vis ici depuis 43 ans, je ne veux pas partir et puis avec tous ces meubles, je n’en ai plus la force.

Marie-France Boutrais

locataire

Commodités, transports, en quatre décennies, la septuagénaire a construit toute sa vie dans ce quartier de Lormont. “Je ne veux plus prendre la voiture avec mes problèmes de santé, et j’ai beaucoup de rendez-vous médicaux.”

"C'est tout le bâtiment"

Si la solidarité s’organise autour de Marie-France, la septuagénaire est loin d’être seule dans ce cas. “Ma mère, au quatrième étage, en a aussi chez elle. Nous, il y en avait encore un sur nos plaques, un autre sur le balcon. Ça commence”, appréhende Lucienne Mangon, une voisine.

À côté de chez Marie-France, les voisins ont aussi désinfecté leur logement, sans succès. “Le concierge a pu récupérer des bombes qu’il vaporise dans le hall, parce qu’il y en a régulièrement”, glisse Christian Mangon. “C’est tout l’immeuble qui est contaminé”, lâche, dépité, l’exterminateur.

"Nous ne baissons pas les bras"

Contacté, Domofrance assure prendre le problème à bras-le-corps. "C'est un problème qui touche de nombreux bâtiments, et qui s'est accru depuis la période de la Covid", explique Eric Mangiarotta, directeur de la gestion immobilière et sociale à Domofrance. Le bailleur possède d'ailleurs plusieurs contrats cadres d'envergure avec des entreprises spécialisées pour intervenir le plus régulièrement et rapidement possible.

Nous intervenons continuellement, et nous continuerons tant qu'il n'y a pas de résultat satisfaisant.

Eric Mangiarotta

Directeur de la gestion immobilière et sociale à Domofrance

Il indique d'ailleurs qu'une nouvelle intervention est prévue le 17 novembre 2023. Cette fois, plusieurs appartements seront traités. "Nous avions des problèmes pour entrer en contact avec un locataire peu avenant. Il vient d'accepter de traiter son logement", promet Eric Mangiarotta, qui souligne qu'en cas de situation grave de "santé publique", le bailleur peut contraindre plus fortement les locataires récalcitrants.

Pour autant, l'espoir de voir disparaître les nuisibles est mince. "C'est un peu utopique de penser qu'on peut totalement les éradiquer. Mais nous ne lâcherons rien tant que la population n'aura pas drastiquement réduit, au point de ne plus en être incommodant pour les locataires."

"Il faut entretenir les logements"

Outre ces interventions, Domofrance mise aussi sur la pédagogie, "seule manière de gagner la bagarre". "Il faut que les locataires entretiennent leur logement, pour éviter que ces nuisibles, qui s'immiscent dans de nombreuses cachettes et se nourrissent de la moindre miette, ne continuent à proliférer".

Alertés sur la situation de Marie-France, Domofrance devrait également prendre contact avec elle pour lui rappeler "leur accompagnement et la prise en compte sérieuse de son cas". Dans les émanations des sprays anti-cafards, la septuagénaire, profite de quelques semaines de répit. “Mais ils reviendront”, comprend-t-elle, la voix nouée d’épuisement.

Tous les jours, recevez l’actualité de votre région par newsletter.
Tous les jours, recevez l’actualité de votre région par newsletter.
Veuillez choisir une région
France Télévisions utilise votre adresse e-mail pour vous envoyer la newsletter de votre région. Vous pouvez vous désabonner à tout moment via le lien en bas de ces newsletters. Notre politique de confidentialité
Je veux en savoir plus sur
le sujet
Veuillez choisir une région
en region
Veuillez choisir une région
sélectionner une région ou un sujet pour confirmer
Toute l'information