L'imam de Pessac interpellé en vue de son expulsion, l'État dénonce des propos "haineux" tenus sur les réseaux

Moins d’une semaine après la décision du tribunal administratif de Bordeaux qui demandait à la préfecture de la Gironde de régulariser la situation d’Abdourahmane Ridouane, les autorités ont finalement interpellé le président de la mosquée de Pessac, en vue d’une expulsion.

La nouvelle a provoqué la stupéfaction à Pessac. Ce jeudi 8 août, le président de la mosquée, Abdourahmane Ridouane a été interpellé, dans la matinée, en vue d’être expulsé au Niger, son pays d’origine, information du Figaro confirmée ce jeudi 8 août par nos confrères de Franceinfo et relayée par l'avocat de l'imam dans un communiqué sur les réseaux. 

"Nous sommes scandalisés"

L’interpellation s’est déroulée tôt, ce matin, au domicile d’Abdourahmane Ridouane, sur un arrêté du ministère de l’Intérieur, datant du 5 août dernier et que nous avons pu consulter. Ce jeudi 8 août, la préfecture a donc procédé à des perquisitions.

Une interpellation qui survient après une décision du tribunal administratif de Bordeaux le 1ᵉʳ août qui avait ordonné à la préfecture de “réexaminer la demande de renouvellement du titre de séjour dans un délai d’un mois” et avait astreint l’État à une amende de 1200 euros à verser à Abdourahmane Ridouane. 

Me Sefen Guez Guez, l’avocat de l’imam de Pessac a immédiatement “saisi le tribunal administratif de Paris d’un référé en liberté afin de faire suspendre cet arrêté ministériel”, indique l’avocat, dans ce communiqué. 

Ceci devrait nous interroger sur le sens des décisions prises par l’administration et la façon avec laquelle on traite les représentants de la composante musulmane de notre pays.

Me Sefen Guez Guez

Avocat d'Abdourahmane Ridouane dans un communiqué

Ce jeudi, la décision du Ministère de l’Intérieur a donc choqué les soutiens du président de la mosquée. “Nous sommes scandalisés par le mépris des décisions de justice de la part du ministre de l'Intérieur alors que le président de la mosquée de Pessac justifie de quatre décisions rendues en sa faveur”, indique de son côté, Me Sefen Guez Guez, qui accuse le ministre de l’Intérieur d’avoir fait de l’expulsion de son client une “question de principe”. 

Une “idéologie hostile aux valeurs et institutions de la République française” 

Dans son avis d’expulsion, que nous avons pu consulter, le ministère de l’Intérieur reproche au président de la mosquée de Pessac d’afficher “de manière constante un mépris virulent vis-à-vis de l’État” qu’il décrirait comme “raciste, islamophobe et colonialiste”.

Dans le document de quatre pages, le ministère de l’Intérieur dénonce d’abord une “idéologie hostile aux valeurs et institutions de la République française” qu’il véhiculerait depuis 2015. “Il ressort une volonté manifeste de convaincre son auditoire d’une part de la dimension volontairement islamophobe des politiques de lutte contre le séparatisme en France”, illustre le ministère de l’Intérieur, qui rappelle le soutien de l’imam  “à des individus radicalisés ayant fait l’objet d’une expulsion du territoire”.

Abdourahmane Ridouane sous couvert d’une lutte contre l’islamophobie et des persécutions institutionnalisées subies par les musulmans, utilise les réseaux sociaux pour diffuser de façon récurrente une idéologie hostile aux valeurs et institutions de la République française.

Ministère de l'Intérieur

Extrait de l'arrêté d'expulsion

Les autorités dénoncent également des propos “à teneur antisémite et haineuse à l’encontre d’Israël et des juifs”. “Il tient de nombreux propos qui par leur caractère répété et sous-entendus récurrents sont de nature à attiser un sentiment de haine envers l’État d’Israël et la communauté juive ainsi que les nations qui ne prendraient pas parti pour la Palestine”, détaille le ministère de l’Intérieur, indiquant des publications sur Facebook en date du 11 octobre 2023 ou encore du 5 janvier 2024.

Dernier élément à charge dans ce document, le Ministère de l’Intérieur accuse le président de la mosquée de Pessac “d’apologie du terrorisme” et d’incitation au jihad. “Le 29 décembre 2019, il a publié sur la plage Facebook Les Alliées de la Paix un message dans lequel il a indiqué vouloir mourir pour l’islam”, indique notamment l’avis d’expulsion. Ils évoquent également une citation publiée quatre fois qui inciterait à être “sur le champ de bataille”.

Nouvel affrontement judiciaire

Pour l’État, ces motifs sont renforcés par la “très large audience”, dont bénéficie l’imam de Pessac. La décision de l’expulser viendrait enfin de son audition, du 22 mai dernier, où l’État s’inquiète qu’il ait “assumé l’ensemble de ses propos” et refuse “de reconnaitre la violence contenue dans ses propos”. 

Pour les autorités, la situation d’Abdourahmane Ridouane, résidant en France depuis 1991 et marié à une “ressortissante marocaine” et sans enfants, l’empêche de “se prévaloir des protections contre l’expulsion”. Le Ministère de l’Intérieur a donc mandaté la préfecture de Gironde pour interpeller le président de la mosquée de Pessac.

En parallèle de son expulsion, l’état a requis la saisie de ses documents d’identité sous peine de prison ainsi que le retrait de son titre de séjour.

Président de la mosquée Al Farouk de Pessac, des associations Les alliés de la Paix et Les Musulmans de Nouvelle-Aquitaine, Abdourahmane Ridouane est surveillé depuis plusieurs années par l’État. En 2022, la préfecture de Gironde avait ainsi fermé la mosquée de Pessac avant de rouvrir sur décision du Conseil d'état. Originaire du Niger, l’imam de Pessac avait également été directement visé par une procédure d’expulsion puis d’assignation à résidence. 

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