La protection de l'enfance, "une mission en extrême fragilité" : les salariés alertent sur le manque de moyens en Gironde

Le département de la Gironde doit voter son budget 2024 ce lundi 12 février. Avec des recettes en forte baisse, ses missions sociales risquent d'en pâtir. Les salariés de l'aide à l'enfance ont décidé de s'inviter à la session plénière pour alerter sur les conséquences désastreuses d'un manque de moyens dans leur secteur.

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"Il va manquer des dizaines de millions d'euros !" alerte Nicolas Mendiague. Cet éducateur spécialisé girondin et délégué CGT dans une structure d'aide sociale à l'enfance, se dit très inquiet pour l'année qui vient.

Trésorerie à sec, services menacés

"Cette mission, ô combien importante qu'est la protection de l'enfance est en extrême fragilité" prévient-il. "Le département est en difficulté financière, il manque de trésorerie et a du mal à payer les associations à qui il a délégué les missions de l'aide sociale à l'enfance".

Aujourd'hui, pour continuer de fonctionner, ces associations sont contraintes de contracter des prêts !

Nicolas Mendiague, éducateur spécialisé et délégué CGT

à France 3 Aquitaine

 Pour faire entendre la détresse des salariés du secteur, les syndicats CGT et SUD, appellent à un rassemblement ce lundi, devant l'hôtel du département, alors que les élus votent le budget 2024.

Au sein de la structure qui emploie Nicolas Mendiague, l'AOGPE (association des œuvres girondines de protection de l'enfance), deux services seraient menacés de fermeture. "Les salariés pourraient se retrouver licenciés dans les prochaines semaines, car les budgets risquent de ne pas être reconduits" affirme-t-il.

L'un des services concernés, appelé AD 'HOC, s'occupe de défendre les droits de l'enfant lorsqu'une mesure judiciaire frappe sa famille. "C'est une mission très importante, nous intervenons auprès de plusieurs centaines d'enfants à ce sujet. La direction tente de négocier depuis plusieurs semaines sur la reconduction de cette délégation. Mais nous n'avons aucune réponse". 

La Gironde face à des coupes budgétaires incontournables

Le département de la Gironde, comme les autres, est confronté à une baisse conséquente de ses recettes, du fait notamment du ralentissement du marché de l'immobilier. Les droits de mutation liés aux achats et aux ventes sont en chute libre. En 2022, ils ont rapporté 550 millions d'euros au département. En 2023, ces recettes fiscales, une des principales ressources de la collectivité, devraient à peine dépasser les 400 millions d'euros. Le manque à gagner est énorme, les coupes budgétaires incontournables.

"Comment une mission de service public peut-elle être soumise de cette manière aux fluctuations du marché ?", s'indignent les syndicats. "L'Etat doit reprendre la main sur ces missions".

Jean-Luc Gleyze, le président du département, ne dit pas le contraire. Dans le reportage qui suit, diffusé en juillet 2023, on le voit visiter une structure d'accueil dont les finances sont serrées. Il reconnaît déjà que "les moyens manquent pour arriver au bout de l'exercice". "Et nous devons aussi nous occuper des personnes âgées, des personnes handicapées, celles en insertion, nous occuper des collèges, des routes...", soulignait-il alors.

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Reportage diffusé en juillet 2023, dans une structure d'accueil du Pian-Médoc qui manque de moyens pour assurer pleinement ses missions auprès des enfants qu'elle accueille. Le président du département, Jean-Luc Gleyze, en appelle à l'Etat. ©V. Roussel, V. Piffeteau

Le président du département de la Gironde milite, lui aussi, pour une participation active de l'Etat, qui permettrait d'assurer un financement pérenne à ces missions destinées aux plus fragiles. Il l'a écrit à Emmanuel Macron.  

"On n'a pas de lisier mais on sait aussi se faire entendre"

Pour les syndicats, les choses doivent bouger très vite, l'urgence est là. "On n’a pas de lisier, mais on sait aussi se faire entendre" préviennent-ils. "Il faut redonner du sens et des moyens à ces missions". 

Ils rappellent l'article 375 du code civil : "la protection de l’enfance vise à garantir la prise en compte des besoins fondamentaux de l’enfant, à soutenir son développement physique, affectif, intellectuel et social et à préserver sa santé, sa sécurité, sa moralité et son éducation".

Qu'en est-il réellement aujourd'hui ? En Gironde, plus de 15 000 enfants, âgés de 0 à 21 ans, bénéficient de cette aide sociale à l'enfance. 5 800 d'entre eux, considérés en danger auprès de leurs proches ou victimes de carences éducatives trop importantes, sont placés en structure d'accueil. 2 500 sont accompagnés au titre de la prévention spécialisée, dans les quartiers et zones rurales.

"La protection de l'Enfance reste prioritaire"

Du côté du département, le discours se veut rassurant. La protection de l'Enfance est le premier poste budgétaire du département, "et il le restera", affirme Marie-Claude Agullana, vice-présidente chargée de la protection de l'Enfance.

"Le département a perdu des recettes, en effet, mais un arbitrage a été fait. Le budget dédié à l'aide sociale à l'Enfance va encore augmenter en 2024, de 8,3%", assure l'élue qui précise que la dotation de ce secteur prioritaire n'a cessé d'augmenter depuis 2015. "Nous sommes à + 70 %".

Il n'y a pas de services menacés, il n'y aura pas de licenciements

Marie-Claude Agullana

Vice-présidente du département de la Gironde en charge de la protection de l'enfance

Au total, 380 millions d'euros seront consacrés à ces enfants en 2024 et 97 nouvelles places d'accueil seront créées.

Marie-Claude Agullana tient à rassurer les salariés : "il n'y a pas de services menacés, il n'y aura pas de licenciements, alors que nous manquons de personnel formé et que nous avons des difficultés à recruter". 

À propos des retards de paiement aux associations, elle affirme que le problème a été réglé, "avec un peu de retard" reconnaît-elle. "Il n'est pas question de diminuer tout ce qui est en lien avec l'accueil ou l'accompagnement des enfants", maintient-elle. 

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