"Le Mpox n'est pas une nouvelle maladie." La variole du singe expliquée par un infectiologue

Le système de santé français est placé sous haute surveillance face à l'épidémie de Mpox. Le premier ministre, Gabriel Attal, a annoncé que 230 centres de vaccination sont déjà ouverts sur tout le territoire. Infectiologue au CHU de Bordeaux, Denis Malvy, nous explique les contours de la maladie. Entretien.

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La recrudescence du Mpox en République démocratique du Congo a incité l'OMS à décréter, le 14 août, une urgence de santé publique de portée internationale, l'alerte sanitaire du niveau le plus élevé. Une telle décision avait déjà été prise en 2022 lorsqu'une épidémie de Mpox, portée par un autre virus, s'était étendue à travers le monde. L'alerte avait été levée en mai 2023.

En France, on se prépare à l'arrivée du virus alors que de nombreux cas ont été enregistrés en Europe. Denis Malvy, infectiologue au CHU de Bordeaux, détaille les contours de la maladie et tient à préciser : "La situation avec le Mpox est très différente de celle du Covid-19." 

France 3 Aquitaine : qu'est-ce que le Mpox, ou variole du singe ?

Denis Malvy : Le Mpox est une maladie infectieuse zoonotique, ce qui signifie qu'elle est transmise à l'homme à partir d'un réservoir animal. Contrairement à certains virus qui mutent fréquemment, le Mpox appartient à une famille virale relativement stable, avec peu de mutations. Historiquement, cette maladie a été endémique en Afrique centrale, en particulier en République démocratique du Congo (RDC), où elle a circulé pendant des décennies, souvent confinée à des zones reculées de la forêt ou de la brousse.

Cependant, à partir de 2020, la maladie a commencé à se répandre dans des zones plus urbaines, atteignant les villages et les villes. En 2022, le Mpox a connu une expansion internationale, avec des chaînes de transmission identifiées en Europe, en France, et dans d'autres régions du monde. Malgré cette expansion récente, il est important de noter que le Mpox n'est pas une nouvelle maladie.

Quels sont les types de virus responsables du Mpox ?

Il existe deux clades principaux du virus :

Clade 1 (Afrique centrale) : Ce clade est principalement présent en République démocratique du Congo et touche particulièrement les jeunes enfants de moins de cinq ans. La transmission se fait par contact direct et rapproché, surtout dans les populations pédiatriques.

Clade 2 (Afrique de l'Ouest) : Ce clade a circulé en Afrique de l'Ouest, notamment au Nigéria, et est responsable de l'épidémie mondiale de 2022. Il s’est principalement transmis par voies sexuelles dans certaines communautés. Le Clade 2 continue de circuler de manière endémique, bien que la maladie soit généralement moins grave que celle causée par le Clade 1.

Pourquoi a-t-on changé le nom de la maladie ?

Le terme "variole du singe" est trompeur et potentiellement stigmatisant, car il suggère à tort que les singes sont le principal réservoir du virus. Or, les recherches montrent que d'autres animaux, notamment les rongeurs, sont probablement plus impliqués dans la transmission du virus à l'homme. 

Quels sont les risques et symptômes de la maladie ?

Le Mpox se manifeste principalement par des éruptions cutanées, qui commencent sous forme de lésions rouges et se transforment ensuite en vésicules puis en pustules. Les formes graves de la maladie, surtout observées chez les enfants, peuvent entraîner des complications au niveau des muqueuses buccales, rendant difficile l'hydratation.

En Afrique, où les conditions sanitaires peuvent être précaires dans certaines zones, ces complications peuvent être mortelles. En revanche, en Europe et en France, où l'accès aux soins est meilleur, ce type de complications graves est beaucoup moins fréquent.

La maladie est-elle présente en Europe et en France ?

Ce qui risque de se passer en Europe ou en France n'a rien à voir avec les zones d'émergence.  Ce ne sera pas avec la même violence et la même gravité. Oui, le Mpox est présent en Europe, mais dans une moindre mesure que dans les zones endémiques d'Afrique centrale. On observe principalement des cas sporadiques, qui touchent surtout des personnes à risque, comme les immunodéprimés ou celles présentant des comorbidités sous-jacentes. Les enfants sont également surveillés de près. Le risque d'une large propagation en Europe est considéré comme faible, grâce aux mesures de vigilance et de contrôle mises en place.

Quelle est la stratégie de lutte contre la maladie ?

La France a mis en place une stratégie de vigilance active pour surveiller et contrôler la propagation du Mpox. En cas de transmission locale, une stratégie de "vaccination en ceinture" est appliquée. Cela signifie que dès qu'un cas est confirmé, les contacts proches sont immédiatement vaccinés pour casser la chaîne de transmission. De plus, les contacts à très haut risque doivent s'isoler temporairement, pendant 7 à 10 jours, le temps de recevoir le vaccin. Cet isolement ne signifie pas un confinement strict, mais plutôt une précaution pour éviter la propagation du virus.

Les autorités françaises, en s'appuyant sur l'expérience de l'épidémie de 2022 causée par le Clade 2, ont également développé des moyens de diagnostic et renforcé la communication autour du Mpox. Les centres de référence, comme le CHU de Bordeaux, sont prêts à intervenir en cas de besoin.

La situation est-elle comparable à la crise du Covid-19 ?

Non, la situation avec le Mpox est très différente de celle du Covid-19. Le Covid-19 est une pandémie qui touche l'ensemble de la population mondiale, avec une transmission principalement respiratoire.

Le Mpox se transmet par contact direct prolongé, essentiellement de peau à peau ou de bouche-à-bouche, et non par voie respiratoire. De plus, le risque de pandémie avec le Mpox est beaucoup plus faible, car la transmission est plus lente et les cas sont plus facilement contrôlables.

Peut-on parler, à ce stade, d'épidémie ? La vaccination est-elle la solution ?

Il est encore prématuré de parler d'une épidémie de grande ampleur en France. Le Mpox est transmissible, mais dans un contexte qui reste sous contrôle. La vaccination joue un rôle clé dans la stratégie de lutte contre la maladie, en particulier pour les contacts proches des cas confirmés. Si la situation évolue, les stratégies de vaccination pourront être adaptées pour répondre efficacement à la menace.

Que faire en cas de suspicion de Mpox ?

Toute personne présentant des symptômes ou ayant été en contact avec un cas probable de Mpox doit immédiatement consulter son médecin référent. En France, des numéros d'astreinte épidémiques sont disponibles pour orienter les patients suspects. Par exemple, à Bordeaux, un service spécifique reçoit les appels 7 jours sur 7 pour évaluer les cas possibles et prévenir la propagation de la maladie.

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