"On a l'impression de ne plus pouvoir utiliser notre bon sens paysan". La lassitude des agriculteurs devant les lourdeurs administratives

Alain Duvialard, 50 ans est producteur de lait et de viande de veau dans le Médoc en Gironde. Prix bas du lait, hausses des charges et concurrence étrangère, il témoigne des difficultés de bien vivre de ce métier qu'il aime malgré tout.

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"Je commence le travail à 7 heures et je rentre souvent chez moi à 21 heures". Les journées d'Alain Duvialard sont très chargées. Un choix de vie malgré tout pour ce producteur qui nous accueille avec le sourire.  

Au milieu de 60 hectares de prairie, dans le Médoc, il vend le lait de 45 vaches mais ne décolère pas sur la faible rentabilité de cette activité. "Le lait est acheté par une laiterie entre 40 et 45 centimes le litre mais les investissements sont lourds. Suivant les importations mondiales, le prix peut chuter. Ces prix sont fixés chaque mois ou par trimestre, mais on demande des prix garantis sur plusieurs années."

Hausse des charges  

L'exploitant agricole met en parallèle également ces prix avec ceux des énergies.

Avant, avec un litre de lait vendu, on payait 3 litres de fioul. Maintenant il faut vendre 4 litres de lait pour se payer un litre de gazole non routier.

Alain Duvialard

Producteur de lait

"Electricité, fioul, GNR et granulés pour les animaux, ça ne baisse pas ou peu. Cela ne compense jamais assez les charges qui augmentent", constate-t-il. Alain Duvialard fait partie de ces agriculteurs qui ne se sortent pas de salaire. "Je compte sur le salaire de ma femme. Tout ce que je gagne part pour l'exploitation. Il faut vraiment aimer ce métier !", souligne-t-il.

Pour sortir quand même la tête de l'eau et continuer d'investir, notamment dans un hangar à 100 000 euros, le Médocain a décidé de se diversifier à partir de 2009. "Le lait ne suffit pas. Je me suis lancé dans une petite production de safran et depuis l'an dernier, je vends de la viande de veau en caissettes en circuit court. Avec tout ça, je couvre mes frais".

Concurrence

Comme beaucoup de collègues, il s'agace de voir la hausse de viande importée de l'étranger et notamment du continent américain. "On doit nourrir le peuple français, voire les Européens et en contre-partie, nos chers dirigeants ont signé des accords comme le Mercosur pour importer plus de viande ou de lait en poudre, on a du mal à comprendre", dit-il.

On ne peut pas vivre dignement et voit en plus cette viande du Brésil ou des Etats-Unis produite aussi dans des parcs d'engraissement, alors que chez nous, les bêtes se nourrissent essentiellement d'herbe.

Alain Duvialard

Eleveur dans le Médoc

 

Les fins de journées d'Alain Duvialard sont aussi trop souvent remplies de tâches administratives pour l'exploitation. "Il y a trop de paperasse, ça me fait bouillir". Et dès fois, les réglementations françaises et européennes lui paraissent ubuesques.

"Si je veux toucher à une haie, il me faut une autorisation. Si un arbre va tomber, il faudrait attendre qu'il tombe tout seul ! On a l'impression de ne plus pouvoir utiliser notre bon sens paysan", précise-t-il.

L'éleveur garde malgré tout la foi, mais a bien du mal à encourager les jeunes à s'installer dans le pays en ce moment. "Je veux bien former quelqu'un, mais je lui dirais de foutre le camp de la France ou alors de développer un circuit très court avec une petite clientèle. Notre rôle reste essentiel", conclut-il en gardant son sourire.    

 

 

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