Patrouilles de gendarmes, sécurisation des chantiers : 700 000 euros de vols sur les chantiers en 2023, "un fléau qui s'accentue"

C'est un fléau qui s'amplifie. En 2024, les vols et actes de malveillance sur les chantiers ont augmenté de 21% en Gironde. Pour prévenir les risques, des patrouilles de gendarmerie sont organisées et une convention a été signée avec les forces de l'ordre et les entreprises pour sécuriser les chantiers.

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En vingt ans, elle n'avait jamais eu à voir peur pour son chantier. En 2023, Nathalie* (le prénom a été modifié pour préserver l'anonymat) est victime de deux vols au cours du même mois, sur le terrain privé de son entreprise de réparation de matériels hydrauliques en Gironde. "La première fois, c'était juste du repérage, ils ne s'attendaient pas à voir autant de matière. Ils ont essayé de charger tant bien que mal la marchandise. La deuxième fois, ils ont été stoppés à temps", se souvient-elle.

40 000 euros

Le préjudice des vols s'élève tout de même à plus de 40 000 euros. Parmi les cibles privilégiées des voleurs, des engins de chantiers, du carburant, mais surtout des métaux comme le cuivre, qui sera ensuite fondu puis envoyé à l'étranger. 

On ne s'y attendait pas du tout sachant qu'on est quand même équipés de systèmes d'alarme.

Nathalie*

Victime de vol dans son entreprise

Quelques mois plus tard, les malfrats sont finalement arrêtés par la gendarmerie, mais le butin, lui, a disparu. "Je pense que le matériel était déjà écoulé, fondu, parti, je ne sais trop où. Ça va très vite, le réseau est bien rodé pour tout évacuer", soupire la gérante de l'entreprise. Désormais, la cheffe d'entreprise a renforcé les points d'entrée et mis en place des obstacles sur ses chantiers pour "retarder les vols éventuels".

Hausse des actes malveillants

Un phénomène qui ne concerne pas seulement l'entreprise de Nathalie*. Partout en France, les vols sur les chantiers se multiplient. Selon la préfecture de Gironde, après une légère baisse en 2023 (-13 % par rapport à 2022), "les vols et actes de malveillance sur les chantiers de bâtiment et des travaux publics augmentent depuis le début de l’année 2024 en zone urbaine (+21 % de vols par effraction)".

"Malheureusement, c'est un fléau qui s'accentue souvent quand on a une période de crise, indique Thierry Leblanc, président de la Fédération française du bâtiment de Gironde. Là, on a un secteur en tension avec une baisse de l'activité et on a une recrudescence de vols sur les chantiers. On avait déjà ça au moment de l'augmentation du coût des matières premières." En zone rurale, en revanche, les vols sur chantier, connaissent une baisse encourageante en 2024.

Les conséquences sont multiples : le vol en lui-même, une perte sèche pour l'entreprise qui n'est pas forcément assurée et toutes les dégradations pour pénétrer sur le chantier.

Thierry Leblanc

Président de la Fédération française du bâtiment

Anticiper les vols

Pour prévenir ces risques, une convention, "Ras le vol", a récemment été signée entre la préfecture de Nouvelle-Aquitaine, les forces de l'ordre et la Fédération française du bâtiment. Celle-ci vise à conjuguer les efforts pour mettre en place des actions concrètes : des réunions régulières, des visites sur les chantiers et des conseils aux entreprises. "On va aussi demander à faciliter les relations pour porter plainte et ainsi mesurer les impacts de ces vols", précise Thierry Leblanc.

À la brigade départementale de renseignements et d'investigations judiciaires (BDRIJ) de Gironde, les gendarmes ont l'habitude de travailler sur ce type d'incident. "Le but du jeu pour nous, c'est d'identifier les phénomènes en travaillant soit sur les personnes, sur les véhicules ou sur les manières d'opérer, détaille Cédric Jassaud, gendarme à la BDRIJ. Après, on fait remonter les informations aux enquêteurs pour mettre un coup d'arrêt rapide et éviter qu'ils prennent trop d'assurance."

L'année dernière, un vaste réseau de voleurs d'origine roumaine, qui dérobait du cuivre et des métaux, a été démantelé par les enquêteurs de la brigade de recherche de Langon et de Bordeaux. Une grande partie d'entre eux ont été incarcérés.

Les yeux rivés sur son écran d'ordinateur, le gendarme scrute les mouvements sur des vidéos de caméra surveillance."Des techniciens sont allés sur les lieux, ont fait des relevés d'empreinte, d'ADN, précise Cédric Jassaud. Les enquêteurs prennent ensuite le relais pour vérifier la pertinence des infos et diligentent des enquêtes et interpeller rapidement les individus."

Sécuriser les chantiers

Prévenir plutôt que guérir. C'est l'adage qu'ont choisi de suivre les gendarmes. Ils interviennent désormais en amont pour tenter de sécuriser les chantiers. "On prend le pouls du fonctionnement de l'entreprise, ses contraintes. On va se déplacer gratuitement, discuter avec le personnel sur site, et on fait des recommandations techniques", ajoute Romuald Ravaillault, adjudant de la Cellule de prévention technique de la surveillance.

Pour nous, c'est du gagnant gagnant. On a moins de plaintes et l'entrepreneur lui a moins de vols et rend le chantier dans les temps.  

Romuald Ravaillault

adjudant de la Cellule de prévention technique de la surveillance

Pour limiter les infractions, il conseille par exemple de clôturer les chantiers, les ranger "pour ne pas qu'ils attirent les convoitises depuis l'extérieur". "Ne pas faire le plein le vendredi soir, mais attendre le lundi pour ne pas avoir de stock", conseille-t-il.

En Gironde, en 2023, plus de 700 000 euros de vols de matériels et de matières premières ont été estimés. Les premières mesures de prévention seront déployées dès janvier 2025.

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