Photographie de rue à Bordeaux, le témoignage d’une époque

Corentin Nicolau est un jeune photographe girondin. Autodidacte, il s’est lancé dans une série de clichés au cœur des rues bordelaises il y a tout juste un mois et se fait déjà remarquer sur les réseaux sociaux pour son travail documentaire.

Les températures sont douces ce vendredi d’avril pour un lever de soleil sur la ville de Bordeaux. Tout de noir vêtu, Corentin Nicolau, déambule dans les rues bordelaises pour une partie de pêche à la prise de vue. Comme chaque matin, il attend que ça morde, sans garantie de succès. Une question de patience, de chance aussi. La bonne lumière, le bon personnage, le bon moment. Et clic.

« J’aime prendre les gens tout seuls parce que c’est plus difficile de raconter une histoire, de faire passer une émotion », Corentin Nicolau.

Depuis à peine un mois, Corentin s’est lancé dans une série de photographies dans les rues bordelaises. A l’heure dorée, c’est-à-dire juste après le lever et juste avant le coucher du soleil, quand la lumière est chaude et les ombres plus allongées. Des clichés d’habitants de la métropole, cadrés en pied, parfois plus large, et souvent de dos. Autodidacte, il a appris à se servir d’un appareil photo grâce à des tutoriels en ligne. « Je suis curieux, j’aime apprendre. Et puis tu vois très vite quand tu fais des erreurs. »

Le but c’est que l’appareil ne soit pas vu, pour garder le naturel.

Corentin Nicolau, photographe

Si la photographie de rue se réalise traditionnellement avec un objectif de 35mm, Corentin préfère utiliser une focale fixe de 85mm, pour prendre de la distance avec son sujet et être moins intrusif. Plus discret aussi. « L’astuce c’est de se placer avant que le personnage n’entre dans le champ, et continuer à shooter après qu’il soit passé » révèle le photographe. « Le but c’est que l’appareil ne soit pas vu, pour garder le naturel ». Capturer des scènes de vie les plus authentiques possible.

A l’aide d’un logiciel de retouche photo, Corentin désature un peu ses photos, c’est-à-dire qu’il baisse l’intensité des couleurs, « pour obtenir une lumière et des ombres assez douces et aussi aller vers des couleurs pastels, moins agressives que sur les photos très contrastées », indique-t-il.

Un projet documentaire

Les rues de Bordeaux sont quasi désertes pendant ce troisième confinement. Les personnages portent souvent des masques, ont le nez sur leur téléphone portable, se cachent derrière des lunettes de soleil ou courent après un tramway qu’il ne faut pas rater. Leur façon de vivre, de se mouvoir ou encore de s’habiller témoignent de leur époque.

Le look vestimentaire des passants attire l’œil du photographe : « C’est inconscient mais c’est vrai que je suis attiré par la mode, même des styles rock ou gothique qui ne sont pas forcément à mon goût. Il suffit qu’il y ait une attitude particulière pour que ça me plaise ».

Ça crée du lien social. Je ne m’attendais pas à ce que ce soit si puissant !

Corentin Nicolau, photographe

Corentin publie une photo par jour sur son compte @streetpixer (littéralement traduit par « photographe de rue »). Si le Bordelais compte déjà plus de 800 abonnés sur ce compte Instagram, certains ont soulevé la question du droit à l’image. L'auteur explique qu’il ne photographie ni enfant ni couple. « Si on me demande d’effacer une photo ou de la dépublier, je le fais aussitôt » promet-il. Il propose également volontiers d’envoyer la photo à son modèle si tel est son souhait. « Ça crée du lien social. Je ne m’attendais pas à ce que ce soit si puissant ! On s’accroche à ce qu’il nous reste… on cherche le lien », s’exprime-t-il.

Le village de Bordeaux

Les personnages des photos de Corentin sont régulièrement identifiés sur son compte. Les habitants se reconnaissent ou reconnaissent un ami, un collègue. « La ville est grande mais les gens se retrouvent facilement », s'étonne-t-il. Certains personnages apparaissent dans le décor, à la même heure, chaque matin ou chaque soir, comme une jeune femme avec son chien. Le toutou reconnait même le photographe et accoure lui faire des léchouilles. Cette expérience a permis à Corentin de découvrir sa ville différemment. « Avec l’appareil photo, tu regardes plus en haut, plus en bas, tu observes vraiment ce qui t’entoure », observe-t-il.

Après une première carrière en marketing et commerce, le trentenaire a profité d’une fin de contrat de chef de secteur dans la grande distribution pour tenter cette nouvelle aventure plus artistique. Il confie : « je voulais essayer autre chose qui me donnerait envie de me lever le matin ».

Ce travail de photographies de rue n’est pas lucratif et ne le sera pas. C’est une carte de visite. Et ça marche. Depuis que son projet a vu le jour, Corentin a reçu des propositions de contrat, pour photographier des mariages notamment. La création de sa micro-entreprise est en cours. Pourtant, Corentin espère continuer d’être streetpixer aussi longtemps que possible : « Ça me permet aussi de suivre mon évolution en tant que photographe ».

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