"Pro-terroriste", "rigoriste", "anti-républicain" : pourquoi l'imam de Pessac est menacé d'expulsion

L’imam de la mosquée de Pessac, en Gironde, est menacé d’expulsion. Abdourahmane Ridouane sera jugé ce vendredi 31 mai, par le tribunal judiciaire de Bordeaux. Depuis 2022, lui et la mosquée Al Farouk sont dans le viseur de l’État qui l’accuse de faire l’apologie du terrorisme.

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“Convictions religieuses rigoristes”, “positions anti-républicaines”, “pro-terroriste islamique”, les griefs de l’État envers Abdourahmane Ridouane sont multiples. Sur ces motifs, le président de la mosquée de Pessac est visé par une procédure d’expulsion. "Je ne suis coupable d'aucune violation du droit français, je n'ai mis en aucun moment la sécurité nationale. Je mène un combat pour l'égalité, à la lumière des droits que garantie la constitution française, c'est-à-dire avoir cette opinion même si elle déplait au pouvoir", rétorquait mardi 28 mai, le président de la mosquée de Pessac, auprès de France 3 Aquitaine.

Positions pro-Hamas

Très actif sur les réseaux sociaux, l’imam est visé pour ses positions pro-palestiniennes et sa “critique de la politique internationale de la France".  Dans une publication Facebook en date du 21 octobre 2023 il exprimait son “dégoût de l’Occident” dont il dénonçait “l'inaction dans le conflit israélo-palestinien”.

“Il participait également aux manifestations pro-palestiniennes chaque samedi. Meneur, il prenait la parole pour fustiger la France, sa passivité et accuser le gouvernement de collaboration”, décrit le Ministère de l’Intérieur. "Je veux déconstruire cette image de l'ennemi de l'intérieur qu'ils ont fait de moi. Cette accusation de communautarisme, c'est un prétexte pour pouvoir nous discriminer en toute légalité", regrette, de son côté, Abdourahmane Ridouane. 

Le monstre, l'ennemi de l'intérieur, est un homme de paix qui vit en toute bonne intelligence avec ses semblables.

Abdourahmane Ridouane

Président de la mosquée de Pessac

Les autorités lui reprochent par ailleurs de présenter le Hamas comme un “mouvement de résistance”, pourtant considéré comme “une organisation terroriste” par l’Union européenne. Pour preuve, elles pointent notamment un dessin, relayé quelques jours après l’attaque du 7 octobre. Celui-ci met en regard un soldat ukrainien armé, face à un char russe, avec le sous-titre “autodéfense” et un Palestinien, une pierre à la main, face à un char israélien, avec le sous-titre “terrorisme”.  

Extrait de l'interview du président de la mosquée de Pessac, mardi 28 mai 2024

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Abdourahmane Ridouane, l’imam de la mosquée de Pessac, en Gironde, est menacé d’expulsion. Il sera jugé ce vendredi 31 mai, par le tribunal judiciaire de Bordeaux. ©France télévisions

Pas d’apologie du terrorisme pour l’avocat de l’imam nigérien. “Cet acharnement n’est qu’une illustration de plus de la volonté des pouvoirs publics de faire taire toute voix contestataires dans une logique d’affichage à l’approche des élections européennes”, dénonce Me Guez Guez, dans un communiqué, le 22 mai dernier.

Fermeture retoquée en 2022

Ces publications sur les réseaux sociaux avaient déjà mené à la fermeture de la mosquée, en mars 2022, suspectée de diffuser une “idéologie salafiste”. La décision avait finalement été annulée par le tribunal administratif, puis le Conseil d'État. Me Stefan Guez Guez évoque une “redite” de ces procédures, décrivant un dossier “vide” et une “forme d’acharnement”. 

Deux ans après, la préfecture de Gironde vise le président de la mosquée pour des considérations fallacieuses, en recyclant les motivations de l’arrêté de fermeture de 2022.

Me Stefan Guez Guez

Avocat d'Abdourahmane Ridouane

L'imam est par ailleurs accusé, le 4 mai dernier, d’avoir organisé un “séminaire public et payant” sur la roqya, une médecine “prophétique utilisant la récitation de versets coraniques afin de guérir de maladies occultes comme la possession”, avance le ministère dans sa requête. “Cet événement démontre l’ancrage d’Abdourahmane Ridouane dans cette mouvance religieuse rigoriste de l’Islam et son influence prosélyte sur les religionnaires”.

Assigné à résidence

Depuis la semaine dernière, en amont du passage de la flamme olympique, Abdourahmane Ridouane, est sous le coup d’une mesure individuelle de contrôle administratif et de surveillance (Micas). Il ne peut donc, pendant trois mois, quitter la commune de Pessac et doit se rendre chaque jour au commissariat. Une mesure que l’imam a contestée, aux côtés de son avocat, ce jeudi 30 mai, au tribunal administratif de Bordeaux. La décision a été mise en délibéré.

Décrit comme une “menace d’une particulière gravité” pour la sécurité et l’ordre public, l’imam est visé, comme plusieurs personnes “condamnées pour des faits de terrorisme ou fortement radicalisées”, par la stratégie du ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin, pour les Jeux Olympiques : début mai, il a annoncé mettre en place une entrave à l’encontre de la “mouvance islamiste et jihadiste”. "Les Jeux olympiques ont bon dos", a dénoncé Me Stefan Guez Guez, rappelant que son client, contrairement à d'autres personnes visées, n'avait pas d'antécédent judiciaire.

Dans la nuit du samedi 25 au dimanche 26 mai, la mosquée de Pessac avait été victimes de tags racistes, pour "la 7ᵉ fois depuis 2015", rapporte Abdourahmane Ridouane.

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