Une avocate à la tête de l'Ecole Nationale de la Magistrature pour la " dépoussiérer" dit le Garde des Sceaux

Le ministre de la Justice Eric Dupond-Moretti nomme une femme avocate à la tête de cet établissement installé à Bordeaux et qui forme l'ensemble des magistrats français. Une école qui "encaste les jeunes gens dans un moule dont ils ne sortiront jamais" avait-il écrit en 2018 alors avocat.

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C'est une première pour l'institution bordelaise. Nommer une femme, surtout une avocate, à la tête de l'Ecole Nationale de la Magistrature, le Garde des Sceaux voulait marquer les esprits en choisissant quelqu'un qui n'est pas issue de la magistrature. Nathalie Roret est une avocate pénaliste, vice-bâtonnière du barreau de Paris. Et elle a une mission " dépoussiérer " l'institution selon les mots du ministre Eric Dupont-Moretti. " Une femme d'exception " a-t-il précisé.

Lors de sa conférence de presse ce lundi 21 septembre, le Garde des Sceaux a regretté de ne pas avoir le temps d'opérer d'une refonte totale. " Je ne renonce certainement pas à ouvrir davantage cette école. L'ouverture c'est d'abord rompre avec les traditions surranées, c'est rompre avec la tentation du vase clos et de l'entre-soi, c'est vouloi r réfléchir et débattre autrement qu'entre pairs. Des efforts ont déjà été faits mais ils méritent d'être amplifiés. " La nouvelle directrice Nathalie Roret a ainsi sa feuille de route.  

Une école dans le viseur d'Eric Dupont-Moretti

C'est une institution qu' Eric Dupont-Moretti critique et il ne s'en est jamais caché. Dans un livre écrit en 2018, celui qui était alors un ténor du Barreau affirmait que l'ENM devait être purement et simplement fermée, car "incapable" de former correctement les futurs magistrats.
Désormais Garde des Sceaux, il n'est plus question de supprimer cette Ecole Nationale de la Magistrature qui a vu le jour en 1958 à Bordeaux. Et par où sont passés tous les juges et procureurs français pour apprendre leur métier. "Le ferment d'un corporatisme" dénonçait-il.

Le principal syndicat des magistrats, en conflit ouvert avec le garde des Sceaux depuis sa nomination, a vivement réagi ce matin après cette nomination :
" Il va falloir qu'elle découvre le métier de magistrat et l'école, qui a un rayonnement international " a déclaré Céline Parisot Présidente de Union syndicale des Magistrats ( USM ) sur Francetvinfo juste après les annonces du Garde des Sceaux. 

La secrétaire nationale du syndicat, par ailleurs magistrate au parquet de Bordeaux, Marie-Noëlle Courtiau, ne mache pas ses mots : " On peut appeler ça une révolution, il n'y a jamais eu un non magistrat nommé à sa tête." 
Aux reproches faits par Eric Dupont-Moretti de l'entre-soi, elle répond : " L' absence d'ouverture et l'entre-soi est loin de la réalité de l'ENM et depuis sa création.  

La culture de l'entre-soi n'existe pas. La formation des magistrats est ouverte vers l'extérieur et la moitié des magistrats de France vient de profession autre. 

Marie-Noëlle Courtiau - magistrate à Bordeaux, secrétaire nationale de l'USM

L'ENM aussi défend sa diversité

Les personnels de l'ENM se sont exprimés par voie de communiqué de presse, prenant acte de l'annonce du ministre. Ils ont tenu à éclairer aussi sur leurs pratiques au cours du cursus puisque le Garde des Sceaux a regretté lors de sa conférence de presse l'ouverture de l'ENM sur l'extérieur : 
" En formation initiale, l’ENM forme environ 500 élèves magistrats parmi lesquels des professionnels en reconversion, dont le recrutement s’est considérablement diversifié. Les auditeurs de justice sont notamment accueillis dans les cabinets d’avocats. Leur formation vise à développer la culture du doute, leur capacité à prendre des décisions en toute indépendance, et à acquérir l’ensemble des règles déontologiques indispensables à la conduite de leurs missions au service de la Justice. 70% de leur temps de formation est consacré à des stages de terrain, en prise directe avec les réalités du pays." Voilà qui est précisé. 

A écouter ► Nomination d'une femme avocate à l'ENM > conférence de presse du Garde des Sceaux lundi 21 septembre 2020 


Une réforme de leur école risque de tendre un peu plus leurs relations déjà houleuses avec le ministre. 
La magistrate du parquet de Bordeaux et syndicaliste de l'USM Marie-Noëlle Courtiau y voit là une mesure de diversion après la récente décision du ministre. 
La semaine dernière, deux syndicats s'étaient émus de l'ouverture d'une enquête administrative visant trois magistrats du parquet national financier (PNF), alors qu'un rapport de l'Inspection générale de la justice avait pourtant largement dédouané l'institution.
Le PNF avait été mis en cause pour avoir épluché les relevés téléphoniques détaillés de ténors du Barreau - dont Eric Dupond-Moretti - pour identifier qui aurait pu informer l'ancien président Nicolas Sarkozy et son avocat Thierry Herzog qu'ils étaient sur écoute, dans une affaire de corruption.
L'Union syndicale des magistrats et le Syndicat de la magistrature ont dénoncé "une attaque inédite" de l'institution judiciaire et une "tentative de déstabilisation" du PNF dans une lettre ouverte adressée au président de la République.
 
L'Ecole Nationale de la Magistrature accueille 500 nouveaux élèves par an. La moitié d'entre eux sont des personnes en reconversion professionnelle, souvent d'anciens avocats, juristes ou fonctionnaires. 
Elle assure également la formation continue des 8000 magistrats en exercice.

    
 
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