L’arthrose est la 2e cause d'invalidité, après les maladies cardiovasculaires. Ces chiffres augmentent progressivement au prorata du vieillissement de l’articulation, mais aussi de l’augmentation de la fréquence de l’obésité. Quelles recommandations pour moins souffrir?
Invité plateau : Pr Thierry Schaeverbeke, chef du service de rhumatologie, pôles des spécialités médicales - groupe hospitalier Pellegrin - CHU de Bordeaux
Date de diffusion : lundi 25 septembre 2017
L’arthrose est une maladie très fréquente : on estime qu’elle affecte environ 10 millions de personnes en France. Elle motive plus de 13 millions de consultations médicales par an, 17 millions de prescriptions médicamenteuses, nécessite la mise en place de 140 000 prothèses de hanche et 40 000 prothèses du genou par an.
Qu’est-ce que l’arthrose ?
L’arthrose est une maladie dégénérative de l’articulation, qui associe une dégradation progressive du cartilage (surface de glissement qui recouvre les extrémités osseuses qui se font face), des modifications de l’os sous-chondral (partie de l’os sur laquelle repose le cartilage) et de la membrane synoviale (la membrane qui tapisse l’ensemble de l’intérieur de l’articulation non recouvert par le cartilage).
Schématiquement, la destruction progressive du cartilage augmente les contraintes mécaniques qui s’expriment sur l’os sous-chondral. Celui-ci réagit en se densifiant et en fabriquant des excroissances osseuses à la périphérie de l’articulation, que les médecins appellent ostéophytes, et que l’on nomme communément becs de perroquet. Les produits de dégradation du cartilage abimé sont résorbés par la membrane synoviale, créant une inflammation locale qui provoque un excès de fabrication de liquide synovial. C’est ce que l’on appelle un épanchement de synovie.
Ces phénomènes altèrent progressivement la fonction de l’articulation. Ils sont responsables de douleurs articulaires mécaniques, qui surviennent à l’effort et se calment au repos, puis d’une gêne fonctionnelle de plus en plus marquée.
L’arthrose n’est pas synonyme de vieillissement
L’image de l’arthrose est associée au vieillissement, ce qui est une idée en grande partie inexacte. S’il est évident que la probabilité de dégradation du cartilage articulaire augmente avec l’âge, le vieillissement est loin d’être le seul facteur favorisant l’arthrose.
Le cartilage est un tissu vivant, qui se renouvelle tout au long de la vie. Des troubles métaboliques peuvent perturber ce renouvellement naturel. Ainsi, l’obésité représente un facteur majeur de dégradation du cartilage, et pas uniquement du fait de la surcharge mécanique que génère le surpoids : l’arthrose des mains est deux fois plus fréquente chez les sujets obèses ! On a montré que le tissu adipeux produit un excès de substances délétères pour le cartilage, les adipokines.
L’excès de sollicitations mécaniques peut bien sûr favoriser l’arthrose, telles que le port de charges lourdes, une pratique sportive excessive.
Des traumatismes articulaires peuvent également être à l’origine de lésions du cartilage qui dépassent ses capacités de réparation. C’est ainsi qu’une lésion traumatique d’un ménisque du genou chez un jeune sportif induit l’apparition d’une arthrose du genou une dizaine d’années plus tard.
D’autres facteurs favorisent l’arthrose. La composition du cartilage, pour des raisons génétiques par exemple, expliquant que des arthroses précoces s’observe volontiers chez plusieurs membres d’une même famille.
On voit donc que l’arthrose n’est pas la simple conséquence du vieillissement. C’est une maladie complexe qui fait intervenir des causes multiples, qui s’ajoutent bien souvent les unes aux autres.
Comment fait-on le diagnostic d’une arthrose ?
Le diagnostic d’arthrose est suspecté par le médecin sur des éléments cliniques : douleur mécanique d’une articulation, apparaissant progressivement à l’effort et s’atténuant au repos, douleur reproduite à la mobilisation de l’articulation, à la pression de l’interligne articulaire, diminution de la mobilité articulaire…
Le diagnostic est confirmé par les examens d’imagerie, notamment la radiographie qui montre le pincement de l’interligne articulaire (zone radio-transparente qui sépare les extrémités osseuses qui se font face, correspondant à l’épaisseur du cartilage), condensation de l’os sous-chondral, présence de becs de perroquet.
Comment traite-t-on l’arthrose ?
Il n’existe malheureusement aucun traitement médical permettant de restaurer un cartilage malade.
Les traitements de l’arthrose se limitent à la prise en charge palliative des douleurs induites par l’arthrose : antalgiques simples, anti-inflammatoires non stéroïdiens, injections intra-articulaires de corticoïdes ou d’acide hyaluronique.
La prise en charge physique (rééducation, kinésithérapie, exercices de gymnastique d’entretien) est essentielle pour ralentir la progression de la maladie et limiter ses conséquences. Dans l’arthrose du genou par exemple, l’entretien des mobilités articulaires et la stabilisation de l’articulation par le développement d’une bonne musculature de la cuisse sont des éléments majeurs dans la prévention de l’aggravation des lésions.
Lorsque les dégâts articulaires sont trop importants et que le niveau de handicap le justifie, le remplacement articulaire par une prothèse est l’ultime solution. Ces prothèses permettent le plus souvent d’obtenir une sédation complète des douleurs et de récupérer une fonction satisfaisante.
En l’absence de traitement médical curatif, l’idéal serait bien sûr de prévenir l’arthrose, en luttant par exemple contre l’obésité et la sédentarité, en limitant la sur-sollicitation des articulations dans les activités professionnelles ou sportives…