François Bayrou devient Premier ministre. Emmanuel Macron a nommé le maire de Pau et patron du MoDem, ce vendredi à la mi-journée, après de longues consultations pour succéder à Michel Barnier. Une nomination qui n'emporte pas l'adhésion de la gauche, alors que le Rassemblement national demande des garanties au nouveau locataire de Matignon.
L'attente est finie. Plus d'une semaine après la censure de Michel Barnier et de son gouvernement, Emmanuel Macron vient de nommer un successeur. François Bayrou, maire de Pau et patron du MoDem, devient Premier ministre. Le 4ᵉ nommé par le président de la République depuis le début de l'année 2024. En Aquitaine, les réactions ont été immédiates.
"Un choix contraire à l'expression populaire" selon LFI
Pour le député girondin Loïc Prud'homme (LFI), "pas de surprise, rien de neuf sous le soleil". L'élu dénonce une nomination "dans la continuité de tout ce que nous combattons depuis le début du mandat d'Emmanuel Macron. C'est un Premier ministre de droite, pour mener une politique de droite, commandée par un président de droite." Son groupe "défendra les mêmes positions" que précédemment.
Selon lui, il s'agit d'un "choix contraire à l'expression populaire qui s'est dévoilée au mois de juillet dernier, lors des élections législatives, disant : "On ne veut plus de cette politique". Il rappelle que le Nouveau Front Populaire est arrivé en tête, en nombre de sièges obtenus, à l'Assemblée Nationale.
Si monsieur Bayrou voulait mettre fin à cette tradition macroniste du non-vote de confiance du Premier ministre, alors à ce moment-là, la discussion d'une motion de censure pourra exister.
Loïc Prud'hommeDéputé LFI en Gironde
En réaction à la nomination de François Bayrou, la cheffe de file des députés insoumis Mathilde Panot a immédiatement annoncé l'intention de La France Insoumise de voter la censure. "Le problème est qu'aucun des Premiers ministres des gouvernements d'Emmanuel Macron ne demande un vote de confiance à la suite de leur déclaration de politique générale. Donc, pour savoir ce que l'Assemblée pense de ces Premiers ministres, la seule solution est d'avoir une motion de censure", considère Loïc Prud'homme.
Le RN veille à ses "lignes rouges"
Du côté du Rassemblement national, une rupture avec la politique macroniste est aussi attendue. "Il n'a pas de majorité pour cela, balaie Edwige Diaz, députée en Gironde. Nous attendons d'être reçus prochainement. Au cours de ce rendez-vous, nous lui rappellerons les lignes rouges du RN qui n'ont pas été entendues par Monsieur Barnier, avec les conséquences que l'on connaît", réagit-elle, en citant notamment "la levée des freins à la compétitivité des entreprises", la contribution de la France au budget de l'UE ou encore la situation des agriculteurs.
Nous attendons de monsieur Bayrou qu'il construise un budget de compromis en prenant en compte les forces politiques issues des dernières élections législatives.
Edwige DiazDéputée RN en Gironde
Le groupe politique d'extrême droite ne devrait pas censurer le gouvernement que formera Bayrou. Le président du parti, Jordan Bardella, a signalé qu'une censure aurait été engagée "à l'encontre d'une personnalité issue de la gauche ou de l'extrême gauche". "Je pense que le vote de la motion de censure du gouvernement Barnier aura servi de leçon aux politiques qui pourraient mépriser nos attentes, qui sont le reflet de nos 11 millions d'électeurs", ajoute Edwige Diaz.
Bayrou, un homme de "consensus" ?
Murmurée depuis plusieurs jours, finalement remise en doute ce vendredi matin, la nomination de François Bayrou a joué avec le suspens jusqu'à l'annonce officielle. "Comme quoi, il faut se méfier des pronostics ! Je ne m'y suis jamais livré. J'ai attendu la décision du président de la République et, je trouve, que ce choix va donner toutes ces chances à notre pays pour avancer", songe Thomas Cazenave, ex-directeur adjoint du cabinet d'Emmanuel Macron au ministère de l'Économie.
Il y a une urgence, je le vois bien comme député à l'Assemblée : doter notre pays d'un budget. Michel Barnier est tombé là-dessus, la priorité de François Bayrou devra être de sortir de cette impasse.
Thomas CazenaveDéputé EPR de Gironde
Le député Ensemble pour la République de Gironde estime que le patron du MoDem "a toutes les qualités pour réussir". "C'est un homme de dialogue. Une qualité indispensable dans le moment qui est le nôtre, celui de trouver des consensus pour que le pays avance. Je le soutiens dans sa mission qu'il va devoir prendre à bras-le-corps", insiste-t-il, en appelant à "sortir du blocage" et de "l'incertitude dans laquelle la motion de censure a jeté le pays".
"Pas de participation" au gouvernement Bayrou pour les socialistes
À la sortie d'une réunion avec son parti, le député des Landes et président des socialistes à l'Assemblée nationale, Boris Vallaud, a réagi : "Les résultats du 7 juillet dernier auraient dû conduire le président de la République à nommer un Premier ministre de gauche. C'est la proposition que nous avons faite et qui a été manifestement récusée."
Dans un communiqué publié en début d'après-midi et signé par l'élu landais, le Parti Socialiste a annoncé "ne pas participer" au gouvernement Bayrou et rester dans l'opposition au Parlement. "Les socialistes se battront avec toute la gauche pour obtenir des avancées utiles à la vie quotidienne de nos compatriotes dans la fidélité aux propositions défendues devant les électeurs avec le Nouveau Front Populaire", lit-on.
En nommant à Matignon l'un de ses proches, Emmanuel Macron prend le risque d’aggraver la crise politique et institutionnelle ouverte avec la dissolution. Il appartient au Premier ministre de nous dire comment il entend répondre à l'aspiration des Français et changer de cap dans la politique qui a été conduite.
Boris VallaudDéputé PS des Landes
Dans leur communiqué, les socialistes demandent également à François Bayrou de "renoncer au 49.3" en échange d'une non-censure. Ils exigent "la garantie que le gouvernement ne se placera en aucune manière sous la dépendance du Rassemblement national, ni ne prendra à son compte son programme xénophobe".
Chez Les Républicains, regret du gouvernement Barnier
Le sénateur Max Brisson regrette la censure du gouvernement Barnier. "En matière d'agriculture, nous étions prêts à travailler à une proposition de loi pour lutter contre la surtransposition des directives européennes et à soutenir le travail d'Annie Genevard pour aider les agriculteurs", assure l'élu Les Républicains dans les Pyrénées-Atlantiques.
François Bayrou s'est imposé au président de la République comme l'homme de la situation. Celui capable de faire une synthèse des attentes des uns et des autres. A lui de le prouver maintenant.
Max BrissonSénateur LR dans les Pyrénées-Atlantiques
Une réunion entre les sénateurs LR et les cadres du parti doit se tenir ce vendredi en fin de journée. En ligne de mire : la composition du futur gouvernement, à laquelle va devoir s'atteler rapidement François Bayrou. "Si les engagements pris par Michel Barnier se poursuivent, il est possible que nous répondions aux propositions du Premier ministre. Si ce n'est pas le cas, notre participation sera remise en cause", insiste Max Brisson.
Le parti a plusieurs dossiers à défendre. Le sénateur cite, parmi les plus importants selon lui : "l'assouplissement du zéro artificialisation net et celui de la loi climat et résilience", "la maîtrise de l'immigration" ou encore "la lutte implacable contre l'insécurité grandissante".
Les deux hommes ont eu l'occasion de se croiser dans les Pyrénées-Atlantiques. Max Brisson était conseiller général, lorsque François Bayrou présidait le conseil départemental. "Je le connais bien, mais je ne sais pas comment il répondra à nos attentes. Je ne souhaite qu'une chose pour le pays, c'est que mes doutes soient levés", conclut le sénateur.