La Matmut a décidé de ne pas renouveler son contrat. L’assureur ne veut plus apparaître sur le fronton de l’enceinte sportive. C’est une perte financière conséquente qui fait craindre le pire pour les finances du stade.
La rétrogradation des Girondins de Bordeaux en Nationale 2 n’en finit pas de faire des victimes collatérales. Après le licenciement de la grande majorité des salariés du club à cause du redressement judiciaire, la mutuelle d'assurance, qui donnait son nom au stade de 42 000 places dans lequel jouaient les Marine et Blanc depuis 2015, a décidé de ne pas renouveler son contrat de naming.
1,9 million d'euros par an en moins
La compagnie d’assurances a fait savoir qu’elle n’irait pas au-delà de juillet 2025. "La situation du stade, et notamment l’absence d’une visibilité conséquente récurrente, n’a pas permis de bâtir un projet de nouvel accord satisfaisant pour les parties" a expliqué l’entreprise à l’AFP.
C'est bien la preuve que cette affaire, dès le départ, est un fiasco économique.
Pierre HurmicMaire de Bordeaux
C’est un coup dur pour SBA, la société qui gère le stade. Elle va perdre le montant de cette manne financière qui s'élève à 1,9 million d'euros par an. C’est aussi une mauvaise nouvelle pour son propriétaire, la Métropole de Bordeaux qui hérite déjà des loyers impayés.
Pierre Hurmic, le maire de Bordeaux, et premier vice-président de la Métropole, qui a toujours dénoncé la construction de cette enceinte, est fataliste. Si la fin de ce partenariat est un manque à gagner, il n’est pour autant pas une surprise. "C’est une pierre de plus qui montre que le modèle économique n'est pas viable. Entre la ville et la métropole, nous perdons tous les ans 11,3 millions d'euros".
La Métropole ne vendra pas à n’importe quel prix et dans n’importe quelles conditions
Christine BostPrésidente de Bordeaux Métropole
En septembre 2024, le loyer versé par les Girondins de Bordeaux, était déjà passé de 4,7 millions d'euros annuels à quelques dizaines de milliers d'euros de frais techniques par match.
"Si on intègre les 4,7 millions d'euros du loyer des Girondins, qui est payé actuellement par la métropole, SBA perd effectivement de l'argent. Mais la Métropole et la ville de Bordeaux en perdent aussi énormément. C'est bien la preuve que cette affaire, dès le départ, est un fiasco économique. Je m’honore d’être l’un des rares élus à s’être battu contre ce trop grand stade" ajoute Pierre Hurmic.
"Nous y étions un peu préparés"
Christine Bost, la présidente de la métropole, est plus mesurée. "Nous y étions un peu préparés. La situation sportive des Girondins Bordeaux n’a pas facilité le fait que Matmut reste le partenaire du stade. On va sûrement avoir besoin de remettre à plat l’ensemble du modèle, de ce partenariat public privé (PPP) qui a été conclu il y a quelques années de façon peut-être un peu rapide".
Reste que le stade est devenu un gouffre financier. Pierre Hurmic estime que la situation exige de le vendre. De son côté, Christine Bost n’exclut pas cette hypothèse, mais "pas à n’importe quel prix ni dans n’importe quelles conditions".
Selon un spécialiste, un partenaire local peut se lancer
Pour Guillaume Gouze, consultant au pôle étude économique du CDES de Limoges, le tableau n'est pas si noir. "Tout est possible dans le football et l'économie des stades : un partenaire peut venir et accoler son nom au stade. Mais à quel montant ? Et quel partenaire ?" s'interroge-t-il.
Pour qu'un naming soit concluant, "plusieurs facteurs clés de réussite" existent selon lui. Il cite par exemple "la communauté locale, les valeurs et le début d'une aventure". Pour lui, "ces cases sont cochées" pour le club des Girondins.
"On peut imaginer un partenaire local qui se dit : on est au début d'une histoire chez les Girondins, avec un outil bien implanté" poursuit-il, rappelant que "la rentabilité se fera sur le long terme".
Un gouffre financier
La présidente de la Métropole de Bordeaux se fixe désormais deux objectifs : préserver la santé financière de la collectivité territoriale et faire que cet équipement soit le plus exploité, le plus utilisé possible. "C’est un équipement emblématique pour notre territoire. Il faut pouvoir lui donner une vie intense".
En 10 ans d’exploitation, le stade n’a jamais été bénéficiaire, à l’exception de 2023 grâce à la Coupe du monde de rugby et cinq grands concerts à guichets fermés.
Cette année 2024, les Jeux Olympiques et les demi-finales de Top 14 n’ont pas permis de combler le vide laissé par la descente des Girondins en 4ᵉ division. Sans remontée rapide en Ligue 1, il paraît difficile d’envisager un nouveau sponsor pour un stade qui affiche un déficit de 20 millions et demi d’euros.