Un vaste trafic international de cigarettes contrefaites représentant 77 tonnes jugé à Bordeaux : 20 prévenus à la barre

Vingt membres présumés d'un réseau international d'importation de cigarettes contrefaites en provenance d'Europe de l'Est sont jugés à partir de lundi 8 janvier devant le tribunal correctionnel de Bordeaux à partir de 14 heures. Il s'agit d'un vaste trafic portant sur 77 tonnes en 2020, soit environ quatre millions de paquets.

Des cigarettes de contrebande sont régulièrement interceptées par les douanes françaises, notamment dans notre région, à la frontière avec l'Espagne. Cette fois, les autorités ont mis la main sur un trafic "d'une grande ampleur" mettant en cause des individus russophones.

Le procès "des petites mains"

Renvoyés devant le tribunal correctionnel de Bordeaux, ils sont soupçonnés d'avoir approvisionné plusieurs villes françaises en cigarettes produites en Slovénie, imitant notamment la marque Marlboro, avec une marge estimée à 20 millions d'euros par le fabricant Philip Morris, qui se porte partie civile.

Originaires d'Ukraine, d'Arménie, de Géorgie ou encore de Bosnie-Herzégovine, ils doivent répondre du délit d'importation ou de vente frauduleuse de tabac en bande organisée et, pour certains, de blanchiment aggravé. Ils encourent 10 ans d'emprisonnement ainsi qu'une amende pouvant s'élever jusqu'au décuple de la valeur de la fraude.

Dix-neuf des vingt mis en cause comparaissent libres. Pour l'avocat du barreau de Bordeaux, Maître Christian Blazy, qui défend un père et son fils nés en Arménie, les suspects sont "des petites mains".
"Mon client est grossiste et il récupérait des cigarettes qu'il rachetait à des trafiquants russophones pour ensuite les revendre à Bordeaux et ailleurs à bas prix."

Aujourd’hui, le tabac est tellement taxé que les fumeurs ne peuvent pas suivre et se rabattent sur des cigarettes à moitié prix.

Maître Christian Blazy

Avocat de prévenus

L'avocat bordelais déplore que les têtes du réseau soient absentes à ce procès. "On a vraiment le bas du trafic. Les quantités vendues sont considérables, mais pas leur rémunération. Et ceux qui sont tout en haut, naturellement, ne se déplacent pas et ne viennent pas en France ".
L'avocat trouve au passage "surprenant" de voir Philip Morris se prévaloir du statut de partie civile," sûrement pour défendre le manque à gagner lié à la vente de ce poison ".

L'audience débute lundi 8 janvier 2024 à 14 heures.

Cigarettes en provenance de Slovénie

Selon le parquet de Bordeaux, les cigarettes étaient acheminées en camion depuis la Slovénie avant d'être stockées dans des box en France. Achetée environ 13 euros, la cartouche était revendue deux fois plus cher par les malfaiteurs, soit environ un quart du prix de vente de l'époque sur le marché français. Ce réseau, "particulièrement mobile" d'après le parquet, a ainsi alimenté le trafic de cigarettes dans les villes de Nantes, Bordeaux, Montpellier et Béziers. "L'enquête et les éléments de preuve recueillis permettent d'établir que le trafic a permis l'importation en contrebande de 77 tonnes de cigarettes entre octobre et décembre 2020 ", estime le ministère public.

En avril 2021, une première opération centrée sur les revendeurs grossistes aboutit à l'interpellation de sept individus en France, conduisant à de premières mises en examen devant la juridiction interrégionale spécialisée (JIRS) de Bordeaux.

Tabac de contrebande en hausse

En coordination avec les autorités judiciaires slovènes, des perquisitions ont eu lieu en janvier 2022 dans plusieurs sites de production en Slovénie, "abrités dans des hangars discrets situés dans des localités reculées", indique le parquet. Elles ont permis de saisir plus de 26 tonnes de tabac brut, 29 millions de filtres à cigarettes ainsi que plusieurs machines de fabrication. "Ces volumes illustrent l'ampleur de la contrebande de cigarettes contrefaites en Europe", ajoute le parquet.

En 2022, les douaniers français ont saisi près de 650 tonnes de tabac de contrebande, une hausse de près de 60 % en un an.