Une importante partie de la forêt des Landes de Gascogne a brûlé cet été. Faut-il la replanter à l'identique ou privilégier des espèces plus résistantes ? Des scientifiques internationaux se livrent à des expérimentations pour imaginer la forêt de demain.
Lorsqu'ils partent en forêt la glacière à la main, ce n'est pas dans l'optique de pique-niquer. Menés par Sylvain Delzon, écophysiologiste de l'Inrae, (l’Institut national de la recherche agronomique) les scientifiques prévoient de prélever des échantillons de pins maritimes sur la commune de Guillos en Gironde. Ce sont ces petits morceaux de troncs qui seront soigneusement conservés dans la glacière.
Evaluer les chances de survie des arbres après l'incendie
La parcelle visitée, partiellement calcinée, est un laboratoire à ciel ouvert pour les chercheurs. Sylvain Delzon, donne les consignes : "on prend deux échantillons par arbre, un du côté du feu où c'est brûlé, et un autre, là où le feu a moins impacté le tronc". L'objectif est de vérifier si les cellules de l'arbre sont toujours vivantes. C'est ainsi qu'ils pourront définir les chances de survie de l'arbre.
La chercheuse Yanjun Song est venue de Chine pour assister à cette expérience, une première en son genre. "Cette année il y a eu beaucoup de feux de forêt en Chine. Je vais pouvoir exporter cette technique apprise ici", se réjouit-elle.
Etablir des préconisations
Les échantillons prélevés sur le terrain sont ensuite analysés en laboratoire, sur le campus universitaire de Pessac. L'occasion pour les scientifiques de préciser leur verdict. "On voit très bien en vert les cellules vivantes. Là, cet arbre a toutes ses cellules vivantes actives, il n'y a aucun problème", commente Sylvain Delzon devant son écran d'ordinateur. Mais ce n'est pas une généralité. L'échantillon suivant, lui révèle l'ampleur de l'atteinte, avec un arbre brûlé sur son intégralité.
Ce qu'on recommande c'est de couper les arbres qui ont subi des dégâts au niveau du système racinaire, et tous les arbres qui ont des dégâts au niveau du houppier (au sommet de l'arbre ndlr).
Sylvain Delzon, écophysiologiste de l'Inraeà France 3 Aquitaine
Définir l'espèce la plus résistante
Les chercheurs étudient également la résistance des arbres à la sécheresse. Des échantillons sont placés dans une machine agissant comme une centrifugeuse. "L'idée, c'est de voir à quel point la branche arrive à faire circuler l'eau à travers ses vaisseaux, et à quel moment on va avoir des pertes au niveau de la capacité à conduire l'eau à travers la branche", explique Deborah Corso, chercheuse en écophysiologie à l'université de Bordeaux.
Une fois identifiées, ces espèces plus résistantes que les autres sont plantées, à titre expérimental. Depuis le mois de mars, 18 000 arbres ont été plantés dans le sud Gironde. C'est ici que se prépare la forêt de demain, la plus adaptée aux conditions météorologiques des prochaines décennies : d'ici 2 100, on doit s'attendre à subir une hausse de la température de 4°C. Et à ce stade, selon les scientifiques, le grand "champion" en terme de résistance à la sécheresse est le pin maritime de provenance de Barcelone.