Des dizaines de millions de volailles ont déjà été abattues en Europe, dont deux millions en France, lors de cette dernière épizootie. Le gouvernement s'est fixé ce 22 décembre l'objectif de lancer la première vaccination de volailles à l'automne 2023, pour les canards. Pour certains, l'enjeu est, en ce moment, de défendre un modèle d'élevage en plein air, notamment au pays basque.
En France, du 1er août au 21 décembre, 3,3 millions d'animaux ont déjà été abattus, dont une moitié de canards. Deux millions l'ont été rien qu'en décembre, selon le ministère de l'Agriculture.
"L'objectif que je fixe, c'est un objectif de pouvoir passer la saison 2023-2024 avec un vaccin, une stratégie vaccinale", a affirmé le ministre de l'Agriculture, Marc Fesneau, lors d'un déplacement auprès de représentants du secteur agricole à la Roche-sur-Yon (Vendée), ce 22 décembre.
D'ici là, il faut œuvrer à "sauvegarder le patrimoine génétique de la filière" et s'assurer que les indemnisations "aillent suffisamment vite pour ne pas tellement affaiblir les trésoreries, que des gens soient obligés d'arrêter leur activité", a insisté M. Fesneau.
Pas de vaccin avant 2023
À ce stade, il n'existe aucun vaccin suffisamment efficace, disposant d'une autorisation de mise sur le marché, et encore moins de réglementation européenne autorisant la vaccination.
Selon le calendrier présenté jeudi, les premiers résultats des expérimentations en laboratoire devraient être connus autour de mars 2023.
À la même période, l'Agence nationale de sécurité sanitaire (Anses) sera tenue de présenter différents "scénarios de vaccination pertinents".
L'État français tâchera alors de définir sa stratégie vaccinale, de chiffrer son coût, et de déterminer qui paiera.
Cinq vaccins sont aujourd'hui disponibles dans le monde, et un seul dispose d'une autorisation de mise sur le marché en Europe pour les poules, selon l'Anses. Or, elle date de 2006, "et la souche vaccinale (...) n'a pas été actualisée depuis".
Cinq pays européens se sont lancés dans la course au vaccin, et la plupart des résultats des expérimentations devraient être connus au premier trimestre 2023. Deux laboratoires français dont Ceva travaillent sur un vaccin pour les palmipèdes (canards), tandis que les Pays-Bas planchent sur un vaccin pour les poulets, et l'Italie pour les dindes.
Reste toutefois le risque que certains pays importateurs refusent d'acheter des volailles ou produits issus d'oiseaux vaccinés, craignant que le vaccin "masque" la présence de la maladie et que le virus se diffuse ensuite chez eux "à bas bruit". Un arrêt des exportations de volailles françaises représenterait 500 millions d'euros de perte pour le secteur. La France devra donc mener des négociations bilatérales avec ses partenaires commerciaux pour leur faire accepter d'importer des poulets vaccinés.
La résistance au pays basque
En attendant, la survie des élevages et des métiers se jouent encore cet hiver 2022/2023. Et parmi les levées de boucliers, c'est la claustration qui fait l'objet de critiques par des éleveurs des Pyrénées-Atlantiques qui expliquent que de telles mesures ne devraient pas concernent leurs élevages.
Alors que les contrôles de l'État et mises en demeure se multiplient depuis un mois, une trentaine d'entre eux n'ont pas hésité à se mettre hors-la-loi.
Comme Patrick Dagorret, producteur de canards - Syndicat ELB. "Je risque une amende de 700 euros par canard (...) Soit j'arrête et.. qu'est-ce que je vais dire à mes enfants ? Soit, je me bats pour faire reconnaître mon modèle d'élevage".
La pire épizootie
L'épizootie de grippe aviaire est la "plus dévastatrice" qu'ait connue l'Europe de toute son histoire, ont estimé, ce 20 décembre, les autorités sanitaires européennes, avec plus de 50 millions d'oiseaux abattus dans les seuls élevages infectés entre octobre 2021 et septembre 2022.
L'accélération de la propagation du virus est liée non seulement à la baisse des températures, mais aussi à la "forte activité migratoire des oiseaux sauvages", indique le ministère.
Mais la France ne peut agir seule en matière de vaccin, et son plan dépend d'autorisations aux niveaux européen et international. Une réglementation européenne autorisant le principe de la vaccination "devrait entrer en application fin février", selon le gouvernement, alors qu'il y a seulement un an, "professionnels et parties prenantes y étaient frontalement opposés".