En mettant en place des barrières de sécurité, avec également l'aide de certains maires et de la Fédération, les écoles de surf ont pu reprendre le chemin de l’océan. En attendant la période cruciale que représente l’été, elles enregistrent leurs premières réservations.
Il suffit de croiser le sourire de Lou, petit parisien de 7 ans, pour comprendre le bien que prodigue ce cours de bodyboard sur la plage de la Salie à La Teste-de-Buch. Aujourd’hui, grâce à la complicité de son professeur, il a pris son premier « tuyau ». Comprenez son premier tube. Irrésistible raccourci. Quelques secondes magiques qui repoussent à mille lieux les souvenirs parfois pénibles du confinement. Les enfants s’amusent, les parents sur le bord de la plage soufflent enfin, quant aux moniteurs cette reprise leur apporte un brin d’optimisme dont beaucoup avaient besoin.
« Ça redémarre, on a des conditions de vagues super sympas en ce moment , si le covid nous laisse tranquille on a de quoi faire une belle saison », sourit Laurent Rondil, le président du Comité départemental de surf.
« Ça repart » au niveau des réservations
L’activité du club Ocean Roots basé à Arcachon a donc repris. Depuis jeudi dernier, et les annonces d’Edouard Philippe, le cahier de réservation a été rouvert. Avant cette date, il était resté fermé. Car le téléphone ne sonnait plus.
"Depuis vendredi, on a enregistré une cinquantaine de réservations pour cet été", explique Julie Padois. « Ils ont tous réservé leur maison, du coup j’ai enregistré une cinquantaine de réservations", explique Julie Padois.
" Une famille a même mis 12 enfants pour la semaine du 10 août. Ça explose. Les gens n’hésitent plus et on sent qu’ils ont envie de se faire plaisir".
À Lacanau, Adrien Valéro, à la tête de la Magic Surf Scool, est plus mesuré. " Depuis jeudi, j’ai eu une dizaine de réservations pour juillet et août . Ça n’explose pas pour l’instant mais on sent que les gens recommencent à réserver. Depuis l’annonce du virus, on n'avait eu aucune réservations, rien. Là, on recommence a recevoir des mails, depuis jeudi ça repart, ce sont à 80% c’est des gens qui sont déjà venus."
Régles de sécurité
Pour respecter les mesures barrières et proposer une activité en toute sécurité, les modes de fonctionnement ont dû être revus. Le staff d’Océan Roots a même participé à la réflexion menée avec la Fédération Française de surf pour voir quels principes instaurer par rapport Covid 19. Les locaux ont par exemple été équipés de vitres en plexi. Dans ces deux écoles de surf, les clients doivent mettre un masque à l’accueil et dans les espaces communs. Mais fini le transport collectif.
" Les clients viennent chercher leur combinaison au local ", explique Adrien Valéro, " et ils nous retrouvent après sur le spot de surf à la plage Sud ". À Arcachon aussi, les parents déposent les enfants directement à la plage. Seuls les enfants d’une même famille peuvent monter dans les 4X4 du club.
Une fois dans l’eau, rester à un mètre de l’élève n’est « pas compliqué ». Sauf pour les plus petits : " Les parents savent et on a leur accord, pour le reste c’est bon, pour les grands on peut être à plus d’un mètre facilement ", précise Julie Padois.
Vient maintenant l’étape de la sortie de l’eau. Si les combinaisons ont de tout temps été lavées après leur utilisation, avec la crise sanitaire, les procédés ont été étudiés et renforcés par la Fédération.
Trempage plus long, parfois changement du type de produit utilisé. " Avant c’était les clients qui rinçaient eux-mêmes leur combi. Maintenant c’est nous qui le faisons, ça demande plus de manutention, plus de temps, mais je suis parfaitement en accord avec cette nouvelle manière de faire ", explique Adrien Valéro qui fait tremper les combinaisons dans un produit spécifique après chaque session. Julie Padois aussi a mis en place ce système : 30 mn dans du « bacterless », une solution contre les bactéries.
" On fera pas banqueroute, c’est ça l’important "
Pendant le confinement Ocean Roots a enregistré près de 40 000 euros de pertes. " Nicolas, le directeur, nous disait tout le temps qu’il fallait être prêt en cas de marée noire ", relate Julie Padois en charge notamment de l’administratif au club. Cette année, ce ne sont pas des boulettes de mazout qui ont généré la crise. La surprise est venue d’ailleurs. De là où on l’attendait pas. Mais la trésorerie sur laquelle le club a pu s’appuyer l’a sûrement sauvé.
De son côté Adrien Valéro, lui n’avait " pas trop de réserves ". " On a fait un PGE (prêt garanti par l’Etat) de 25 000 euros. J’avais contracté ce prêt avant de savoir qu’on pouvait reprendre l’activité, mais je ne le regrette pas car je sais qu’on va pas faire une saison normale. Ça servira donc pour l’école ou pour me permettre de vivre en me versant un petit salaire ". L’entrepreneur individuel a créé cette école de surf en 2014. Il n’a qu’un salarié, un moniteur saisonnier. " Ça va le faire " dit-il optimiste.
Après on va pas faire une saison normale, faut pas se leurrer, mais déjà on fera pas banqueroute et c’est ça l’important. Il faut que notre entreprise reste sur les rails.
Adrien Valéro
Il faut dire qu'à Lacanau, Adrien Valéro a pu reprendre son activité rapidement. " J’ai beaucoup d’habitués bordelais qui sont venus dès le 16 mai donc j’ai eu pas mal de monde à la réouverture. Je remercie le maire, Laurent Peyrondet, de s’être battu pour la réouverture de la plage et d’avoir autorisé les écoles de surf à enseigner, car certaines municipalités avaient rouvert les plages mais pas autorisé les écoles de surf à enseigner. Je remercie aussi l’association des écoles de surf de Lacanau, avec qui on a fait un vrai travail pour proposer un projet commun au maire ".
Toutes les écoles de surf n’ont pas joui du même contexte. Elles qui sont tributaires des communes. " À Grayan-et-l’Hopital, il y a eu changement de maire, mais la nouvelle équipe n’a pas pris ses fonctions ", explique Laurent Rondil, le président du Comité Départemental de surf de la Gironde. " L’équipe sortante n’a pas fait le nécessaire, pour une reprise d’activité le 11 mai. Le dossier n'a pas été déposé par la mairie à la préfecture ". Une lenteur qui n’a pas été sans conséquence pour l’école de surf et le club de la ville implantée sur la plage du Gurp.
" Personne n’a mis la clef sous la porte "
" Nous avons tout fait pour que les activités libres et encadrées puissent reprendre dès le 11 mai ", explique le président de la Fédération Française de Surf Jean-Luc Arassus. " Et nous avons été jusqu’au bout de la démarche car il était important de profiter de la période du 11 mai au 2 juin pour tester les nouvelles modalités d’accueil et de travail. On a donc échangé avec tous les clubs par le biais des comités et des ligues. J’ai eu des infos de terrain grâce à ça ". Le club Ocean Roots a d’ailleurs participé à cette réflexion." Beaucoup se sont fait surprendre le 11 mai et se sont donc calés sur un calendrier plus prolongé ", analyse Laurent Rondil, président du Comité départemental de surf de la Gironde. " Là toutes les structures ou presque ont repris leurs activités parfois de manière progressive. Le para-surf, c’est plus compliqué avec les gestes barrières, on a donc mis en stand by en attendant l’allègement des protocoles. "
Mais l’horizon clairement s’éclaircit, et la période de confinement n’aurait à priori pas entraîné la fermeture de certaines structures. En Gironde, on compte 21 clubs associatifs, et 25 écoles labellisées FFS. Sans compter les autres écoles comme la Magic Surf School de Lacanau. " Pour le moment, nous n’avons noté aucune fermeture en Gironde " informe Laurent Rondil. Même son de cloche du côté de la Fédération, " à notre connaissance personne n’a mis la clef sous la porte ".
La Fédération Française de Surf remercie la @PrefAquitaine33 et tous les maires des communes concernées, pour le soutien et l'action qui vont permettre le retour à l'océan ce samedi en Gironde. #LaPlageDynamique https://t.co/Brgp9r2arG
— Fédé Française Surf (@SurfingFrance) May 14, 2020
L’été et ses incertitudes
Les mois de juillet et août seront décisifs. " Je pense qu’on va faire au moins pareil que l’été dernier, mis à part pour les étrangers ", analyse Julie Padois. " Certains pays demandent une quarantaine au retour, du coup ça complique leur venue. En revanche, beaucoup de Français qui avaient prévu d’aller aux USA par exemple réservent du coup à Arcachon et veulent visiter la France et des coins qu’ils ne connaissent pas. Ce qu’on va perdre en étranger on va le gagner en Français qui vont rester en France ".
L’activité est relancée, mais une part d’inconnue demeure dans l’esprit d’Adrien Valéro, notamment concernant la présence de ces étrangers cet été. Il est moins optimiste que sa consoeur. " Je ne sais pas, on a une grosse clientèle allemande anglaise, suisse et belge. On s’interroge sur est-ce qu'ils vont venir? Une chose est sûre. Si les Français ne peuvent pas partir, les étrangers ne pourront pas venir ».
Selon le comité départemental, c’est au Nord du département que les étrangers seraient habituellement les plus présents. Ils représenteraient 50% de la clientèle au Nord, 30% au Sud. " J’ai une grosse inquiétude par rapport de la clientèle étrangère si elle est absente du territoire cet été. Il y a beaucoup de revirements, on entend tout et son contraire " se désole Laurent Rondil. " Il faut croiser les doigts pour que les Français qui ne partiront pas à l’étranger compensent la clientèle étrangère ", dit-il. Même espoirs du côté de la Fédération. Globalement 80% des recettes annuelles seraient réalisées en juillet et en août.
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