Le combat d’une mère pour sa fille autiste révèle la détresse des parents confrontés au handicap

Aïcha Ghembaza a dû se mettre en grève de la faim pour s'opposer au refus du centre de loisirs de Gradignan d’accepter sa fille, Louise, 13 ans, autiste profonde

L'an dernier, Louise, accompagnée d’un AESH (accompagnant d'enfant en situation de handicap), fréquentait quelques heures par semaine un centre de loisirs de Gradignan.

Elle pouvait y côtoyer d’autres enfants et rompre un peu son isolement. L’occasion aussi pour la maman qui la scolarise à la maison, de souffler un peu.

En septembre 2021, la famille de Louise souhaite que la jeune fille poursuive avec le centre pour ados. Mais la ville refuse son inscription.

Le fonctionnement de cet établissement, dans un cadre d'accueil flexible avec des horaires décalés (...) n'est pas compatible avec les possibilités de Louise. Les locaux n'étant pas clos, se posait également la question de la sécurité de l'adolescente

Mairie de Gradignan

Aïcha la maman dénonce une discrimination et un manque de volonté de la commune.

Désespérée, elle a entamé une grève de la faim lundi.

La mairie a proposé un rendez-vous avec la famille pour étudier les possibilités d'accueil de Louise au centre de loisirs et faire un point sur la situation. Aïcha a pour le moment suspendu sa grève de la faim.

Je veux simplement que ma fille puisse participer à quelques activités. Qu’elle puisse être avec ses pairs de temps en temps. Louise aime le contact avec les autres, il lui fait du bien.

Aïcha Ghembaza, maman de Louise

Une petite victoire donc pour Aïcha qui rappelle que la loi handicap de 2005 oblige les structures d’accueil comme les établissements scolaires à accepter les enfants porteurs de handicap.

Mais cette loi se heurte à un manque de candidats.

Des centaines de familles aquitaines manquent d’un accompagnant pour leur enfant. 

 

Derrière ce manque c’est tout le système de l’inclusion qui révèle ses failles.

Fin août, juste avant la rentrée, la Défenseur des droits Claire Hédon, a alerté l'Etat concernant le manque d’AESH, dans un rapport qui pointe de nombreux dysfonctionnements de l'école dite « inclusive ».

 

Un salaire peu attractif pour les AESH

Malgré une revalorisation début 2022 la grande majorité des AESH ont des contrats de 24h/semaine, pour 800 euros par mois.

Ils sont pour la plupart en poste dans plusieurs établissements parfois éloignés les uns des autres.

Le rapport pointe par extension les difficultés du temps périscolaire, comme la cantine, où les intervenants sont rémunérés par les collectivités locales.

Des AESH seraient partantes pour couvrir le temps périscolaire mais on affecte quelqu'un d'autre car cela ne dépend pas du même budget et des mêmes acteurs, au détriment de l'intérêt supérieur de l'enfant qui a besoin de stabilité.

Claire Hédon, défenseur des droits

Une formation professionnelle pas au niveau

Le rapport de la Défenseure des droits recommande aussi une meilleure formation et une évaluation systématique des compétences des AESH. 

« Les accompagnants sont souvent contraints de se former eux-mêmes sur le terrain auprès des enfants et par leurs propres moyens ».

 

Un manque de formation des accompagnants, qui prive les parents  d'un appui éclairé face au handicap de leur enfant.

Maintes fois confrontée à cette impasse,  Aïcha a crée une chaine youtube et une page Facebook où elle donne des conseils autour du handicap : adapter sa maison, trouver du matériel, effectuer les démarches admiratives…

En quelques semaines, les demandes affluent. La mère de famille se retrouve débordée. 

Ce n’est pas à moi de faire cela, ce n’est pas mon rôle. Les parents sont désespérés, ils doivent gérer leur enfant handicapé mais doivent en plus se débrouiller avec ce parcours du combattant administratif.

Aïcha Ghembaza

Aïcha est aussi contactée par des professionnels de santé, des gérants de structure ou des enseignants, qui font face à des problèmes de recrutement et de formation.

 

Le rapport évoque un besoin urgent de formation pour les enseignants car il rappelle que l'attribution d'un AESH n'est « ni un préalable, ni une condition à la scolarisation de l'élève ».

En clair, les profs doivent pouvoir accueillir des enfants en situation de handicap dans leur classe, même sans AESH. 

30% d'enfants autistes scolarisés sans aucun accompagnement

En 2021, 20% des saisines du Défenseur des droits relatives aux droits de l’enfant, concernent des difficultés d’accès à l’éducation d’enfants en situation de handicap.

A la rentrée 2021, 30.140 élèves en situation de handicap étaient scolarisés en inclusion en Nouvelle-Aquitaine.

Parmi eux, 28% reçoivent l’aide d’un AESH (à temps plein ou partiel), 42% ont une aide mutualisée (plusieurs enfants/ados pour un AESH) et 30% ne bénéficient d'aucun AESH

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