Le jeune homme est pompier volontaire à Soulac-sur-mer et originaire de Lesparre dans le Nord Médoc. C'est dire qu'il connait bien la forêt qu'il a avoué avoir incendiée à de nombreuses reprises. En Nord Médoc, on est soulagé mais stupéfait du profil de cet incendiaire présumé qui était pompier volontaire.
Trente et un départs de feu ont été recensés dans le Nord Médoc entre le 27 juillet et le 21 août. Certains étaient accidentels mais la plupart avaient une origine criminelle. Une piste qu'ont suivie les enquêteurs jusqu'à l'interpellation du jeune homme de 19 ans. Il a avoué la plupart des départs de feu.
L'incendiaire présumé est un étudiant originaire de Lesparre, engagé auprès des pompiers volontaires de Soulac-sur-mer, qui n'ont pas souhaité s'exprimer sur cette affaire en cours. Pourtant, d'après nos informations, une partie de sa famille fait également partie du corps des pompiers. D'où la stupeur depuis son arrestation.
Effectivement, sa qualité de pompier, comme ses origines locales lui ont permis de se déplacer, voire d'agir sans être tout de suite soupçonné. Pour les Médocains, riverains et responsables politiques, c'est le soulagement et la stupeur.
Pour Gérard Massé, président depuis 8 ans de la DFCI Soulac-Le Verdon après 30 ans chez les pompiers en tant que volontaire à Soulac, "On y pense tous. Au départ des feux, on s'est dit qu'il connaissait bien le secteur et on a commencé à se suspecter les uns les autres ! Je suis content que cette personne ait été arrêtée mais déçu pour l'institution. Ça va être très difficile pour eux de se relever de cette épreuve". Une déception également de découvrir qui était l'incendiaire : "ses parents sont pompiers à Soulac".
Il veut pourtant positiver car les propriétaires ne sont plus inquiets, tout comme les chasseurs, qui , un temps, voulaient se mobiliser... "c'est normal, au bout d'un moment quand on voit sa forêt qui brûle".
Mais il reste tout de même dubitatif pour une chose, car les feux sont assez éloignés pour un même pyromane : "personnellement, je ne le vois pas mettre le feu à Vensac... L'avenir nous le dira. Il y a peut-être un autre pyromane... Mais ça, c'est mon avis personnel".
Des maires soulagés
Xavier Pintat, le maire de Soulac-sur-mer, se dit bien-sûr soulagé de cette interpellation :"Il a reconnu beaucoup d'incendies, la plupart, mais je ne sais pas si tout a pu être solutionné. C'est vrai que cette arrestation est surprenante puisqu'il s'agit d'un pompier volontaire et que, malheureusement, ce n'est pas un cas unique en France".
Quant à la personne incriminée, il hésite "je connais un peu la famille", mais reste discret "je ne connais pas le détail de l'enquête" mais "on se connaît un peu tous, ici".
Il est également apaisé par cet épilogue car le bilan aurait pu être pire : "C'est intervenu au pire moment pour notre station (...), en période de canicule mais également au moment où la ville de Soulac passe de 3000 à 50 000 habitants ! Donc les forces de sécurité sont mobilisées et à la limite des forces. (...) Pour la population c'est source d'angoisse".
"Mais je ne veux pas que ça (cette interpellation d'un pompier volontaire, NDLR), occulte le travail des pompiers qui, j'ai pu le constater, ont fait un travail remarquable ! Il y a notamment deux feux qui auraient pu très mal se passer, c'était en période de canicule avec le vent,... Dans notre malheur, on a eu de la chance d'avoir les Canadair, et puis les Dash et les hélicoptères,... et la chaîne de solidarité des bénévoles".
Il souligne aussi le travail des enquêteurs, le "fait que les gendarmes aient mobilisé des spécialistes des feux de forêt, une équipe spécialisée qui a mené une enquête qui a abouti..."
"Il faudra tirer une leçon de tout ça. La chaîne de sécurité a été parfaite, de solidarité,... mais il faut penser à la suite. La défense contre les incendies nécessite une restructuration de la forêt, des passes, pare-feu, pour pas que l'on tourne à des catastrophes dans les années à venir".
Bernard Guiraud, le maire de Lesparre, souffle lui aussi. "Ça nous a fait réfléchir. C'est que le début, ça nous arrivera d'autres fois, je ne veux pas être pessimiste... Je disais à mes collègues, il faut vraiment qu'on s'organise sur un plan d'urgence général".
En tant qu'ancien sapeur-pompier professionnel, il a déjà vécu des moments similaires, comme la découverte d'un incendiaire dans les rangs. "Je sais très bien de quoi je parle et dans notre jargon, lors des incendies, on se disait avec les pompiers "y'a quelqu'un qui craque, c'est pas possible !" (...) Heureusement, c'est une très petite minorité. Mais le pire c'est que souvent, on n'a pas de doute sur la personne (...) D'expérience, quand c'est arrivé et qu'on a fait le débriefing on se dit qu'on avait aucun élément qui nous laissait penser que cette personne était un pyromane. (...) Ça touche toute la profession, donc forcément, on le ressent mal". Concernant les pompiers de Soulac : "ils sont malheureux les pauvres".
Concernant le présumé incendiaire de 19 ans, il marque également la surprise : "c'est même étonnant à cet âge-là. Bien connaître la forêt, ça s'apprend pas en deux jours. (...) C'était dans plusieurs secteurs. Ça aurait été dans le même... S'il est chasseur, il peut connaître le coin où il chasse certainement parfaitement. Mais après, c'est Vensac, Soulac, Queyrac, c'est pas les mêmes communes. Moi ça m'interroge quand même (...) Après l'enquête le dira. Il en a avoués pas mal mais je ne sais pas si tous les feux ont été résolus".
En attendant, il se dit soulagé de cette arrestation suite à ce "crime" car "le nombre d'hectares qui ont brûlés, c'est impressionnant" car "même sur Vensac, 100 hectares. On minimise par rapport à Landiras ou La Teste mais 100 ha, pour la profession, ça commence à être un beau feu".
Quinze ans de prison
L'incendiaire présumé, un étudiant de 19 ans originaire de Lesparre et pompier volontaire à Soulac-sur-Mer, a été placé en détention provisoire ce dimanche 28 août. Il est soupçonné d'être à l'origine d'une trentaine d'incendies déclarés depuis le 29 juillet dernier dans le Nord-Médoc.
Placé en garde à vue le 26 août dernier à 7h40 par les enquêteurs de la Brigade des recherches de Lesparre-en-Médoc, il a reconnu une partie des faits qui lui sont reprochés. Il a réitéré ses aveux devant le juge qui l'a mis en examen pour : "Destructions par incendies de bois, forêts, landes, maquis ou plantations d’autrui pouvant causer un dommage aux personnes (29 faits) et destructions du bien d'autrui par un moyen dangereux pour les personnes (2 faits d'incendie volontaire de bottes de paille dans des fermes.)"
Conformément aux réquisitions du parquet, il a été placé en détention provisoire. Il encourt une peine de 15 ans d'emprisonnement.