Pompier volontaire incendiaire dans le Médoc : "Il n'y a aucun mobile crapuleux, d'intention de nuire", selon son avocate

Un jeune pompier volontaire, soupçonné d'être à l'origine d'une trentaine d'incendies, a été incarcéré fin août. Il a reconnu la plupart des faits qu'il n'explique pas. En attendant, dans les forêts du Médoc, on pense à la suite, pour éviter de futurs incendies, malgré le malaise parmi les pompiers.

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C'est dans un contexte un peu plus apaisé que Me Florence Herbold accepte de répondre à nos questions. Les feux en Gironde ne font plus la Une de l'actualité et son client a pu être incarcéré, loin de Bordeaux, dans une prison de Nouvelle-Aquitaine. Un éloignement voulu par l'avocate et compris par le juge d'instruction car, à la prison de Gradignan, il aurait pu côtoyer des gens d'ici. Aussi parce que "son jeune âge implique quelques précautions".

Ce type de pulsion et la jeunesse de l'incendiaire renvoie la juriste vers le souvenir d'un autre jeune incendiaire. "J’avais défendu, il y a trois ou quatre ans, un jeune homme (...) qui avait mis le feu au gymnase de Mérignac, je trouve qu’ils ont des profils à peu près similaires". 

Le jeune pompier volontaire incarcéré cet été est accusé d'être responsable d'une trentaine de départs de feu en juillet et août. Il encourt jusqu'à 15 ans de réclusion.

"Dépassé par son geste"

Le jeune homme de 19 ans qui était alors pompier volontaire à Soulac a été interpellé à la fin du mois d'août. Son avocate était à ses côtés lors de sa présentation devant le juge d'instruction. "A ce moment-là, il n'était pas en état de répondre, mais il reconnaît facilement les faits qui lui sont reprochés. À l’exception de quelques uns", rapporte l'avocate, sans pour autant préciser les faits en question, qui "relèvent du dossier". 

"La première fois que je l’ai rencontré, j’ai été très surprise parce que j’avais l’impression d’avoir un enfant en face de moi : un jeune homme de 19 ans qui a l’air tout à fait candide, avec beaucoup de gentillesse, beaucoup de douceur".
A ce moment-là et encore aujourd'hui, "il ne comprenait pas ses pulsions ni son geste. Il était incapable d’expliquer pourquoi. Il était plein de compassion pour les gens qui pouvaient avoir été blessés par ses actes. Il avait l’air complètement dépassé par son acte, incapable de dire pourquoi. Mais il se disait en grande souffrance par rapport à ça".

Expertise psychologique

Pour l'avocate, c'est ce qui reste à explorer : l'étude de la personnalité mais surtout son profil psychologique. "C’est bien évidemment ce qui a été ordonné par le juge d’instruction", "c’est tout le travail du psychiatre et des psychologues qui va nous permettre d’éclairer son geste", ajoute-elle.  
Des expertises qui devront déterminer quelle était alors sa capacité de discernement. Car ces départs de feu ont eu pour conséquences des destructions de biens, d'hectares de forêts, avec le sentiment qu'elles auraient pu être bien pires. Mais, affirme  l'avocate "il n’y a aucun mobile crapuleux. Aucune intention de nuire. Aucune vengeance ni aucune envie de causer un préjudice à qui que ce soit. C'est juste de l'ordre de la pulsion... C’est quelqu’un qui n’a aucune conscience de ce qui le fait agir... Et je le crois tout à fait sincère". Par ailleurs, sans casier judiciaire, le jeune homme est inconnu des services de police ou de gendarmerie.

La famille en soutien

Alors pourquoi ces mises à feu ? Avait-il, peut-être malgré lui, besoin d'attirer l'attention en étant acteur de ce qui occupait tout le monde à ce moment-là.

"C’est ce qui est particulier dans le dossier. Il appartient à une famille qui combat le feu et, lui, déclenche le feu. Donc je pense que l’expert psychiatre va nous donner les clés pour comprendre. Je ne pense pas qu’il soit fasciné par le feu. C’est le monde dans lequel il grandit puisque ses parents lui en parlent au quotidien".

Aussi, c'est particulièrement difficile pour sa famille. L'interpellation, l'incarcération du jeune homme mais aussi le motif. "C'est une famille formidable" estime l'avocate qui explique qu'ils ont su faire la part des choses. "Ils sont soutenus par leurs amis et leurs collègues. Ils condamnent très sincèrement cet acte. Mais ils sont là parce que ce sont les parents et qu’ils aiment leur enfant".  D'après elle, ils ont été très clairs sur leur positionnement : "nous restons tes parents, mais tu vas devoir maintenant t’expliquer devant la justice pour ce que tu as fait".

Assises ou correctionnel ?

Le chef d'accusation de destruction par incendie de forêts et destruction du bien d'autrui par un moyen dangereux pour les personnes, relève de la cour d'assises, même si l'avocate espère "que ce sera correctionnalisée en cours d’instruction", selon les résultats des rapports des experts et "si il y a une altération du discernement au moment des faits". 
D'ici un mois, Me Herbold devrait faire une demande de liberté. D'ici-là, il s'agit pour elle de "prévoir comment on va l’insérer à l’extérieur de la prison", trouver "un hébergement, un travail ou une formation pour lui, qu'on ait un suivi psychologique". Le procès n'est pas pour tout de suite, d'autant plus qu'il vaut sans doute mieux que le temps passe pour essayer de dépassionner les débats.

Un sujet difficile à aborder pour les acteurs de la forêt

Passer à autre chose, c'est aussi ce que souhaitent les acteurs de la forêt. Forestiers, pompiers, chasseurs et bénévoles. Plusieurs réunions et débriefings ont été organisés après les incendies.  explique qu'il y a eu des réunions et débriefings après les incendies.  "On a mutualisé nos moyens depuis la Pointe de Grave jusqu’à Lacanau", explique Gérard Massé, de la DFCI de Soulac. Il a fallu repenser les accès en forêt : "vérifier les points d'eau, les passages à reprendre..." 

Et l'ambiance ? Qu'elle est-elle ? Quid du jeune pompier volontaire incriminé  : "on n'en a pas parlé". On sent que le sujet est encore difficile à aborder. Même si la pression médiatique est retombée, l'ambiance à la caserne de Soulac est forcément pesante, d'autant plus que les interventions se font rares désormais : " Je pense que c’est quelque chose qui doit, de temps en temps, ressortir (...) avec la pression de leur hiérarchie qui leur dit qu'il ne faut rien dire. Des fois, ils peuvent mal le vivre".

Ce qui n'empêche pas de bien travailler selon lui "mais on ressent qu’il y a quand même encore un malaise qui est latent. Ils n'ont pas fait le deuil de cette histoire mais ça, c’est leur histoire, ce n'est plus la nôtre". Et de conclure "après, on laisse faire la justice".

Un après dans la forêt

L'heure est semble-t-il à l'apaisement, que ce soit parmi les usagers de la forêts, les chasseurs ou les propriétaires. Aussi parce qu'il reste des choses à remettre en état après le passage des camions... "Ca s’est calmé. Par contre, on a une prise de conscience ce qui s’est passé et de ce qui pourrait se reproduire. Plus de personnes viennent me voir pour le débroussaillement, Comment je peux faire ? Avec qui je travaille ? Les gens prennent conscience que ça pourrait arriver chez eux"

Alors, Gérard Massé est tout à son rôle d'informations et de préventions des incendies de forêt, il rappelle à chacun de se conformer au code forestier et pense déjà à la saison suivante, en toute sécurité.

En savoir plus sur les obligations du Code forestier :

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