Les équipes du SDIS n'ont jamais arrêté leurs interventions durant le confinement, même si elles ont changé drastiquement de nature. Confrontés, eux-aussi, au manque de matériels de protection, les pompiers ont dû réorganiser leurs procédures et équipements pour assurer quand même leur mission.
"C'est vrai que, nous aussi, jusqu'au dernier moment, même au sein des troupes, comme les Français, on y a pas cru... Jusqu'au confinement... Et là, pour nous, ça a beaucoup changé...!"Le Caporal Sébastien Dephot, du syndicat autonome, revient sur ces jours qui, pour chacun, ont été le début du basculement dans ce quotidien de confinement.
Il raconte que du jour au lendemain, les interventions ont changé. Leur nombre a été divisé par deux " On appelait plus pour de la bobologie", mais d'un seul coup, il n'y avait presque que des "interventions covid", avec le stress que cela pouvait engendrer.
Pas "en première ligne"
"Nous, depuis le début, on n'a pas été considérés comme "en première ligne". Côté masque, aucun SDIS de France ne faisait partie des "stocks d'Etat".Pour les premières interventions, il explique :A ce moment là, on n'avait pas trop le recul. Ni nos médecins, ni notre hiérarchie.
C'était le flou. On partait un peu à l'aveugle. Par exemple, on intervenait sur un malaise, et on pouvait très bien tomber sur une personne avec un soupçon ou même atteinte du covid-19...
C'était compliqué à gérer pour les pompiers, avec cette "peur d'être contaminé, de rapporter le virus dans sa famille,etc..."
Pourtant, il le dit, le risque infectieux, les pompiers savent le gérer mais "le kit pour les risques infectieux, on le sortait une à deux fois par an, peut-être"...
Manque de masques
"Depuis le 11 mai, on a tous o-bli-ga-tion de porter un masque", dit Sébastien Dephot... mais avant cette date, c'était une consigne très difficile à donner aux pompiers car les masques, il fallait en limiter l'usage, pour qu'on n'en manque pas.Au début de l'épidémie, puis du confinement, le Premier ministre et celui de la santé martelaient: " Les masques sont destinés à ceux qui sont en première ligne".
On ne refera pas l'histoire, c'est toute la France, de nombreux centre hospitaliers, soignants qui ont vécu cette gigantesque pénurie de masques et protections. Mais les pompiers n'étaient pas les soignants, même s'ils étaient chaque jour auprès des gens, chez eux ou dans la rue.
"En fait, pendant un mois, on a pu tenir grâce aux dons de masques des particuliers, des entreprises. Même, c'est nous qui allions les chercher chez eux, ces masques, qu'ils ont bien voulu nous donner".
Des masques venant sans doute compléter le stock restreint du service.
" On a vécu le stress du manque de protections sur nos interventions"
Au SDIS de Gironde, selon le pompier syndicaliste, "nos médecins et notre pharmacie ont dû nous restreindre. Attention, on était tous en capacité de se protéger si nécessaire".Alors c'est l'organisation même des missions qui a été adaptée: "On évitait d'engager trop de personnel sur une mission (donc trop de matériel). Un pompier allait au devant de la personne à qui on mettait un masque (chrirurgical). En fonction seulement des réponses, s'il y avait soupçon, on s'équipait (de masque FFP2).
"C'est vrai que le SDIS a dû vraiment s'adapter et a su le faire. Comme avec la chaîne de décontamination à Mérignac " qui permet de décontaminer deux véhicules et des équipements, en même temps, grâce à un nettoyage effectué à la vapeur.Ça, ça été un stress pour les équipes, d'être restreint pour les masques, le matériel.
" Ils étaient où, ces gens-là, pendant le confinement ? "
Avec le déconfinement, le port du masque généralisé, même et enfin dans les rangs des pompiers, la vie semble repremdre son cours. Et même peut-être les mauvaises habitudes.Le Caporal Dephot le déplore, on recommence à avoir des appels "qui ne rentrent pas dans nos missions". On les appelle nous des "carences", par exemple, "quand on intervient à la place des ambulances privés", ou alors quand les gens exagèrent en appelant le 15 ou le 18 pour tout et n'importe quoi.
Ils étaient où ces gens-là pendant le confinement ? Ça montre bien que durant le confinement, ils évitaient d'appeler ? Soit parce que ce n'était pas urgent, soit parce qu'ils avaient peur d'aller à l'hôpital, soit... parce que le 15 a fait plus de tri!"
Les "oubliés" de la crise?
Rien ne changera sans doute la force de leur engagement. Mais Sébastien Duphot le dit: " On a un peu été les oubliés".A l'heure où l'on applaudit les soignants, on rend hommage aux éboueurs, postiers et caissières... "Même notre président n'évoque les pompiers dans son discours qu'après qu'on lui en ai fait la remarque..." ( président du SDIS, soit Jean-Luc Gleyze, Président du conseil départemental de la Gironde, NDLR)
Pour autant, des enseignements sont à tirer de ces efforts, de cette crise exceptionnelle.
Il estime qu'il faut rebondir après cet épisode pour oser restructurer le service pour plus d'efficacité, mais avant tout pour ne pas épuiser ou diluer les ressources entraînées pour l'excellence, et souvent mobilisées pour pallier des carences sociales, policières, parentales.On va demander au Président, au Directeur, une entrevue pour débattre et tirer les enseignements de cette crise.
On a un service public performant. Que ce soit les soignants, police, gendarmes, pompiers. S'il y a des abus, forcément cela coûte plus cher. Il faut une prise en compte, de la population et des politiques, que ce service est primordial !