Dans les Deux-Sèvres, des éleveurs de volailles en plein air refusent d'appliquer l'arrêté du gouvernement lié à la grippe aviaire. Ils sont soutenus dans leur démarche par la Confédération paysanne.
Sur son exploitation située à Mazières-en-Gâtine, Hélène Bailly vérifie chaque matin qu'un prédateur n'a pas fait de dégâts dans la nuit. C'est un rituel qu'elle effectue pour s'assurer de la bonne santé de ses volailles élevées en plein air.
Malgré les mesures de confinement imposées par le gouvernement depuis le 5 novembre dernier en raison du risque "élevé" de grippe aviaire, l'avicultrice n'entend pas modifier sa façon de travailler.
"Mes volailles grattent, mangent des vers de terre, se perchent sur les arbres ; elles passent leurs journées à attraper des insectes" explique-t-elle, "c'est un vrai plaisir à regarder et ça me remplit de joie tous les jours."
Enfermer ses animaux, elle ne veut pas en entendre parler, "pour ne pas mentir" à ses clients, mais aussi pour le bien-être de son cheptel.
Mettez des volailles ensemble, enfermez-les, serrez-les entre 4 murs, et vous les rendrez malades. Elles vont être stressées et se piquer.
À moins de deux mois des fêtes, elle est déjà confrontée aux premières questions de ses habitués. "Certains de mes clients m'ont demandé si mes poulets seraient toujours bons à manger, élevés dedans. Je leur ai répondu que pour moi, c'est hors de question."
Incohérent
Comme Hélène Bailly, une vingtaine d'autres éleveurs des Deux-Sèvres refusent eux aussi d'enfermer leurs animaux. Ils sont minoritaires dans un département qui compte plus de 800 aviculteurs mais ils sont soutenus par la Confédération paysanne qui plaide pour une "réglementation adaptée".
"Nous n'affirmons pas que les élevages en plein air ne comportent pas de risque mais le confinement n'est pas la solution" oppose Jean-Paul Gobin, membre du syndicat et lui-même aviculteur à Neuvy-Bouin.
La preuve en est que les trois cas de grippe aviaire constatés l'an passé dans le coin ont tous concernés des élevages de canards confinés.
Son syndicat dénonce aussi les conséquences économiques sur des exploitations fragiles. "Soit on nous propose de diminuer les densités d'animaux et donc de produire beaucoup moins, soit de construire des bâtiments de confinement et donc d'investir encore plus" assure-t-il, "et puis, enfermer des volailles 6 ou 8 mois quand on fait de l'élevage en plein air, c'est incohérent."
Contrôles renforcés
Une position que partage Hélène Bailly. "Si je devais enfermer mes volailles, j'arrêterais mon métier" assure-t-elle. D'autres pourraient tout simplement ne pas avoir le choix. Selon la Confédération paysanne, un tiers des élevages familiaux vendant des volailles de plein air en circuit direct serait menacé de disparition.
De son côté, la préfecture du département prévient qu'elle va renforcer les contrôles. Ceux qui n'appliqueront pas l'arrêté de mise à l'abri risquent jusqu'à une fermeture administrive et ne toucheront aucune indeminté en cas de contamination de l'élevage.
Lors de l'épidémie de grippe aviaire de l'hiver 2020, près de 3,5 millions de volailles avaient été abattues, principalement dans le sud-ouest.
Le reportage d'Alain Darrigrand, Calypso Vanier et Simon Lamare :