Covid-19 : qui de l’homme ou de la bête, de la bête ou de l’homme ? L’origine du mal...

Un chat vient d'être testé positif au covid-19 en France. Probablement infecté par son propriétaire. Aucune contamination d’un animal domestique vers un humain n’a été constatée. Le lien entre animal et humain existe à propos du covid-19, mais sûrement pas celui que vous imaginez.
 

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L’unité mixte de recherche en virologie de l’École nationale vétérinaire d’Alfort, de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses) et de l’Inrae, en lien avec l’Institut Pasteur, a détecté le premier chat porteur du covid-19 en France fin avril 2020.

Il s’agit seulement du quatrième cas identifié dans le monde. Des chats, qui selon l’unité de recherche, ont été infectés par leurs propriétaires, tous atteints du covid-19.

Quatre dans le monde… Ce qui tend à prouver que le chat n’est pas facilement infecté par le virus. L’école vétérinaire de Maison-Alfort en appelle cependant à la vigilance des propriétaires d’animaux de compagnie, afin de protéger ces derniers :

“Afin de protéger leur animal familier, il est conseillé aux personnes malades du Covid-19 de limiter les contacts étroits avec leur chat, de porter un masque en sa présence et de se laver les mains avant de le caresser.”

L’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses) a indiqué depuis début mars 2020 (avis complété fin avril) qu’il n’existe aucune preuve que les animaux de compagnie et d’élevage jouent un rôle épidémiologique dans la propagation du virus.

Quatre chats dans le monde. Un seul chien testé positif, à Hong-Kong, suite à une exposition proche avec ses propriétaires infectés par le covid-19. Le chien ne présentait aucun signe clinique.

Inutile donc de craindre quoi que ce soit de votre chien ou de votre chat… Vous pouvez leur transmettre la maladie, l’inverse ne semble pas possible.
 

Chauves-souris, pangolins et marchés d’animaux

Au coeur des débats depuis les prémices de l’épidémie, la chauve-souris.

Le petit mammifère volant pourrait, selon certains experts, être à l’origine de la pandémie. Plus précisément une espèce asiatique, non présente en France même en parc zoologique.

Raccourci plus que rapide, et c’est un euphémisme, mais allons y, empruntons ce chemin nous ne serons pas déçus…

Alors oui, il est établi que certaines espèces de chauves-souris asiatiques sont des l’hôtes connus d’un virus dont le covid-19 ou SARS-CoV-2 serait issu. Le virus affectant les chauves-souris aurait muté, ce serait transformé, recombiné, pour parvenir à affecter l’homme. Quand ? Comment ? Par le biais d’hôtes intermédiaires (le pangolin par exemple) ? Cela on n'en sait rien. Les virologues du monde entier en débattent actuellement.

Le pourquoi en revanche fait l’unanimité. L’homme est l’artisan de son propre malheur.

 



Le docteur Gilles Sonthonnax, vétérinaire, nous éclaire :
 

Globalement les virus sont plutôt spécifiques à une espèce et ils sont majoritairement peu stables dans le milieu extérieur. Pour que le virus passe d’un hôte à l’autre il a besoin de muter. La mutation est un processus permanent, mais encore faut-il entrer en contact avec un hôte réceptif. Il faut donc une adaptation du virus à son nouvel hôte et plusieurs choses vont la favoriser. Notamment le stress et la promiscuité.

Dans les marchés aux animaux comme on peut en voir en Chine par exemple où les animaux sont détenus dans des conditions de stress extrême, la charge virale va être beaucoup plus importante, de même que l’excrétion par l’animal stressé. Ajoutez à cela la promiscuité avec l’animal, le manque d’hygiène, ou encore la consommation de la viande de l’animal infecté, le passage du virus est facilité.

Il y a beaucoup de virus dans la nature qui touchent différentes espèces. Mais ce n’est pas parce que certaines souches pourraient contaminer l’homme qu’elles le font.

Et l’histoire récente tend à nous offrir sur un plateau des preuves accablantes de cet état de fait. SRAS, MERS, Ebola, Nipah… Des virus proches de ceux dont les chauves-souris peuvent être porteuses, avec, avant la transmission vers l’homme, des hôtes intermédiaires (civettes, singes, porcs, dromadaires, etc) détenus ou élevés dans des conditions de stress extrême et d’hygiène défaillante, ou dont la viande a été consommée (viande de brousse). En Afrique l’épidémie de fièvre de Marburg serait, quant à elle, due à une contamination directe de la chauve-souris vers l’homme, du fait de l’empiètement du second sur le territoire de la première.

Le naturaliste Marc Giraud précise :

Aujourd’hui on ne parle plus que de masques et de vaccins et on oublie la cause principale de l’épidémie. A savoir le trafic animal et la déforestation, les marchés aux animaux où ils sont tous entassés, le virus passe de l’un à l’autre. Cela met les humains en contact avec des pathogènes auxquels ils ne sont pas habitués. Et c’est ça le drame. On oublie que l’on fait partie du monde vivant et que l’on subit les lois du monde vivant.

En clair l'animal ne nous transmettrait pas de virus si on le traitait avec respect et si on ne détruisait pas son milieu.


Le concept One Health

Le docteur Sonthonnax, tient à mettre en évidence le concept One Health, en français Un Monde, Une Santé. Une approche qui reconnaît que la santé humaine est étroitement liée à celle des animaux et de l’environnement partagé par toutes les espèces animales. Un concept qui n’est pas nouveau mais qui devient de plus en plus prégnant.

En février 2019 l’ordre National des Vétérinaires en faisait le thème principal de sa journée annuelle.

Depuis des années aux Etats Unis le CDC (le Centre pour le contrôle et la prévention des maladies) en a fait son cheval de bataille :

Les populations humaines augmentent et se développent dans de nouvelles zones géographiques. En conséquence, plus de personnes vivent en contact étroit avec des animaux. Or un contact étroit avec les animaux et leur environnement offre plus de possibilités pour les maladies de passer entre les animaux et les personnes.
Le monde a connu des changements dans le climat et l'utilisation des terres, comme la déforestation et les pratiques agricoles intensives. Les perturbations des conditions environnementales et des habitats peuvent offrir de nouvelles opportunités aux maladies de se transmettre aux animaux. Les mouvements de personnes, d’animaux et de produits d'origine animale ont augmenté grâce aux voyages et au commerce international. En conséquence, les maladies peuvent se propager rapidement à travers les frontières et dans le monde.

 

Cette leçon vaut bien un changement ?

L’homme est-il allé trop loin ? S’en rend-il enfin compte ? Doit-il revoir son rapport à l’animal et à l’environnement s’il ne veut pas faire naufrage (si Noé voyait ça !) ?

La Chine a communiqué sur le fait que le gouvernement avait légiféré pour interdire les marchés d’animaux vivants. Il aura fallu des centaines de milliers de morts à travers le monde pour obtenir cette victoire. Mais en est-elle vraiment une ? Marc Giraud émet quelques doutes :

Le gouvernement Chinois avait déjà dit que ces marchés seraient interdits au moment du SRAS, et cela n’a pas été suivi d’effets. Et même si cela était respecté, cette interdiction ne concerne que l’alimentaire et pas la pharmacopée. Aujourd’hui par exemple des centaines d’ours sont torturés en Chine car ils ont décrété que la bile d’ours était un médicament contre le covid-19, donc le progrès n’est pas encore là.

Le braconnage de pangolins, animal le plus braconné au monde, pour ses écailles censées être aphrodisiaques, a baissé quelques temps mais là il est en pleine recrudescence.



D’autre part de tels marchés existent aussi ailleurs dans le monde.

La France, a t-elle son rôle à jouer sur ce terrain ? Oui répond Marc Giraud :

La déforestation ne concerne pas que le Brésil. La France vient d’autoriser une nouvelle exploitation des mines d’or en Guyane par exemple, et cela implique de la déforestation.

Et puis lorsque l’on parle de virus qui passe d’un hôte à l’autre à cause du stress, du nombre et de la proximité on peut aussi penser aux élevages intensifs

Dans le journal The Gardian, l’écrivain américain Jonathan Safran Foer soulève la question :

“Actuellement, et depuis plusieurs décennies, la viande consommée par les humains provient d’animaux à la génétique uniformisée. Non seulement leur système immunitaire est faible, mais en plus l’administration de médicaments est monnaie courante. Citons également leurs terribles conditions de détention.”

Marc Giraud nous rappelle que la France a déjà été touchée par ces épidémies :

On a déjà vu la crise de la vache folle, la grippe H1N1. Ce sont des concentrations d’animaux d’élevage qui vont entrer en contact avec des animaux sauvages, plus c’est confiné, plus le virus peut circuler.



Et si l’espoir venait de… La chauve-souris ?

Paradoxe incroyable, le petit mammifère pointé du doigt comme l’origine de tous nos maux, porterait en lui notre salut.

En effet, son incroyable immunité face à des virus mortels pour d’autres espèces et son étonnante longévité sont actuellement étudiées de près par les chercheurs du monde entier.

Un consortium international de chercheurs, baptisé Bat1K a lancé un immense programme de séquençage des génomes des quelques 1300 espèces de chauves-souris connues dans le monde.

« Alors que des virus liés – mais non identiques – à ceux qui causent les maladies infectieuses émergentes circulent parmi les chauves-souris, les risques pour l’homme diminuent considérablement en protégeant la faune sauvage contre le trafic et en limitant l’empiétement sur les habitats sauvages. Comme les chauves-souris ne tombent pas gravement malades à cause de ces virus, la recherche sur la manière dont elles y parviennent pourrait nous aider à lutter contre de futures épidémies. » Bat1K

Une morale digne d’une fable de La Fontaine, mais à quel prix !
 



 
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