La société agricole du domaine de Berneuil s’étend sur 1200 hectares. Une ferme industrielle dont on parle peu et qui provoque des nuisances pour les riverains. Le projet d’installation d’un méthaniseur fait craindre aux habitants encore plus de pollution.
On parle souvent de la ferme "des mille veaux", à Saint-Martin-le-Vieux, qui accueillera bientôt 800 bovins, et qui crée la polémique. Pourtant, il existe d’autres fermes industrielles bien plus massives, telles que la ferme de Berneuil, un élevage de 2500 bovins.
Aymeric Mercier, membre du syndicat de la Confédération paysanne Haute-Vienne, est formel :
Là, on est vraiment sur un cas d’école de l’industrialisation de l’agriculture en France.
Une extension "en silence"
La société agricole du domaine de Berneuil s'étend sur 3 communes – Berneuil, Saint-Junien-les-Combes et Le Dorat – soit une surface de 1200 hectares de terres et de forêt. L’entreprise agricole a été créée il y a plus de 30 ans et a augmenté petit à petit. Elle a été rachetée par un gros investisseur français, Georges Delachaux, puis agrandie en 2014.
"Tout s’est fait en silence, témoigne Maria Brunier, de l’association Eaux les Coeurs. Petit à petit l’entité a pris possession des terres. Elle a augmenté uniquement par des autorisations données très rapidement, sans que la population soit au courant."
Nuisances pour les riverains
Depuis son élargissement il y a quatre ans, les riverains se plaignent de nuisances : l’eau, polluée, n’est pas buvable, et les odeurs parfois insoutenables empêchent de sortir prendre l'air.
L’association d’habitants Eaux les Coeurs, s’est créée en juillet dernier à Saint-Junien-les-Combes, en réaction à un nouveau projet du propriétaire de la ferme. Ce dernier souhaite construire un gros méthaniseur, à 200 mètres des plus proches habitations de la commune. Les riverains craignent que les nuisances s’accentuent.
Un méthaniseur bon pour l’environnement ?
Or ce projet est soutenu notamment par la préfecture, qui estime que ce projet, validé, est vertueux pour l’environnement. La méthanisation, c’est-à-dire le traitement naturel de déchets organiques, permet de produire du biogaz. C’est l’un des modes de production d’énergie soutenu par la loi de transition énergétique pour la croissance verte.
Mais pour Aymeric Mercier, de la Confédération paysanne, sous couvert d'écologie, on touche à l'aberration du système : "Le lait ou la viande qui sont produits par ces bovins deviennent des sous-produits de l’électricité. Cela nuit aux revenus des autres agriculteurs qui n’ont pas la possibilité d’accéder à ces investissements."
Le site de La Barassat, racheté par la ferme de Berneuil est destiné à recevoir le résidu ultime du futur méthaniseur : "Tous les déchets et résidus, avec la pluie, vont s’écouler sur La Basine, la rivière qui coule en contrebas.", alerte Michel Moreau, le président de l’association Eaux les Coeurs.
Malgré nos demandes d'interviews, les refus de communiquer sur ce sujet sont nombreux, notamment de la part des défenseurs du projet.
Un investisseur discret
Qui est Georges Delachaux, le propriétaire de cette ferme ? Contacté par France 3, l’homme a refusé de s'exprimer. Cet industriel gère ou co-gère 27 sociétés diverses de promotion immobilière, de commerce de gros, de culture de céréales, etc.
Selon Aymeric Mercier, il s’agit d’un investisseur :
Les opposants au méthaniseur ont déposé un recours devant le tribunal administratif. Mais en attendant, le projet peut se concrétiser car il n'est pas soumis au régime de l'autorisation, qui impliquerait notamment une étude d'impact.C’est quelqu’un qui n’est pas agriculteur et qui a pris le statut d’agriculteur pour s’installer. Il avait quelques dizaines de milliers d’euros à investir, en sachant que la ferme n’était pas rentable en l’état. Et il a décidé d’investir là-dedans pour faire fructifier son argent sur la base de l’électricité d’origine agricole.