Avec Oscar Garcia, et son restaurant 'Cueillette' à Altillac en Corrèze, distingué, le Limousin compte désormais quatre étoiles au Guide Michelin. Bien peu, par rapport à la Nouvelle-Aquitaine. Mais notre ancienne région ne s’en tire pas si mal face à une distinction, toujours aussi prestigieuse certes, mais qui a un tel coût qu’on ne peut guère la voir se multiplier sur notre territoire.
Une nouvelle étoile en Limousin !
Le Guide Rouge a dévoilé son verdict, ce lundi 18 mars. Soixante-deux établissements ont été promus cette année (contre 44 l’an dernier), dont cinquante-deux ont obtenu une première étoile (contre 32).
Et surprise (ou pas, vu le lauréat), une de ces nouvelles étoiles a atterri… en Limousin, plus précisément en Corrèze !
En effet, aux côtés de la Chapelle Saint-Martin, de Gilles Dudognon, à Nieul (87), du Moulin de La Gorce, du regretté Pierre Bertranet, à La Roche-l’Abeille (87), de la Table d’Olivier, de Pierre Neveu, à Brive (19), se trouve désormais Cueillette, d’Oscar Garcia, à Altillac (19).
Plus jeune étoilé de France en 2014 à La Maison d’Uzès (30), Oscar Garcia avait racheté, avec sa compagne Julie Pons, un ancien manoir dans la localité corrézienne. Et après dix-huit mois de travaux, Cueillette ouvrait, cinq chambres et un restaurant qui prône "l’hyper local, sans concession."
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Quatre étoiles limousines… sur les soixante-neuf de Nouvelle-Aquitaine
La grande région totalise désormais soixante-neuf étoiles, réparties entre un établissement trois étoiles, sept deux étoiles, et cinquante-deux une étoile.
Notre Limousin, au sein de la Nouvelle-Aquitaine, fait-elle pour autant figure de parent pauvre au « Michelin » ? Réponse de Normand : oui et non.
- Oui, car la Creuse demeure toujours sans étoile.
- Oui, car quatre étoiles sur soixante-neuf, c’est à peine 5%, quand même notre population « pèse » 11% de celle de Nouvelle-Aquitaine.
- Mais non, quand on sait que la Vienne et les Deux-Sèvres n’ont pas d’étoile non plus.
- Et non, quand on regarde la répartition géographique.
Parmi les « poids lourds », on trouve la Gironde (vingt-quatre étoiles cumulées), les Pyrénées-Atlantiques (treize), et les Landes (neuf).
Quatre étoiles cumulées, c’est un peu moins que la Dordogne (7), presque autant que la Charente (5) et autant que la Charente-Maritime (4).
Pourrait-il y avoir plus d’étoiles limousines ?
Là encore, une réponse de Normand s’imposerait, mais avec quelques précisions qui ne manqueront pas de battre en brèche quelques idées reçues.
Tout d’abord, la question des talents. Le Limousin n’en manque pas.
Je ne donnerai pas de noms, pour ne pas en vexer, mais oui, il y a d’autres chefs dans la région qui mériteraient d’être honorés.
Gilles DudognonChef étoilé en Haute-Vienne
Évidemment, si ce n’était qu’une question de talent, on aurait d’autres étoilés dans la région. On peut penser à Nicolas Eche à Brive, ou au restaurant de Palard à Limoges, pour ne citer qu’eux.
Jean Luc ViginiatRestaurateur et ex-président de l’UMIH 19
Ensuite, éternelle auto-flagellation, la question de l’attractivité limousine, aussi bien touristique qu’économique.
Ce n’est pas le vrai problème. Bien sûr, si vous regardez la carte de France des étoilés Michelin, c’est plutôt dans les régions touristiques qu’on les trouve. Avoir quatre mois de soleil l’été, ça aide. Mais en lien avec le tourisme, il y a aussi la question de l’accueil. Parce que vous vous rendez compte aussi que c’est là où les gens passent beaucoup de nuits qu’on trouve les étoilés. Mais ce ne sont vraiment pas les premiers critères, les premiers obstacles que je citerai. C’est avant tout un problème économique, une question de coûts !
Pierre NeveuChef étoilé
Et toutes les personnes contactées ce lundi 18 mars d’abonder dans ce sens, de Gilles Dudognon à Jean-Luc Viginiat, de Pierre Neveu donc à Guillaume Palard.
Pour être étoilé, il faut une régularité, une constance, une structure de maison qui t’obligent à te sortir de l’obsession de la gestion. Mais si tu en sors, tu es mort !
Gilles DudognonChef étoilé
Est-ce que c’est une si bonne chose d’avoir l’étoile ? J’en suis ravi, très fier, mais pas si sûr. Elle nécessite tellement d’investissements. En personnel, en produits, en frais…
Pierre Neveu, chef étoilé
Et le chef de poursuivre : "Je pense que tout dépend de la structure, du modèle économique. Moi, cela passe parce que je suis sur une niche, celle de la micro-structure, on fait tout avec ma femme. Les très grosses structures, comme les palaces, cela peut passer. Mais pour les moyens, je parle en taille, pas en qualité, c’est devenu presque impossible. On a la tête dans les étoiles, mais on marche sur des œufs !"
Un constat qui pousse de plus en plus de restaurateurs à ne pas forcément rechercher l’étoile. Pour Romain Palard, "Il y a de tels enjeux financiers pour construire de telles maisons… Et puis il faut des clients prêts à consommer étoilé. Ce serait bien de casser les codes, et d’arriver à envoyer en le mettant plus accessible, mais il faut aussi rester dans les exigences du Guide."
Nous, ce n’est pas qu’on est fier de ne pas faire partie du guide, mais l’objectif, c’est de protéger nos collaborateurs, et de garder nos clients. On nous la donnerait, est-ce qu'on serait capable de la porter cette étoile ? Dans le contexte actuel, je ne pense pas.
Romain PalardDirecteur du Cheverny