Alerte Medecins Pesticides crée un blog autour des perturbateurs endocriniens

L'association Alerte des Médecins sur les Pesticides, crée par un médecin de Limoges vient d'ouvrir un blog pour dénoncer l'immobilisme des pouvoirs publics face aux dangers des perturbateurs endocriniens. Mais au fait de quoi s'agit-il ? Entretien avec le docteur Pierre-Michel Périnaud.

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Parabènes, phtalates, bysphénol A, cadmium, triclosan, plomb, alkylphénols, hydroxyanisol (BHA), butylhydroxytoluène (BHT), ignifuges bromés (PBDE), mercure, téflon et autres composés perflurorés (PFC), etc. Tous sont des perturbateurs endocriniens, et tous nous entourent au quotidien.

On les retrouve dans l'alimentation, les emballages, les cosmétiques, tissus, produits d'entretien, médicaments, produits électroniques, pesticides, dans les plastiques, etc.

Deux phrases qui se terminent par "etc." c'est mauvais signe. C'est dire si ces listes sont longues et si le sujet est vaste et délicat puisqu'il touche à l'ensemble de l'industrie, de l'économie et à notre quotidien.

Tout d'abord qu'est ce que le système endocrinien ? 

Pour faire simple il s'agit de l'ensemble des glandes dites "endocrines" qui sécrètent des hormones, ces messagers chimiques qui déclenchent des effets biologiques sur les cellules et les organes.

Le système endocrinien comprend notamment les ovaires, les testicules, les glandes thyroïde, parathyroïdes et surrénales, l’hypophyse, l’épiphyse cérébrale et le pancréas.
 


Qu'est ce que des perturbateurs endocriniens ?

Pour la définition du terme "perturbateurs endocriniens" allons faire un tour du côté de l’Organisation Mondiale de la Santé qui les désigne comme suit :
« Un perturbateur endocrinien est une substance ou un mélange de substances, qui altère les fonctions du système endocrinien et de ce fait induit des effets néfastes dans un organisme intact, chez sa progéniture ou au sein de (sous)- populations ». OMS, 2002

L’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail  (ANSES) précise :
 
  • Les perturbateurs endocriniens sont des substances qui dérèglent le fonctionnement hormonal des organismes vivants et peuvent entraîner ainsi des effets néfastes sur la santé et l’environnement.
  • Les perturbateurs endocriniens peuvent interférer avec toutes les grandes fonctions des organismes vivants : croissance, reproduction, comportement, nutrition, métabolisme, système nerveux
  • En perturbant le système endocrinien, ces substances peuvent altérer différents processus tels que la communication entre cellules ou tissus et la régulation d’étapes clés du développement d’un organisme.
  • Certaines de ces substances peuvent ainsi entraîner des effets délétères, notamment sur la reproduction, et nuire à la fertilité ou perturber le développement du fœtus. Des études récentes montrent que les perturbateurs endocriniens peuvent également avoir d’autres effets au niveau de l’organisme comme des effets métaboliques, neuro-développementaux ou immunitaires.
 

Le problème ainsi posé, il semble évident, d’un point de vue médical, afin de préserver la santé de chacun et d’éviter de lourds problèmes de santé à tous, qu’il faille éliminer ces substances, en tout cas les limiter au maximum, de notre quotidien.

Or, il suffit de jeter un oeil à la composition des produits de consommation courante qui nous entourent pour s’apercevoir qu’ils sont omniprésents, de notre assiette à notre salle de bain en passant, par nos vêtements, notre mobilier, etc… 

L’association Alerte des Médecins contre les Pesticides créée par le docteur Pierre-Michel Périnaud, installé à Limoges, et regroupant des praticiens de toute la France, vient à cet effet de publier un blog, en collaboration avec l'association européenne (basée à Bruxelles) HEAL, pour tenter de faire avancer les choses.


Entretien avec le docteur Pierre-Michel Périnaud (président d'Alerte des Medecins contre les Pesticides) 

 
  • Pourquoi avoir créé ce blog ?
Docteur Pierre-Michel Périnaud : Tout simplement parce que malgré le fait que les dangers qu'ils représentent soient établis, la réglementation en la matière s'est enfermée dans une sorte d'impuissance face aux lobbies industriels. Or il faut absolument que les politiques se mobilisent pour réglementer l'usage des perturbateurs endocriniens et faire appliquer la réglementation. Si ce n'est pas le cas, dans 20 ans rien n'aura changé. 
 
  • Que dit la réglementation européenne ?
Docteur Pierre-Michel Périnaud : Pour le moment l'Union Européenne a admis le danger que représentent les perturbateurs endocriniens, elle a d'ailleurs choisi une approche de ces substances "par le danger" c'est-à-dire en admettant qu'ils peuvent poser problème à très faible dose.

Mais pour le moment elle n'a définit les perturbateurs endocriniens que pour les pesticides et les biocides, pas pour ceux qui concernent l'alimentation les jouets et autres...

Et elle n'a adopté une réglementation que pour ceux-là. Et uniquement sur un nombre limité de substances, elle a exclu de la réglementation celles pour lesquelles les données scientifiques ne sont pas encore suffisantes, parce que pas assez étudiées et qui sont seulement "suspectées" d'être des perturbateurs endocriniens, elles ne sont pas concernées par une exclusion du marché.

D'autre part la mise en place de la réglementation s'est faite d'une manière incroyablement lente. Elle a été adoptée en 2009, mais à cause de la pression des lobbies de l'industrie, n'a été appliquée qu'à partir de 2018.

 
  • Et pour les substances que l'on retrouve dans l'alimentation, les jouets des enfants, les cosmétiques ?
Docteur Pierre-Michel Périnaud : Pour l'instant l'Union Européenne n'a pas statué. Mais si le modèle choisi pour réglementer les perturbateurs endocriniens utilisés dans les pesticides passe et reste en l'état, nous craignons qu'il soit fait de même pour les autres. Et ce n'est pas imaginable.
 
  • Et la France dans tout ça ?
Docteur Pierre-Michel Périnaud : Nous avons choisi d'étudier l'exemple de 25 perturbateurs thyroïdiens. Il faut savoir que les substances chimiques ont une autorisation de mise sur le marché limitée et doivent être réévaluées tous les 10 ou 15 ans.  Une quinzaine des substances témoins arrivaient au terme de leur autorisation de mise sur le marché. Celle ci devait être réexaminée entre 2019 et 2020. Et bien nous avons eu la surprise de constater que leur autorisation avait été reconduite sans examen, par simple dérogation. Ce qui signifie que les industriels et les politiques se permettent d'autoriser l'utilisation d'une substance sans que sa dangerosite ne soit réévaluée... 

Le rôle que la France a à jouer, et le même que celui des autres états membres. A savoir défendre une meilleure protection des personnes par le vote ! Et nous souhaitons que les votes des états soient rendus publics, afin qu'il s'agisse d'un réel engagement politique.

L'Europe vient d'annoncer pour la toute première fois des stratégies chiffrées en matière d'environnement et de santé publique : réduire de 50% l'usage des pesticides et augmenter de 25% la part du bio d'ici 2030. Il y a donc une véritable volonté politique qui ne doit pas rester un effet d'annonce. Et pour cela les députés européens doivent clairement s'engager.


Le blog d'Alerte des Médecins contre les Pesticides et de HEAL va au-delà du rappel des dangers des perturbateurs endocriniens, il est  un appel au courage des députés européens, des élus, des états, pour protéger les citoyens. 

 
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